Photo : Sous Un Autre Angle
(Rediff) Rencontre avec Angélique Rocheteau, osiéricultrice et vannière, installée non loin de la rivière de Penerf à Surzur (56), en plein cœur du Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan. Elle créé sur-mesure et répare des objets en osier, propose des stages de découverte dans son atelier, et anime des actions dans des écoles. Elle nous raconte son parcours personnel et professionnel, dans lequel la notion de transmission est particulièrement importante.
La bonne humeur, l’enthousiasme, la passion de transmettre, mais aussi la détermination. Voilà ce qui caractérise Angélique Rocheteau. Artisane-vannière mais aussi osiéricultrice, elle s’est lancée en 2017, et s’est installé à Surzur, non loin de la rivière de Penerf, dans un territoire à la riche biodiversité. Un tournant dans son parcours professionnel. « J’ai fait des études de gestion. Mon dernier emploi, c’était au service dépannage d’une société de bâtiment à Vannes !». Pas grand chose à voir avec la plantation de saules et les créations en osier…Et pourtant, l’agriculture fait partie de la vie d’Angélique depuis longtemps. « Mon grand-père était paysan, je m’amusais toute jeune avec des brins d’herbe en mettant la clôture pour les vaches », se souvient-elle. « Mais quand j’étais étudiante, ce n’était pas un secteur qui était valorisé. Mon parcours scolaire a fait que mon installation a été retardée, mais cela m’a permis au final d’acquérir de la maturité pour me lancer plus tard ». La toute récente quadragénaire revendique aussi son « amour de la terre et du végétal » pour expliquer sa transition professionnelle vers la vannerie. « C’était en moi je crois, mais je m’interdisais tout simplement d’y rêver ! ». Alors à côté de son emploi, Angélique se forme, passe des diplômes grâce à la Validation des Acquis de l’Expérience, s’exile temporairement du côté de Nancy pour se former à la vannerie dans la seule école française dédiée. Pas facile quand on est « mariée et maman de trois enfants », souligne-t-elle. Mais elle persévère. Et créé son activité. Aujourd’hui, elle peut vivre de sa passion, même si tout n’a pas été si simple… « Etre vannière, c’est encore connoté. Et puis être une femme, en agriculture, et travailler l’osier, parfois ça fait beaucoup pour certains !Sur certains comportements ou réflexions, notamment dans les réseaux, on a encore des marges de progression ! », affirme-t-elle.
Si son parcours a été plus long que d’autres, cela lui été particulièrement utile pour réfléchir à son projet : l’acquisition et l’installation sur des terres agricoles humides, en plein cœur du Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan. Des terrains « qui n’étaient pas même cultivés en agriculture traditionnelle », et sur lesquels elle a pu planter 2500 pieds de saule. « C’est un endroit propice pour la culture de cet arbre, car il n’y a pas besoin d’arroser ici », précise-t-elle. D’autres pieds se développent aussi au camping de la Fontaine du Hallate, à Plougoumelen, où le propriétaire pratique entre autre la phytoextraction, c’est-à-dire l’assainissement des eaux à l’aide de plantes. « L’oseraie, c’est une culture de saule, qui est coupée tous les ans, généralement entre novembre et mars, quand la sève est descendue. C’est à ce moment que le saule devient osier. On sèche ensuite le saule, on le calibre et on le stocke », détaille Angélique.
Dans son atelier en bois, qu’elle a construit l’année dernière, l’osiéricultrice et vannière réalise des créations sur-mesure, et répare des objets en osier que les particuliers peuvent lui apporter. Angélique anime aussi des stages, à destination des adultes et des enfants. Et intervient pour des actions pédagogiques dans des écoles. Des moments qui sont très importants pour elle. « Transmettre, je crois que c’est ça qui m’anime », souligne-t-elle. Une volonté qu’elle attribue à sa rencontre, alors adolescente, avec Michel Le Corno, directeur du lycée Saint-Paul à Vannes, où elle était élève. « J’étais obligée de travailler en parallèle de mes études, j’étais dans une situation vraiment atypique. Et il a toujours été bienveillant avec moi. Ça a changé ma vie », avoue-t-elle.
La transmission, pour Angélique, c’est aussi faire passer des messages sur l’écologie, notamment aux plus petits. « C’est important aussi d’éduquer les enfants. On n’a pas tous la même chance à la naissance, et reconnecter les enfants à la nature grâce à l’école, c’est super. On a aussi ce travail d’éducateur, en collaboration avec les communes et les équipes enseignantes. On travaille plein de valeurs dans ces ateliers ! ». Mais la vannière ne veut pas pour autant être « donneuse de leçons ». «Le but, c’est de trouver chacun à notre niveau des solutions pérennes. Je sensibilise les gens, par exemple au rotin, qui vient de très loin, pour qu’ils puissent faire des choix ». « Il va falloir se secouer et trouver tous des solutions, mais sans opposer les gens. C’est comme ça que pour moi on arrivera à faire bouger les lignes. », ajoute-t-elle.
A son niveau, Angélique Rocheteau essaie de « faire sa part ». Des panneaux photovoltaïques vont bientôt être installés sur son atelier, afin d’être autonome en électricité. Elle utilise des toilettes sèches. Et fait attention à l’utilisation des ressources et la production de déchets dans le cadre de son activité. « Je suis labellisée « Green Morbihan » », explique-t-elle. « Pour l’obtenir, il faut répondre à 64 critères très précis, notamment sur l’eau et l’électricité ». Une démarche logique, quand on est situé dans une zone à la biodiversité remarquable, et qui permet à Angélique, grâce à son « double-métier », d’atteindre l’équilibre parfait, à savoir le lien avec la terre qu’elle travaille et qu’elle aime tant, mais aussi le lien avec les autres. De quoi, pourquoi pas, rebaptiser son activité « Les liens et les brins de Penerf » !