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#7 Portraits d’équipe : Laurence Mermet, secrétaire de l’association

Laurence Mermet est actuellement enseignante dans les lycées agricoles du Finistère, un métier qui lui apporte beaucoup. Femme affirmée, engagée dans ses choix personnels et envers les autres, Laurence a passé la majeure partie de sa carrière à côtoyer des militants écologistes : du côté civil et associatif comme du côté politique. De France Nature Environnement à Greenpeace en passant par le parti des écologistes, Laurence nous parle de son apprentissage, des valeurs qu’elle défend aujourd’hui et de ce en quoi elle croit.

Tu es secrétaire de l’association Eco-bretons, tu as également été présidente, si je ne me trompe pas, peux tu nous parler de ton histoire avec l’association ?

Je suis toujours dans la dynamique du CA de l’association. Mon histoire avec l’association a démarré au tout début, avec ceux qui avaient initialement porté le projet . Ils étaient venus me voir en me faisant part de leur intention et je trouvais que c’était une super idée de créer un média régional dédié au développement durable avec un statut associatif. Ce n’était pas gagné d’avance, mais je leur ai apporté un soutien ponctuel au début, plus fréquent ensuite.

Ton investissement dans des structures liées à l’écologie, à l’environnement, au développement durable, ne date pas d’hier. On peut dire que ça prend une grande place dans ta vie.

Adolescente j’étais déjà pas mal préoccupée par la question animale, nos rapports complexes et hélas de plus en plus insupportables avec les animaux. J’ai été végétarienne quelques années et abonnée à l’« Action zoophile », une petite feuille de chou antivivisectionniste. Je suis de nouveau végétarienne depuis 5/6 ans maintenant. Je constate avec espoir que cette problématique émerge avec force dans notre société depuis quelques années.

Ensuite j’ai fait des études qui m’ont conduite aux métiers de l’information et de la communication et mon premier boulot, c’était dans un groupe pétrochimique, au service communication, j’y avais effectué un stage. Il s’agissait de faire de la comm’ sur la pétrochimie, les produits organochlorés, la belle chimie, magnifique ! A un moment donné, il était question que je sois embauchée, mais ça ne faisait pas sens pour moi.. Il y’a eu un rejet intérieur. Et à ce moment-là, j’ai trouvé un boulot dans les petites annonces de Libé, à l’époque la FFSPN (Fédération française des sociétés pour la protection de la nature) qui par la suite est devenue France Nature Environnement cherchait sa chargée d’information et puis de coordination rédactionnelle de sa revue La lettre du hérisson . J’ai postulé et je suis entrée à la FFSPN. Les locaux étaient situés dans le Jardin des plantes, c’était chouette. Et à partir de ce moment là, ça a été une prise de conscience, j’ai eu l’énorme privilège de travailler en militant. C’est à dire que j’ai pu travailler en cohérence avec des convictions qui a un moment donné se sont révélées très fortes. J’y suis restée 5 ans.

Ensuite je suis devenue attachée de presse à Greenpeace France, au moment de la reprise des essais nucléaires français durant l’été 1995.

Le passage à la vie politique avec les écologistes

Au bout de cinq ans passés avec Greenpeace, qui m’ont à jamais marquée, le cabinet de la ministre Dominique Voynet m’a approchée. Cette dernière entamait sa cinquième année au Ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement, à l’époque ça s’appelait comme ça, et elle cherchait une nouvelle attachée de presse. Passer de l’autre côté de la barrière après avoir été avec ceux qui exercent un indispensable contre-pouvoir, celui de la société civile, ça a été extrêmement intéressant ; découvrir ce que l’on peut faire et ce que l’on ne peut pas faire quand on est un.e politique dans les rouages du pouvoir; comment une ministre écologiste minoritaire au sein d’un gouvernement qui s’affichait de gauche plurielle peut-elle travailler en bonne intelligence avec les associations, les ONG, sachant sa marge de manœuvre extrêmement limitée. Il fallait apprendre à jouer fin sur certaines thématiques, notamment le nucléaire qui était sous la tutelle du ministère de l’industrie. Je suis restée avec elle près d’un an et ensuite elle a passé la main à Yves Cochet qui a pris sa suite en tant que ministre jusqu’aux élections présidentielles où le candidat socialiste Lionel Jospin fut éliminé au 1er tour, le 21 avril 2002.

Ensuite j’ai travaillé à la Mairie de Paris, au service communication de la Direction de la Voirie et des déplacements, pour un élu écologiste. Tout ça était extrêmement intéressant, voir comment un maire socialiste, puisqu’il s’agissait de Bertrand Delanoë, avec une équipe là aussi gauche plurielle dont des écologistes, allait réussir à transformer Paris et notamment verdir la politique des déplacements dans une capitale telle que Paris !

Ça, ça a été toute ma vie parisienne, en train de défendre la cause écologique mais en mode intensif et un peu hors-sol. C’était un métier très très prenant. A un moment donné, ça ne faisait plus sens non plus de défendre ces questions en vivant de cette façon là. L’écologie urbaine bien sûr c’est important mais moi, j’avais envie de devenir rat des champs, plus rat des villes. J’ai donc franchi le pas pour la Bretagne, au fin fond du Finistère, dans le Pays de Morlaix où je me plais tant. Ensuite, j’ai travaillé pour le réseau associatif Cohérence, toujours avec une certaine cohérence !

J’ai également travaillé comme collaboratrice de conseillers régionaux écologistes durant un mandat. J’ai ainsi découvert l’échelon régional, ça aussi c’était instructif. C’est important de comprendre les différentes strates politico-administratives françaises, c’est même incontournable. Voir où sont les freins, comment on peut travailler en bonne intelligence avec notamment les agents de la fonction publique, tous grades confondus. Ils sont incontournables, au service des élus certes mais le pouvoir passe et les fonctionnaires restent. Le pouvoir des fonctionnaires est en fait important, ils connaissent les dossiers et les suivent, ce n’est pas toujours facile d’ailleurs pour eux quand il y a un changement de couleur politique de devoir s’adapter. Il y a parfois des résistances.

« En politique il n’y a que des coups à prendre (…) et en particulier quand on est écologistes »

Ça a été très dur, c’est toujours complexe et si je peux retenir une leçon de mon compagnonnage avec des écologistes politiques c’est d’avoir pu pénétrer dans la complexité des situations, des choses. Devoir satisfaire tout le monde, ce n’est pas possible… donc c’est un monde très particulier, écologiste ou pas. Une certaine idée du bien commun, du service publique, heureusement beaucoup d’élus l’ont. Des limites. Parce que je trouve qu’en politique il n’y a que des coups à prendre, on n’arrive jamais à satisfaire qui que ce soit, en particulier quand on est écologiste… et minoritaire. On doit apprendre à composer, à être en permanence dans le compromis, nos propres militants et sympathisants nous renvoient en plus une image négative « Mais c’est plus du compromis, c’est de la compromission ! ». C’est une marge de manœuvre extrêmement compliquée et je trouve qu’il y a des élu.e.s écologistes de terrain qui ont réussi à faire bouger les choses, sur le bio dans les cantines, sur le mariage gay… quand on voit ce qu’a fait Noël Mamère sur la commune de Bègles, quand on voit ce que fait Damien Carême avec les réfugiés à Grande-Synthe. Là franchement, sur le terrain… ils assurent ! Mais il faut redoubler de force, c’est deux fois plus compliqué que lorsque l’on est issu d’une grande formation politique. Le bipartisme a hélas dominé la vie politique de notre pays durant de longues années.

Tu y crois encore ?

J’en suis sortie désenchantée, désabusée sur la difficulté à assumer notre nature humaine dans toutes ses dimensions, mais je garde du respect pour certain.e.s élu.e.s écologistes parce que je trouve que c’est courageux de s’y coller. Un homme comme Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan, qui se bat bec et ongle contre les pesticides, pour sauver les abeilles, entre autres, fait un travail remarquable au Sénat. Donc voilà je garde de l’admiration et de la sympathie.

Aujourd’hui je crois beaucoup plus dans la capacité de la société civile, et du local à se mobiliser. C’est comme ça qu’on arrive à déplacer le curseur, et les politiques suivent…

L’enseignement en lycée agricole : Les jeunes, priorité au projet de vie avant le projet professionnel

J’ai sauté à pieds joints dans l’enseignement, et je suis vraiment contente d’avoir mis les deux pieds dans l’enseignement agricole parce que quand on vit dans une région rurale comme la Bretagne, qui plus est avec des enjeux agricoles énormes, je trouve que c’est une bonne façon de découvrir et faire découvrir les enjeux de notre région, de ses territoires et aussi de mieux connaître et comprendre les jeunes. Le changement que nous voulons voir en ce monde, il part de la pédagogie auprès des jeunes générations. J’ai évidemment une réputation de militante écolo que j’assume et qui irrite parfois certains jeunes issus de milieux agricoles conventionnels mais c’est justement très intéressant de discuter avec eux, leur apprendre à argumenter, accepter des points de vue divergents (idem pour moi !). Tu dois pouvoir justifier pourquoi tu dis ça, pourquoi tu penses ça. C’est important d’avoir une pensée structurée parce que cela offre une liberté d’action et de l’autonomie.

Et je ne suis pas là pour faire du prosélytisme, je distingue parfaitement ma casquette de militante écologiste de ma casquette d’enseignante avec laquelle je dois apprendre aux jeunes à développer une pensée critique par eux même. C’est essentiel. Je suis rassurée de voir qu’il y a quand même une prise de conscience dans les jeunes générations. Certains s’en foutent, ils sont hélas déjà désabusés. En même temps, je trouve que c’est une époque difficile pour la jeunesse, très anxiogène. Nous les adultes, on leur met la pression « et quel métier tu vas faire ?! » et « les études, les études, les études ». Alors évidemment que le projet professionnel c’est quelque chose d’important, mais j’ai encore l’idée un peu désuète que l’école c’est quand même un sanctuaire où on doit aussi les aider dans l’accompagnement d’un projet de vie, avec des désirs, des rêves, des valeurs ! Cela comprend bien sûr le développement d’un projet professionnel. Autant la génération de nos grands-parents pouvait exercer le même métier toute sa vie, c’était possible, depuis le monde a tellement changé et ses mutations s’accélèrent. Alors quelle responsabilité c’est d’accompagner une orientation professionnelle ! Cela existe, des gens qui se sont sentis coincés toute leur vie du fait d’erreurs d’orientation. Il y a aussi parfois des maladresses, malheureusement, au sein du corps enseignant, des collègues qui considèrent qu’une filière pro c’est pour les jeunes qui ne sont pas bons scolairement. Je ne peux pas concevoir qu’on puisse penser ça. Une filière pro ça doit correspondre à quelqu’un qui a envie de rentrer rapidement dans la vie active. Quel que soit leur choix il faut accompagner au mieux ces jeunes gens malgré la pression des adultes. Et en même temps il y a plein de choses encourageantes, toujours.

Des gens qui t’inspirent, des lectures ?

D’abord au-delà de l’écologie, d’une manière plus large il y a Edgar Morin. L’entrée dans sa pensée complexe. Nous avons un mode de fonctionnement complexe, dans un monde complexe et notre nature humaine fait que l’on a besoin de simplifier les choses pour pouvoir les appréhender, pour pouvoir avancer. Au risque de la simplification qui ne rend pas justice à la complexité des situations. C’est pour ça d’ailleurs que je trouve toujours difficile d’arriver à prendre parti complètement pour quelque chose, quelqu’un, un parti, un point de vue…
On fait des choix, il faut certes les assumer à un moment donné de la compréhension que nous avons d’une situation, mais en ne perdant pas de vue que celle-ci est complexe, et moi petit individu, je ne peux absolument pas embrasser la totalité de cette complexité. D’où la nécessité de penser et de faire avec les autres : la belle et difficile aventure de l’intelligence collective !

Intégrer et assumer la lenteur pour mieux comprendre, donc, la complexité des situations. Je le dis notamment aux copains qui ont la dent très dure à l’égard de Nicolas Hulot. Certains lui reprochent son parcours et le fait d’avoir finalement franchi la ligne politique en rejoignant l’équipe gouvernementale de l’actuel président de la République. Il est vrai que moi-même, devant certaines décisions prises, comme par exemple la récente autorisation de tuer des loups, la colère me fait les rejoindre ! Mais je pense qu’il fait ce qu’il peut là où il est. J’aime bien la notion de « faire de son mieux », c’est à dire « je fais ma part du mieux que je peux avec toutes les limites que j’ai et que les structures m’imposent ». C’est tellement facile de plaquer un jugement définitif. La complexité, si on veut lui rendre justice, mérite que l’on prenne du recul, que l’on ne condamne pas péremptoirement l’action d’une personne, comme si d’ailleurs pouvait à elle seule sauver une situation globale. Un Zorro, ça n’existe pas.

La désobéissance civile et la vie en retrait dans les bois de Henry David Thoreau, La voie de la non-violence de Gandhi, celle de Martin Luther King, avec aussi la défense des droits civiques et Vandana Shiva, cette personnalité indienne que je trouve très inspirante. Je prends en ce moment un peu plus le temps de découvrir l’éco-féminisme. Savoir qu’il y a des éco-féministes notamment aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en France qui depuis les années 70, ont associé la cause féministe à la cause écologiste qui n’est qu’une seule et même chose, qu’elles ont mis et continuent de mettre la puissance féminine au service de la Vie. Je trouve ça magnifique.

Tu as participé à l’initiative  Vertes de rage , on peut faire un rapprochement avec l’Eco-féminisme.

Oui, alors Vertes de rage, effectivement, c’était au départ une initiative de quelques copines journalistes parisiennes, avec une belle sensibilité à l’écologie. Nous avons éprouvé le besoin de pousser un grand coup de gueule. L’une d’entre nous, Pascale d’Erm, vient d’ailleurs de publier un très beau livre, Sœurs en écologie  dans lequel elle raconte justement l’histoire des éco-féministes à travers le monde. Nous voulions manifester avec force notre inquiétude et faire bouger les choses car nos enfants, petits à l’époque, étaient comme tous les enfants en contact avec des substances chimiques présentes absolument partout dans la vie quotidienne. Nous avons publié une retentissante et éphémère tribune. Nous avions aussi la chance d’avoir accès à certains médias nationaux. Lorsque l’on peut faire passer des messages pour être entendu par une audience la plus large possible, on le fait. C’était une action ponctuelle qui voulait donner plus d’échos à cette grave problématique. Une association comme Générations futures mène, avec d’autres, depuis des années un travail de longue haleine qui porte ses fruits, timidement mais assurément. Il ne faut rien lâcher face aux menaces qui pèsent sur la santé du vivant dont nous faisons partie !

Ta vision de la transition dans ton quotidien, ce dans quoi tu t’évertues à agir

Vers 13 ans, j’avais décidé de devenir végétarienne suite à un incident alimentaire, l’absorption de viande avariée. Aujourd’hui, j’aimerais bien mener ma cohérence alimentaire vers le végétalisme, mais pas le véganisme qui exclut également tout produit d’origine animale parce que je veux pour le moment encore continuer de porter de la soie, de la laine, du cuir, en étant attentive à leur mode de production, mais bon… cela ne me satisfait pas encore. Disons qu’au niveau alimentaire, je suis en transition. C’est un cheminement long, se nourrir, et c’est quelque chose d’extrêmement politique. On le constate dans les choix agro-industriels, là où ça mène la planète, et les traitements que nous animaux humains infligeons aux animaux non humains, ça m’est aujourd’hui insupportable.

Des actions me semblent également essentielles à mener, en particulier auprès des jeunes dont les cerveaux sont de plus en plus soumis à la dispersion et à l’hyper-sollicitation (le fameux temps de cerveau disponible !). On ne le voit que trop bien avec le monde du numérique que je ne condamne pas pour autant. Il y a du meilleur comme du pire. Et ces jeunes sont assaillis d’informations qui arrivent en flux incessants, sans hiérarchisation, avec très peu de capacités à en vérifier l’origine, la validité, la pertinence…Hélas tout les pousse à la dispersion mentale alors qu’il y a une impérieuse nécessité à se mettre dans l’attention, à réduire tous ces flux envahissants. Et là on rejoint le politique, la nécessité du vivre et du faire ensemble pour les biens communs. Nous ne savons que trop combien il est difficile de résister aux pouvoirs financiers qui règnent en maîtres quasi absolus si nous n’y prenons pas garde aujourd’hui. Et ils ont tout intérêt à avoir à faire à des populations qui réfléchissent le moins possible. Il faut donc au contraire être extrêmement vigilant. Nos démocraties sont plus que jamais fragiles sur une terre en proie à des désordres multiples. Il va nous falloir beaucoup, beaucoup d’attention les uns pour les autres… et laisser enfin nos esprits, si créatifs lorsqu’ils sont libres et autonomes, bâtir les utopies pour demain.

Merci !




Des cours du soir pour apprendre à jardiner au naturel !

C’est la rentrée, le moment de se lancer dans de nouvelles activités. Plutôt que le yoga ou la poterie, pourquoi ne pas choisir des cours du soir de jardinage au naturel ? Proposés par la Maison de la Bio 29, ils se déroulent une fois par semaine à Brest et Guillers, de septembre à juin, et ont pour objectif de découvrir ou redécouvrir les principes de bases du jardinage sans pesticides. Et c’est gratuit !

A partir de 2019, l’utilisation, la détention et la vente de pesticides seront interdits en France pour les particuliers. Alors, pour s’y préparer, autant apprendre dès maintenant comment s’en passer. La Maison de la Bio 29 propose justement à partir de septembre des cours du soir de jardinage au naturel. L’association, qui travaille autour du développement des filières agricoles bio et cohérentes sur le Finistère, développe de plus en plus ses actions dans le domaine du jardinage. « Cela fait 15 ans que nous le faisons. Nos actions à ce sujet sont montées en puissance, car il y a une forte demande de la part du consommateur pour l’entretien des jardins sans produits chimiques. Le grand public se pose de plus en plus de questions à ce sujet », constate Charly Rio, chargé de mission Jardinage et Espaces Verts sans pesticides et formateur « Jardiner au naturel » au sein de la Maison de la Bio 29. Des ateliers et formations sont donc régulièrement organisés par la structure, ainsi que l’opération annuelle « Bienvenue dans mon jardin » sur le département du Finistère. Et donc désormais, des cours du soir sont mis en place. Se déroulant de septembre 2017 à juin 2018, Ils permettront de « (Re)découvrir les principes du jardinage au naturel de manière concrète, participative et pratique ». Au programme notamment : des informations sur les atouts et inconvénients de son sol et comment l’améliorer, attirer et garder les auxiliaires (coccinelles, hérissons, mésanges, vers luisants…), désherber sans désherbant ou aménager pour ne plus désherber, faire un purin d’ortie, aménager son potager pour avoir de belles récoltes avec moins d’efforts, lutter contre les limaces sans tout polluer…Le tout en 10 séances de deux heures le mardi soir, soit à Brest, à la MPT du Guelmeur, 34 rue Montcalm, soit à Guillers, à L’Agora, au 79 rue Charles-De-Gaulle. « Les séances sont ouvertes à tous, du jardinier totalement amateur qui n’a jamais pratiqué à ceux un peu plus aguerris », explique Charly Rio. « Et aussi bien à ceux qui jardinent sur leur balcon, en bac, en jardinière, ou sur des surfaces beaucoup plus grandes ». Le but est de découvrir et échanger ensemble, grâce à un mélange d’approches en salle et de réalisation pratiques, ainsi que de visites de jardin. Ces cours du soir sont gratuits et ouverts à tous, financés dans le cadre de la démarche « habitants jardiniers » mis en place en partenariat avec Brest Métropole. Il faut néanmoins s’inscrire auprès de la Maison de la Bio 29 pour pouvoir y participer.

Pratique :

Inscriptions auprès de la Maison de la Bio : mab29.rio@agrobio-bretagne.org ou 02 98 25 80 33

Préciser nom, prénoms, commune de résidence et adresse mail, et lieu qui vous intéresse, entre Brest et Guillers.

Les cours démarrent le mardi 12 septembre à Brest, et le 26 septembre à Guillers.




L’idée sortie. Le salon Ille-Et-bio à Guichen (35)

Samedi et dimanche se déroule le salon Ille-Et-Bio, à Guichen (35). Au programme de cette édition 2017 placée sous le signe de « la croisée des chemins » : de multiples ateliers, conférences, tables-rondes, et de nombreux exposants.

200 exposants, 30 animations, 30 conférences, 8000 participants. Voilà en quelques chiffres le salon Ille-Et-Bio, dont la nouvelle édition se déroule ce week-end à Guichen (35). Chaque année, l’événement propose « d’informer, d’échanger et d’agir autour de 5 thématiques : habitat et énergie – santé et bien-être – agriculture et jardin- transformation sociale – vie quotidienne ». Cette année, le thème retenu est « à la croisée des chemins ». « Parce que l’avenir de l’humanité dépend des choix individuels et collectifs, Ille&Bio propose un lieu  de découverte, d’exploration et d’échanges où chacun forge ou conforte ses convictions. Salon des solidarités, Ille&Bio porte une attention particulière aux questions d’agriculture et d’alimentation biologiques, et de santé pour favoriser les transitions écologique et sociale. », explique l’association, qui a aussi renouvelé son équipe.

Au programme cette année, après une soirée d’ouverture hier avec la projection du film « L’éveil de la permaculture » l’inauguration du salon le samedi avec une table-ronde radiodiffusée sur «la croisée des chemins », suivie d’une visite du salon. Sur tout le week-end, de nombreuses conférences, animations, ateliers, sont proposés : des discussions et des tables-rondes autour des haies bocagères, de l’élevage laitier, de la qualité des eaux de boissons, au pôle « agriculture et alimentation » ; des ateliers sur les enduits terre, des témoignages sur la réhabilitation de l’habitat, les ondes électromagnétiques, l’habitat groupé, au pôle « habitat et énergie » ; des ateliers bouturage, des partages d’expériences autour des grainothèques ou sur le travail du sol au pôle « jardin et biodiversité » ; des séances de découverte du yoga, des discussions sur les régimes alimentaires en vogue ou encore sur la communication non-violente au pôle « santé et bien-être » ; et des interventions sur les impacts des objets communicants sur nos vies, sur les citoyens financeurs dans l’alimentaire ou encore un atelier « porteur de paroles » au pôle « vie quotidienne transformation sociale ». Sans oublier des ateliers cuisine avec la Biocoop Scarabéee et un espace-action « zéro déchets ou presque », et les 30 ans du groupe Nature et Progrès Bretagne. Tout le programme de la manifestation est disponible sur le site de l’association Culture Bio, organisatrice du salon.




Agriculture, alimentation, et huit films au menu du festival Alimenterre

Le festival Alimenterre vient de démarrer. Au programme, huit films en projections publiques, autour de la thématique « Notre avenir se joue dans nos assiettes ». De nombreux événements sont organisés dans toute la Bretagne, jusqu’au 30 novembre.

Chaque année, le Festival Alimenterre revient en France et dans d’autres pays. Du 15 octobre au 30 novembre, la onzième édition, coordonnée par le CFSI (Comité Français pour la Solidarité Internationale, association reconnue d’utilité publique qui rassemble 23 organisations membres : associations syndicats, collectivités territoriales.) sensibilisera à la compréhension des enjeux agricoles et alimentaires. L’événement vise à faire prendre consciences aux citoyens des causes de la fin dans le monde, proposer des pistes d’actions concrètes pour soutenir un modèle agricole plus équitable, plus respectueux de l’environnement et des écosystèmes, et a pour volonté de provoquer des débats entre tous types d’acteurs sur les questions agricoles et alimentaires.

L’édition 2017 propose ainsi huit films autour de la thématique « Notre avenir se joue dans nos assiettes ». Au programme : six moyens et longs métrages, et deux courts-métrages :

  • Bientôt dans vos assiettes (de gré ou de force), une enquête autour du pouvoir des lobbys sur les populations locales, de la démocratie et de l’environnement.

  • Bugs, sur les insectes, nouveau « superaliment » qui résoudrait les problèmes mondiaux de sécurité alimentaire.

  • Land Grabbing, sur l’accaparement des terres en Afrique, Asie et Europe

  • Cousin comme cochon, sur la production porcine en Bretagne et sur le lien unissant homme et cochon, notamment sur la place de l’animal dans l’élevage.

  • Hold up sur la banane, sur les dérives de la production de ce fruit, notamment au niveau environnemental et humain

  • Vivre dignement de sa terre, sur une filière d’agroécologie au Sénégal

  • Nourrir une métropole, court-métrage sur l’agriculture en Ille-de-France

  • Consommer autrement, quelles solutions ?, court-métrage sur des initiatives locales en agriculture au Brésil

En Bretagne, une dizaine de projections publiques et autant de projections scolaires sont programmées dans l’ensemble du département des Côtes-d’Armor, à l’initiative du collectif Alimenterre22 (Biocoop la Gambille, Biocoop Traou an douar,  Maison de la Bio 22, AMAP Les paniers d’Erquy, Lycée Kernilien, Artisans du monde, Voisins de paniers, Solidarité internationale de la Baie, Collège Racine, Bibliothèque de Bourbriac, Rihc’ESS, SPIP, le RESIA…). Des projections sont également prévues dans le Morbihan avec le Crisla (Centre de Ressources sur la Solidarité Internationale et le Développement Durable), en Ille-Et-Vilaine avec la Biocoop de Vitré ou le Cridev35, dans le Finistère au Lycée Agricole de Suscinio à Morlaix avec le Cicodes…

Toutes les dates et les lieux sont sur le site du festival Alimenterre.

Le prix Alimenterre 2017

Le Prix Alimenterre, concours de court-métrages pour les jeunes de 14 à 25 ans, a récompensé pour la quatrième fois le travail audiovisuel de jeunes autour de l’alimentation et de l’agriculture. Lancé en mai 2016, le Prix Alimenterre 2017 avait pour thème « Nourrir la planète aujourd’hui et demain ». 180 jeunes ont présenté 22 films courts pour cette édition 2017. Les élèves de seconde GT du Lycée Agricole de Kernilien à Guingamp ont été mis à l’honneur avec leur film « Les champs du possible », premier prix dans la catégorie « lycéens » et Coup de Coeur du Jury !

L’ensemble des films lauréats est à visionner sur le site http://agriculture.gouv.fr/prix-alimenterre-2017-les-laureats




Un temps avec … Remy Lucas

Est-ce que vous pouvez nous donner quelques informations pour vous présenter ?

Je m’appelle Rémy Lucas. Je suis le créateur et le dirigeant de l’entreprise Algopack située à St Malo ; c’est une entreprise qui a été créée en 2010.
Je suis issu d’une famille Finistèrienne. Mes grands-parents et arrière grands-parents étaient des « paysans marins » qui vivaient de l’agriculture mais aussi un peu de la pêche. Ils allaient récolter le goémon près de Plouguerneau. Ils chargeaient le goémon dans des charrettes à bras avec des chevaux, l’amenaient sur les dunes pour le faire sécher et s’en servaient comme engrais.
Après des études à Brest, j’ai travaillé 15 ans dans la plasturgie. Un jour, j’ai eu l’idée de remplacer le plastique par des algues. À partir de ce jour, j’ai travaillé pendant 10 ans dans mon garage pour passer de la phase d’innovation à la phase recherche-développement. J’ai déposé des brevets après avoir vérifié sur un site pilote que l’innovation était industriable. Aujourd’hui, trois brevets sont étendus au niveau international.

Comment s’est fait pour vous, le choix des algues ?

J’ai participé, lorsque je travaillais dans la plasturgie, à l’émergence les matières agrosourcées à base d’amidon de maïs et amidon de pomme de terre. J’ai choisi l’algue comme bio matériau estimant que c’était le matériau le plus vertueux au regard de la biodiversité et j’ai souhaité créer l’entreprise la plus vertueuse qui soit dans sa globalité : de la matière première jusqu’au produit final.

Qu’entendez-vous par vertueux ?

1 – Les algues absorbent beaucoup de CO2 : elles fonctionnent comme un puit à carbone au niveau de la mer. Elles transforment ce CO2 en sucres et ensuite libèrent de l’oxygène dans l’eau.
2 – Les algues ne consomment ni pesticides, ni eau contrairement à différents agromatériaux à base de maïs ou autre. On ne vient pas polluer le biotope existant mais au contraire on lui apporte quelquechose puisque le développement des algues brunes favorise le développement du plancton en mer.
C’est un matériau en avance par rapport aux plastiques utilisés sur le plan toxicologique : les plastiques contiennent des substances classées CMR (cancérigènes) comme le bisphénol A, le phtalate. Notre matière est moins nocive pour l’homme. Elle ne contient aucune de ces substances, même pas le formaldéhyde.
Il n’entraîne pas de déchets. En fin de vie, on voit des emballages plastiques partout et énormément en mer.
En commençant 50 ans plus tôt, on aurait pu éviter le 8ème continent dont parle Maud Fontenoy. J’ai voulu créer le matériau qui ne générera aucun déchet et j’y suis arrivé ;
Plus encore qu’aucun déchet produit, ce matériau apporte des oligoéléments lorsqu’il est mis en terre.
C’est le premier matériau 100% biocompostable.

 

En quoi fabriquer un matériau à base d’algues favorise la biodiversité locale ?

La biodiversité globale est favorisée au niveau local car on a deux sources d’approvisionnement en algues : la première source est la récolte des algues dans leur élément naturel avec les chaluts et leurs « scoubidous ».
La seconde source, qui se développe maintenant, est la culture d’algues. On cultive les algues en écloserie. On les dépose sur les boutes c’est-à-dire sur des filières et les algues poussent toutes seules. Donc, elles contribuent par leur atout de puit à carbone à un élément naturel très important pour la biodiversité.
Ensuite, c’est une biomasse qui ne pollue pas.
Autre apport : en favorisant le développement de la culture des algues, on contribue à l’émergence d’une filière aujourd’hui en Bretagne qui était historiquement très développée. Utilisée comme engrais dans l’agriculture, cette production a disparu avec l’arrivée des potasses d’Alsace, les engrais chimiques.

 

Jusqu’où pourrait aller la substitution des produits pétrosourcés par des produits biosourcés ?

Tous les secteurs d’activité et tous les usages des plastiques sont concernés : automobile (tableaux de bord,…), jouets, packaging alimentaire ou cosmétique … Ce matériau répond à toutes les caractéristiques techniques requises pour chacun de ces usages.

Y a t’il des obstacles dans la diffusion de ce matériau novateur ?

Le temps est le principal obstacle. Par exemple : pour développer et mettre sur le marché un bouchon cosmétique, il faut fabriquer un moule et que cette pièce soit compatible avec des processus industriels haute cadence de mise sur les bouteilles.
Y a t’il un bénéfice pour d’autres organismes marins que les algues ?
Oui, pour les poissons. L’algue consomme du CO2 pour sa croissance. Elle le transforme en sucre et elle libère de l’oxygène, en particulier « les laminaires ». Plus on apporte de l’oxygène dans l’eau plus on assure le développement du plancton, maillon de la chaîne alimentaire, et plus on favorise la croissance du poisson. Pour le représenter, nous avons une ferme expérimentale dans la Rance et tous les pêcheurs se regroupent autour des algues qui poussent car il y a une multitude de poissons.

Est-ce que l’on peut faire exister la notion de biodiversité dans le commerce ?

Votre génération est plus sensible que la nôtre à toutes ces questions de biodiversité et d’environnement donc on voit une certaine évolution positive, une prise de conscience.
Nous avons une certaine responsabilité pour les générations qui viennent de leur laisser une solution alternative aux plastiques. On est pas là que pour faire de l’argent, on est aussi là pour transmettre et laisser quelque chose.

Les gens sont-ils sensibles à cette démarche ?

Il y a eu trois types de comportements. La première : les gens n’y ont pas cru. La perception a franchi une deuxième étape : c’est possible mais va t’il y arriver ? Et aujourd’hui l’adhésion est totale sur tous les plans.

 

 

 

 




Portrait de femme n°3. Anne-Laure Nicolas, Domaine du Bois du Barde à Mellionnec (22)

Rencontre avec Anne-Laure Nicolas, co-fondatrice et coordinatrice du Domaine du Bois du Barde à Mellionnec (22), un Pôle Territorial de Coopération Economique (PTCE) sur lequel on trouve une ferme, un camping, et deux associations. Un éco-domaine dédié à la transition, qui prend tout son sens dans le parcours de vie d’Anne-Laure.

Mellionnec. Situé en plein cœur du Pays Pourlet, entre Rostrenen et Guémené-Sur-Scorff, le petit bourg de 430 habitants du Kreiz Breizh est connu pour son dynamisme. Notamment grâce à Ty Films, association qui travaille autour du film documentaires et qui organise des rencontres annuelles sur ce thème, à la librairie-café « Le Temps qu’il Fait », mais aussi grâce au Domaine du Bois du Barde. C’est dans cet éco-domaine que nous retrouvons Anne-Laure Nicolas, co-fondatrice et coordinatrice du domaine. Un lieu qu’elle a « imaginé depuis très longtemps, depuis toute jeune ». Une aventure qui a démarré en 2006, en construisant la maison familiale. Petit à petit, l’endroit est devenu un « lieu économique, de transmission et de partage, à partir de 2011 », explique Anne-Laure. Aujourd’hui, le Domaine du Bois du Barde est devenu un Pôle Territorial de Coopération Economique (PTCE). Un statut qui fait partie du champ de l’Economie Sociale et Solidaire, mais bien connu que les Scop ou les Scic. « Il y a cinq PTCE en France basés sur des fermes comme ici », précise Anne-Laure. Au Bois du Barde, on trouve ainsi plusieurs structures : la ferme sur 24 hectares, où sont récoltés des pommes à cidre et de la sève de bouleau ; le camping avec ses hébergement insolites qui bénéficie de l’Ecolabel Européen ; l’association Koed Barz qui s’occupe de la partie pédagogique et des événements culturels du lieu ; et une autre association, Breizh Cooperation, qui transmet la manière de travailler au Bois du Barde pendant des stages, des week-ends…

« Je ne vais pas parler de « mission de vie », mais c’est quelque chose qui est ancré en moi depuis toujours »

Un riche projet qui fait sens dans le parcours d’Anne-Laure. « Je ne vais pas parler de « mission de vie », mais c’est quelque chose qui est ancré en moi depuis toujours», confie-t-elle. Issue du milieu rural, titulaire d’un bac agricole, son premier travail a été dans l’animation, avec le poney comme outil pédagogique, auprès des enfants, des adultes et des personnes en situation de handicap. Bretonne d’adoption, elle est tombée amoureuse de la région et a choisi de déménager ici à 24 ans. « Dès mon arrivée, je voulais créer un lieu comme le Bois du Barde, je ne me voyais pas faire ça ailleurs », évoque Anne-Laure. « Le projet a pris une tournure précise grâce aux personnes rencontrées, qui m’ont enrichie. Au fur et à mesure, il est devenu de plus en plus écologique, avec notamment la maison en paille ou encore les bassins en phytoépuration. Les gens que j’ai rencontrés ont enrichi ce projet à leur manière. Et je pense que je ne serais pas ce que je suis aujourd’hui, et le Bois du Barde ne serait pas ce qu’il est, sans ces personnes, qui parfois n’ont fait que passer ».

Mais tout n’a pas été un long fleuve tranquille. Au tout début de son aventure bretonne, lorsqu’elle a voulu s’installer, on la dissuade « On m’a dit : tu as 24 ans, va te marier, fais tes gosses et on reparlera plus tard ». De même, en 2001, les projets de diversification agricole « étaient impossibles » se souvient-elle. « Ca n’a pas été facile pour moi d’accepter ça, parce que je suis arrivée pleine d’idéaux, avec toute mon énergie ». Changement de décor alors pour Anne-Laure qui quitte le Trégor pour Rennes. Elle y rencontre le milieu bretonnant : musiciens, organisateurs de Fest Noz, démarrage du festival Yaouank… En parallèle, elle est formatrice Bafa-Bfd en bénévole. Elle se lance dans un Brevet d’État d’Animateur Professionnel (Bejeps aujourd’hui), pour se professionnaliser. Au même moment, Anne-Laure rencontre le père de ses enfants, qui lui lance « Viens passer un hiver en Kreiz Breizh et après on verra ». Un test réussi. « J’ai beaucoup aimé, le Centre-Bretagne m’a reconnecté à la nature ». Elle devient alors directrice d’un centre de loisirs dans le Morbihan, du côté du Pays du Roi Morvan. Elle commence à construire son projet de famille, et emménage dans une longère sur la ferme de ses beaux-parents. Un enfant, puis deux, puis trois naissent. Le projet de création du Bois du Barde est alors relancé, Anne-Laure ayant toujours « l’idée en tête ». Gilles, le père de ses enfants, poursuit son activité de technicien du spectacle, sur des festoù-noz ou des grands festivals. Il se lance aussi dans une formation pour être meneur de tourisme équestre, voulant changer d’activité par la suite. Mais tout ne se passe malheureusement pas comme prévu. « Il y a des choses qui arrivent, ce n’est pas pour rien, même si c’est dur à vivre », lâche Anne-Laure. Gilles fait une rupture d’anévrisme, alors qu’il allait s’installer et acheter les vergers. « J’étais enceinte de notre dernière », explique Anne-Laure. « Sur le coup, c’est dur à vivre. Là ça fait 10 ans, on est ressorti grandis. Il a un handicap cognitif à 80 %. Mais grâce à lui, je grandis aussi. L’accompagner dans son handicap, ce n’est pas facile, au quotidien, ce sont des épreuves, des remises en question. Malgré tout le Bois du Barde c’est aussi lui, car il l’a façonné avec moi. Il a sa place ici, c’est important ». Dans l’adversité, Anne-Laure peut s’appuyer sur des personnes ressources qui l’entourent, qui font partie du projet. Elle a « aussi appris à demander de l’aide, ce qui n’est pas facile ».

« Déjà, pour moi, tout est lié. Ce n’est pas un travail. Tous les jours, quand je me lève, ce que je fais, je sais que ça a du sens pour moi »

Comment fait-elle pour arriver à tout concilier ? « Déjà, pour moi, tout est lié. Ce n’est pas un travail. Tous les jours, quand je me lève, ce que je fais, je sais que ça a du sens pour moi », analyse Anne-Laure. Mais attention à la contrepartie. « J’ai fait une grosse fatigue cérébrale », confie-t-elle. Entre la gestion du quotidien avec des enfants « zèbres » et le handicap de Gilles qui au début ne pouvait pas conduire, la charge mentale a été lourde. « Ça a été très dur à vivre, mais aujourd’hui avec le recul, je me dis que si je n’avais pas eu ça, je ne serais pas qui je suis aujourd’hui. Les épreuves, elles te façonnent ». Des épreuves qui ont influé sur le Bois du Barde, mais en bien. « Ca a permis de poser le cadre qui est celui d’aujourd’hui, que ce soit au niveau de la coopération économique ou de l’habitat participatif. On utilise la sociocratie notamment ». Un mode de gouvernance partagée, une sorte de démocratie qui ne fonctionne pas en système pyramidal avec un chef unique, mais avec une place pour chacun. « On fonctionne en cercle », déclare Anne-Laure. «Il y a un cercle stratégique qui va réunir un représentant de chaque cercle opérationnel. Il y a aussi des « référents intellectuels », des « sages », qui sont au-dessus de moi et qui apportent leur regard, par exemple si quelqu’un veut entrer dans la coopération économique ou l’habitat participatif ». La sociocratie, ce sont aussi des protocoles de réunion spécifiques : pas de table, en cercle, avec un facilitateur/animateur, où chacun peut faire des propositions (information, réaction, avec besoin de prise de décision derrière). « L’avantage, ce sont que les introvertis peuvent aussi avoir toute leur place ». Autre principe de la sociocratie : les élections sans candidats. « On fait un profil de poste comme si on cherchait un employé, avec des compétences et des qualités. Ensuite, on cherche dans le groupe qui est capable de faire ça ».

« Les femmes ont une place à prendre, les hommes doivent leur laisser la place et être attentifs à elles »

Un fonctionnement qui sied bien au Bois du Barde, qui est un lieu dédié à la transition écologique. Pour la fondatrice, la transition écologique est « un mot récent, qu’on emploie davantage depuis la démission de Nicolas Hulot sur France Inter. Je pense qu’il y a eu un déclic à ce moment-là de la part du grand public, qui a commencé à se poser des questions ». Pour elle, la permaculture est une belle grille de lecture pour la transition. « Rob Hopkins en parle très bien, Damien Carême à Grande-Synthe aussi ». Revenir au local , développer l’habitat écologique, les énergies vertes, l’autonomie… sont autant de thématiques qui intéressent Anne-Laure. Elle donne d’ailleurs des « causeries » et conférences sur la permaculture, ou encore sur la place du féminin dans la transition. « Aujourd’hui, le constat que j’ai fait avec d’autres femmes, c’est que les « têtes de gondole » sont des mecs. Même dans le milieu alternatif, on doit travailler sur notre égo, sur notre légitimité et notre envie de dire les choses. Peut-être que les mecs devraient laisser la place aux femmes aussi », exhorte Anne-Laure, qui pense aussi que « Les femmes ont une place à prendre, les hommes doivent leur laisser la place et être attentifs à elles ». Si elle ne remet pas en question l’engagement d’hommes tels que Cyril Dion ou Maxime De Rostolan, Nicolas Voisin, ainsi que leur mouvement, elle s’interroge « Où sont les nanas ? ». « Je pense qu’on a un gros problème de sentiment d’illégitimité ». Face à une planète en danger, Anne-Laure constate cependant que les femmes n’ont plus « peur d’y aller ». « En tant que femme, on a la capacité de donner la vie, qu’on décide de le faire ou pas. Et là, l’humanité est en péril. C’est pas la planète qu’on doit sauver là, c’est nous. C’est pour ça que les femmes sortent de l’ombre. C’est long, ça prend du temps, on a besoin de travailler sur nous. Mais on y va parce qu’on doit le faire », déclare-t-elle.

Pour Anne-Laure, l’important est de trouver l’équilibre masculin-féminin qui est en chacun, afin de « mieux aller vers l’autre ». « Pour moi, aujourd’hui, la transition passe par là. » Le défi du 21ème siècle selon elle ? « L’humain face à lui-même ».

Ecoutez l’entretien avec Anne-Laure :