Les infirmières de la clinique de l’énergie

Les infirmières de la clinique de l’énergie
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L’Etat du Kerala, dans le Sud-Ouest de l’Inde promeut depuis le début des années 2000 une politique énergétique relativement ambitieuse, fondée sur le développement des diverses sources d’énergie renouvelable disponible. Dans ce cadre, un programme d’économie d’énergie original appelé « les cliniques de l’énergie » a été proposé en 2013 par le Centre de Gestion de l’Energie, agence giuvernementale du Kérala, convaincu du mérite de l’approche communautaire, via la société civile . L’organisation féministe All India Women’s Conference (AIWC) se vit confié le programme de formation, qu’elle met, depuis, en œuvre.

Le principe de ce programme est simple : la plupart des mesures d’atténuation des effets du changement climatique doivent commencer avec les femmes car elles sont les décideurs au niveau domestique, et par conséquent, les femmes doivent être les principales parties prenantes dans la mise en oeuvre des politiques.

Trois de ces « ambassadrices de l’énergie avec des responsables d’AIWC : à droite Madame Usha Naïr, vice-présidente d’AIWC, responsable pour le Kerala et à gauche madame Jalaja Kumari coordinatrice du programme, filiale AIWC de Thiruvananthapuram (en abrégé Trivandrum) crédit photo : Dominique Guizien

 

Ce programme s’appuie sur l’organisation territoriale de l’Etat de Kerala en 14 districts. Dans chaque district 130 femmes sont formées pour animer ce programme et à cet effet se voit confier une zone d’environ mille habitations. Ainsi, l’ensemble du territoire est théoriquement totalement couvert.

Le rôle de ces femmes est de visiter chaque maison et de rencontrer les mères de famille pour examiner avec elles l’usage qu’elles font des différentes énergies dont elles disposent. La consommation énergétique (y compris l’efficience énergétique et les déperditions d’énergie) n’est en fait qu’un prétexte pour revisiter leurs pratiques quotidiennes. Ainsi parler du gaz de cuisine, c’est aussi poser la question de ce qu’on cuisine et quand on le cuisine mais aussi donner des conseils de nutrition et de santé. C’est aussi parler d’une éventuelle conversion vers le gaz d’origine organique, par exemple le biogaz. C’est aussi l’occasion d’informer sur les sources alternatives d’énergie comme l’énergie solaire.

Sur la base de ce principe simple, ce programme lancé en 2013 et opérationnel depuis 2016 donne déjà de bons résultats puisque sur les premiers foyers visités, on constate déjà des économies d’énergie de 25 à 35%.

Le succès de ce programme tient essentiellement à ce que le transfert d’information se fait de femmes à femmes, les maris ou les fils étant totalement absents du processus et souvent n’en connaissent l’existence qu’au bout de quelques mois lorsque, les premiers résultats se faisant sentir, ils peuvent en apprécier toute l’utilité. Malgré ce contact plus facile entre femmes, les « nurses » des cliniques de l’énergie doivent encore vaincre les réticences de ces mères de famille et en général 3 ou 4 visites sont nécessaires pour que les choses se mettent en place.

Outre ces visites à domicile, les nurses des cliniques de l’énergie organisent également des réunions collectives de prise de conscience des enjeux énergétiques par bloc d’habitation. Cette fonction d’ambassadrice de l’énergie confère à ces femmes une place reconnue dans la communauté et contribue ainsi à leur donner une meilleure estime de soi. Pour certaines, c’est même l’occasion d’entamer ou de reprendre un parcours universitaire ou de qualification professionnelle. A cet égard, il convient de signaler que le Kérala est un Etat où plus de 90% des filles suivent une scolarité secondaire, le meilleur taux de toute l’Inde.

Cette valorisation sociale de leur rôle atténue-t-elle pour autant le manque de lucrativité de l’activité ? En effet, ces volontaires sont payées pour faire ce travail, mais leur rémunération reste symbolique puisque elles ne touchent que 20 roupie par visite (environ 25 centimes d’Euros) et encore là-dessus ces filles doivent payer l’impression des questionnaires qu’elles utilisent et l’envoi des comptes-rendus de visites qu’elles sont tenues de faire pour être payées. A ce stade il s’agit donc encore largement de bénévolat.

 

Pour en savoir plus sur AIWC :

http://aiwc.org.in/about_us.html

et sur les politiques de l’Etat du Kérala :

la politique de l’énergie (2001)
https://kerala.gov.in/documents/10180/46696/Energy%20Policy%202001

la politique d’égalité des genres et d’autonomisation des femmes (2009)
https://kerala.gov.in/documents/10180/46696/Gender%20Equality%20and%20Womens%20Employment%20Policy

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Dominique Guizien