Le Bois du Barde en Confinement – Avril 2020
Si je reprends certains mots du collectif, c’est « ah bon il y a un confinement » ! Certes, cela peut être un peu exagéré mais résume bien, notre façon de vivre.
Le collectif est constitué de 5 adultes et 3 enfants, nous vivions déjà ensemble avant le confinement, 2 adultes ont intégré le collectif cet hiver, en colloc dans la maison collective avec Gilles. Guillaume vit dans sa caravane sur le site et moi dans mon mobil home avec mes 3 loulous.
Pour ma part avec mes enfants, 10, 12 et 15 ans…ouch pas simple avec pré ados/ados. Malgré nos habitudes de vie, la situation les stress de manière inconsciente, plus de nervosité dû aux changements. Heureusement, nous avons des habitudes d’organisation de notre quotidien, tableau des tâches, qui fait quoi ? Chacun s’inscrit à tour de rôle, on s’entraide. De la même façon je partage avec eux les émotions qui me traversent et les invite à faire de même. On cherche des nouvelles recettes, on s’essaie, on expérimente et au final la vie continue. J’ai vite lâché prise avec les histoires de devoirs à distances, il faisait beau, j’avais besoin comme les enfants de pouvoir profiter de l’extérieur sortant de 6 mois de pluie pratiquement non stop !
Les activités économiques du lieu ont été suspendu progressivement, la vente de sève de bouleau fraîche est passée de 600litres par semaine à 100litres puis ce fut la fin de la récolte. Ce n’est pas grave on a stocké la sève non vendue, on s’adapte, on essaie la lacto-fermentation, et l’autre partie a été pasteurisée.
Concernant l’accueil, après beaucoup de peur lors de nos moments d’incertitudes, nous avons fait le choix d’ouvrir le lieu dès que les décisions gouvernementales nous le permettrons. En attendant, nous mettons en place les mesures que nous avons décidées pour permettre un accueil dans les meilleurs conditions possibles.
Nous avons fait le choix de prendre le risque d’ouvrir au public car nous trouvons important que des petits lieux comme le nôtre, où le risque est minoré, puissent accueillir et continuer d’échanger et de partager.
Comme beaucoup, on accentue donc notre résilience alimentaire, le potager grâce à l’arrivée du soleil, a été mis en route, encore plus vite que d’habitude. On s’essaie encore plus à s’amuser, pour tester des astuces ou mettre en beauté cet espace si essentiel dans notre autonomie.
Nous mesurons la chance de nos choix de vie, effectués pour certains depuis des années, une vie simple, une sobriété qui nous est si chère. Notre cadre, aujourd’hui est de 24 hectares. Être en collectif est précieux car nous pouvons continuer à avoir des échanges avec d’autres Humains, et nous restons des Êtres grégaires. Je n’imagine même pas ce que peut être de vivre sans relations sociales, ou promiscuité, sans câlins.
Même nous, qui sommes, déjà à l’écoute de nos émotions, de nos réactions, avons eu/avons des moments d’angoisses, incertitudes, stress, de peur. Du coup hop, pour ma part, je pars marcher dans les nombreux chemins creux du Centre Bretagne, méditation pour l’autre, soin lahochi…le lâcher prise est encore plus que nécessaire. Je ne pensais pas que cela puisse arriver comme ça,. Pourtant il y a encore quelques mois aux dernières rencontres nationales des oasis, on commençait déjà à en parler…
Pour notre approvisionnement, nous allons dans nos 2 épiceries bio celle du village et celle du bourg d’à côté, et nous venions de nous faire livrer, comme d’habitude, notre commande de non périssable avec un grossiste bio breton. Pour le reste, on fait beaucoup nous même : pains, viandes, conserves.
Je me rends compte des produits les plus utilisés que nous ne faisons pas, le beurre, le lait, la farine. Heureusement, nous avons la chance d’avoir plusieurs paysans bio autour de nous, 4 paysans meuniers, et plus de 5 éleveurs de pie noire bretonne ou de froment du léon, quelle luxe !
Nous discutons beaucoup, sur la place de l’Humain, sur les prises de conscience individuelle et du cheminement personnel autour de l’écologie intérieur. Je constate que les prises de consciences et les actions ne mèneront à pas grands choses si chacun ne travaille pas sur son cheminement intérieur en permaculture humaine puis sociale.
Notre mode de gouvernance partagée « la sociocratie » nous permet de gérer les tensions, et de communiquer au mieux pour que chacun continue de se sentir à sa place. Une sorte de danse se met en route, où chacun naturellement fait ce pourquoi il a choisit d’être sur le lieu : Le thérapeute jardinier, l’ingénieux bricoleur, la conceptrice résiliente, le penseur-menuisier et le paysan-pragmatique, nous formons une sacrée équipe. Parfois nous avons cette chance de ne pas avoir besoin de mots, tout est si simple.
Une question me vient à l’esprit « dans un collectif doit dont forcément avoir une affinité pour avoir une fluidité dans l’action et la vie de tous les jours ? » Chacun a sa réponse suivant ses besoins et son expérience !!
Naturellement, au bois du barde, on vit comme dans les brumes d’Avalon, l’île mythique de la légende Arthurienne, nous ne sommes pas en Bretagne pour rien. Le temps se dilate, la zone blanche y est pour beaucoup, on prend le temps de vivre tout en faisant ce que l’on doit faire. Il y a un équilibre entre prendre soin de nous et nos tâches. Avec le confinement, l’écart de temporalité est accentué, 2 jours deviennent une semaine, le temps tourne autour de toi,que toi seul devient ta priorité, ton essentiel, ce temps permet de retrouver son intériorité, sa place dans le TOUT, pour mieux être avec l’Autre, les Autres.
Et puis voilà le temps nous est donné, de faire enfin toutes les choses que nous avions laissé de côté, depuis toutes ces années, car au final le confinement met en lumière la notion de temps, de notre relation au temps.