Le feuilleton de l’été « les mots valises » : la transition (chapitre 2, épisode 3)
Il y a comme cela des mots ou des expressions qui apparaissent, deviennent à la mode et ont un tel succès que, finalement, tout le monde se les approprie. Évidemment, comme il s’agit d’expressions nouvelles, leur signification reste un peu floue et chacun y met ce qu’il veut, un peu comme dans une valise.
Cet été nous nous intéresserons à quatre expressions qui sont dans le ton de ce site : développement durable, transitions (qui peut être énergétique ou écologique, voire les deux à la fois), innovation ( qui peut-être sociale, technologique, commerciale) et démocratie participative (forcément participative, aurait dit Marguerite Duras).
Épisode 3 : Transitions radicalement progressives
L’épisode précédent se terminait sur « trajectoire de transition » . En effet, il s’agit bien de cela, d’une trajectoire ou plutôt d’un trajet, le plus souvent personnel, parfois collectif (« seul on va plus vite, ensemble on va plus loin » dit la sagesse populaire africaine). C’est un mouvement continu, progressif mais résolu qui peut partir de n’importe où mais toujours d’un point qui touche particulièrement chaque individu. Cela peut être sa santé, son porte-monnaie, son boulot, ses relations de voisinage, le spectacle du monde. Peu importe. Le principal, c’est d’abord de se sentir concerné. Évidemment si on en reste là, les choses n’avanceront guère : on sera au mieux dans la protestation contre le système qui produit tout cela, au pire dans la désespérance résignée face au même système, en attendant on ne sait quel bouleversement qui renverserait ce système pour le remplacer par … on ne sait trop quoi. Et puis il y a l’attitude plus réactive qui est de dire : « au moins sur ce point-là, je peux faire quelque chose, changer mes habitudes ! » et en général on le fait parce que c’est ce point-là justement qui a permis une première prise de conscience parce que sur cette question, on se sentait concerné.
Et puis de fil en aiguille, à condition de s’en donner la peine et de faire preuve de curiosité, on se rend compte qu’il y a d’autres phénomènes néfastes liés à ceux-là et que l’ensemble fait partie d’un système et que lorsque on touche à un élément, c’est l’ensemble de l’écheveau qu’il faut dévider car rien n’est totalement indépendant et qu’il existe des chaînes de causalité : énergie-transport-mobilité-aménagement de l’espace, santé-alimentation-mode de consommation-mode de production par exemple et la liste est longue. Et plus on creuse, plus on va vers les racines. C’est pourquoi je parle de transition radicale, c’est à dire celle qui va jusqu’aux racines de chaque problème. Changer ses comportements, c’est bien mais ne pas faire couler l’eau en se brossant les dents ou faire pipi sous la douche pour économiser l’eau des toilettes, cela reste des comportements déculpabilisants voire un peu ludiques si parallèlement on ne se pose pas la question de la vie de l’eau : l’eau qu’on capte et détourne pour produire des plantes gourmandes, l’eau qu’on salit en empoisonnant la terre, l’eau qu’on rejette sans forcément la nettoyer. Ceci n’est évidemment qu’un exemple parmi tant d’autres. Mais si on décidait d’aborder toutes ces questions simultanément, ce serait un tel bouleversement de nos modes de vie que nous n’y résisterions pas. C’est pourquoi la transition écologique doit être progressive mais elle ne progressera que si elle vise à toucher aux racines des maux dont souffre notre planète. Radicale et progressive vous dis-je. Comme le chemin est long, mieux vaut le commencer le plus vite possible, chacun à sa façon, les solutions existent à portée de nos mains. C’est d’ailleurs ce qu’on voit tous les jours sur le site d’éco-bretons https://www.eco-bretons.info/.
Dominique Guizien