Quel est le bilan du tri et du recyclage en Bretagne ?
Catherine Le Pober: il est très bon. La Bretagne est la première région en France en matière de tri : 66 kilos des déchets par an et par habitant sont triés alors que la moyenne nationale est de 46 kilos par an et par habitant.
Comment cela s’explique-t-il ?
La sensibilité à l’environnement est tout d’abord une valeur historique et ancestrale de la Bretagne. Autre chose, la région a connu plusieurs chocs comme les marées noires de l’Amoco Cadiz, l’Erika. Aujourd’hui, les Bretons sont encore plus sensibles à la protection de la nature. Et de leur côté, beaucoup d’élus n’hésitent pas à s’investir. Enfin, un autre atout : les collectivités locales sont de taille et d’échelle assez grandes, les collectivités bretonnes se sont fédérées. De telles performances en matière de tri ne pourraient pas se faire avec de petites collectivités isolées.
Ces données sont encourageantes. Mais y-a-t-il une étape, lors du tri et du recyclage où en Bretagne, les citoyens ont plus de difficultés à se mobiliser ?
Le tri a progressé de 3% en 2012 dans notre région. Si les performances de notre région sont globalement très bonnes, le verre reste encore trop souvent dans les poubelles. Or, il faut savoir qu’un verre mal trié, c’est 170 euros la tonne, contre 53 euros pour un verre bien trié. Pour encourager les citoyens à trier davantage le verre, Brest Métropole Océane a par exemple densifié ses conteneurs en verre : il y en aujourd’hui plus de 1000 répartis sur toute l’agglomération.
Si aujourd’hui, 67% des emballages sont recyclés à l’échelle nationale, l’objectif est d’atteindre les 75%. A quels enjeux êtes-vous confrontés pour parvenir à ces chiffres ?
Nous sommes pour l’emballage le plus juste et le plus recyclé possible, sachant que les industriels ont des contraintes comme l’hygiène, la fabrication de l’emballage, les dates de péremption…. De ce fait, nous réfléchissons ensemble aux bonnes pratiques à mettre en place. Un emballage éco-conçu ne pose pas de problème de tri ni de recyclage. En somme, plus l’emballage est en « mono-matériaux » mieux c’est. Pour favoriser cela, nous avons mis en place un barème à destination de nos partenaires industriels : leur cotisation à éco-emballage est effectuée à l’unité. Par exemple, lorsqu’un industriel vend du chocolat, il devra payer une taxe pour chaque composant de son emballage. Cela afin de l’inciter à réduire le surplus d’emballage de son produit. Pour les récompenser, à chaque emballage réduit, un bonus est gagné : il paiera moins cher sa prochaine cotisation à éco-emballage. Enfin, nous avons mis en place "l’info tri vert". C’est une note d’information imprimée sur l’emballage qui informe le consommateur de comment le trier.
En quoi un logo et une note d’information suffisent-t-il à faire pencher la balance lors de l’achat d’un produit par un consommateur en magasin ?
Il y a eu un grand tournant dans le recyclage : il y a cinq ans, les marketeurs avaient un poids énorme dans la mise en place des emballages. Aujourd’hui, le consommateur est sensibilisé à cette question et il est plus enclin à acheter un produit avec un emballage recyclé. C’est l’image de ce type d’emballage qui a changé auprès du consommateur. Et les industriels y trouvent leur compte car le recyclage leur apporte des intérêts économiques : si on peut réinsérer dans la boucle un emballage recyclé, c’est l’idéal. Pour l’environnement, on réduit la consommation d’eau, d’électricité, de matière première. Enfin, d’un point de vue social, le tri génère de l’emploi : 28 000 emplois directs, et 120 000 indirects en France.
Que reste-t-il des 33 % d’emballages non-recyclés restants ?
Ils sont enfouis ou incinérés. Une bouteille en plastique sur deux n’est pas recyclée aujourd’hui. 600 000 tonnes de plastique ne sont pas dans les consignes de tri. Sur 1 million de tonnes de plastique, on recycle 500 000 tonnes de bouteilles et flacons PET et PEHD. D’autres plastiques ne sont pas recyclés car ils sont constitués de composants différents : PP, PS, PSE… qui sont très difficiles à trier. Mais nous sommes en ce moment en phase d’expérimentation à laquelle participent 11 collectivités en Bretagne. Les habitants qui participent à ce test sont invités à réunir tous leurs emballages en plastique dans un même sac. Le but est de voir si le recyclage est possible et quelle problématique cela pose. En début 2014, nous rédigerons une feuille de route que nous soumettrons au ministère de l’écologie.