« Il faut un changement individuel pour que le changement global se fasse »

« Il faut un changement individuel pour que le changement global se fasse »
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Nous sommes actuellement dans une société anthropocentrée, c’est-à-dire très centrée sur l’homme…

 

Marie Romanens : Oui, la prédominance de la société actuelle moderne, qui est basée sur l’économique, forcément c’est l’antropocentrisme. Ce qui compte, c’est « l’homo economicus », c’est-à-dire la production et la consommation, le tout dans l’intérêt de la personne, de ses besoins matériels essentiellement, ou de ses besoins de pouvoir, besoin de se réaliser dans sa vie mais uniquement soi et avec soi.

 

 

On sent justement qu’il faut qu’on change de modèle. Comment peut-on définir ce mouvement, qu’on appelle « transition » ?

 

 

Patrick Guérin : Je crois que ce sont des recherches. Par exemple les « villes en transition » sont parties de l’idée que dans 20 ans il n’y aura plus de pétrole et que donc il faut qu’on s’y prépare. Les habitats collectifs sont également des recherches dans lesquelles les citoyens se demandent comment vivre autrement avec moins d’empreintes carbone, avec moins de poids sur la Terre… ce sont des recherches. A mon avis, actuellement, il n’y a pas de transitions qui soient claires. Chacun essaie de « transitionner », « transiter », à sa manière.

 

Marie Romanens:  Quand nous voyons les limites de cette orientation anthropocentrée où les liens ne sont pas assez pris en compte (liens avec soi-même à l’intérieur de soi-même, liens avec les autres dans le sociétal, liens avec la nature qui amènent à la crise écologique actuelle), c’est vraiment tout un changement de paradigme qui est à faire, qui fait revoir tous nos fondements et nos pré-supposés.

 

Comment peut-on changer de paradigme ?

 

Patrick Guérin : Le paradigme va s’inventer de lui-même, et actuellement il n’est pas encore mûr, sinon nous aurions déjà fait le changement. Pour le moment il n’est pas très conscient. Je pense que le nouveau paradigme sera basé sur l’interdépendance entre les êtres vivants. Concrètement, qu’est ce que l’interdépendance ? Comment cela se vit ? Il ya tout un apprentissage à faire. Ce paradigme ne pourra se développer que lorsque nous aurons réalisé cet apprentissage.

 

Marie Romanens : Si nous avions la recette, tout le monde le saurait. Par contre, nous savons par quelles phases la transition se fait. Il y a des auteurs, comme William Bridges, qui ont décrit cela. Nous passons par différentes phases, qui sont des phases émotionnelles, qui ne sont pas faciles à vivre et demandent du temps. Cela nécessite tout un changement à l’intérieur de chacun, pour que finalement le changement global se fasse. Nous passons par des périodes de résistance, de déni… nous ne pouvons pas entendre ça. Petit à petit nous commençons à comprendre, mais avec des pertes de repères, il y a du désarroi, on peut être en détresse, pessimiste,en déprime, passer par toute une phase d’errance. C’est un phase très importante car inconfortable mais indispensable  et que nouq aimerions éviter, que l’émergence du nouveau va pouvoir commencer à se faire. Petit à petit quelque chose d’autre va apparaître, et qui est de l’ordre du « lien ».

 

Vous avez dit lors de votre conférence qu’il fallait développer des informations « positives » et montrer des exemples concrets pour donner envie de faire cette transition…

 

Marie Romanens : Oui, cela donne des repères. Car dans cette phase d’errance où les anciens repères ne tiennent plus, nous pouvons essayer de s’y raccrocher, mais ce n’est pas la solution. De nouveaux repères émergent, et il est très important de diffuser l’information sur ce qui se fait de nouveau.

 

En savoir plus :

Marie Romanens et Patrick Guérin ont publié ensemble « Pour une écologie intérieure, renouer avec le sauvage », aux éditions Payot. http://www.marieromanens.com/

Le site d’information http://www.nature-humaine.fr/ explore les dynamiques humaines sociologiques, psychologiques et culturelles à l’origine de la crise écologique et humaine actuelle, permettant une meilleure compréhension et un meilleur accompagnement des freins et leviers qui permettent ou empêchent le changement de nos comportements et le passage à l’action.  Téléchargement gratuit de sa Lettre d’information.

 

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Marie-Emmanuelle Grignon