Cette ferme, c’est tout un cirque !
« Ce qui réunit tout le monde ici, c’est la volonté commune de faire du spectacle », affirme Glenn, musicien de la compagnie Panik !. « Ici », c’est dans la ferme de Jean-Paul et Céline, à Sarzeau, dans le Morbihan. On y cultive les arts du cirque. Amendées par l’entraide, arrosées de bonne humeur, leurs terres ont vu germer un cabaret : le Hangar Saboté. Ce soir encore, touristes et locaux sont venus en nombre pour assister au spectacle de la Panik !, mais aussi profiter du lieu. Les derniers arrivés rejoignent la file d’attente de la billeterie-caravane, à quelques mètres de l’entrée du grand chapiteau. D’autres sont attablés depuis un moment, devant le bus-restaurant. Au centre du lieu se dresse une cabane ouverte, au toit ondulé, dans laquelle une moitié de 4L bleue est encastrée. C’est la buvette ! Derrière le comptoir, Marc est au service. « Je suis un très bon ami de la troupe, je file un coup de main selon ce qu’il y a à faire », explique-t-il. Présent sur le lieu pour toute la saison, Marc y travaille bénévolement, comme tout le personnel du cabaret. « Eté comme hiver, il y a vraiment plein de gens qui gravitent ici », se réjouit Latifeh, voltigeuse de la troupe.
La sciure remplace la dalle de béton
Sa rencontre avec Laura et Marine, à l’école de cirque équestre « Le moulin de Pierre », marque le début de l’épopée. En 2012, sorties de l’école, entourées de leurs deux chevaux et animées par l’envie de faire du spectacle, les filles décident de s’installer à Questembert, en Bretagne. « Marine est bretonne, elle avait des contacts dans le coin et savait qu’on pouvait y passer l’été avec nos chevaux et faire un petit spectacle », explique Latifeh. Séduits par la représentation, Jean-Paul et Céline proposent à la jeune troupe de se produire dans leur ferme, mettant à disposition un hangar à vaches inutilisé. « Sans la ferme, on n’en serait pas là, assure la voltigeuse. Ce qui est difficile avec les chevaux, ce sont les intempéries : quand il pleut ou qu’il fait froid, on ne peut pas répéter à l’extérieur », précise-t-elle.
Commence un chantier de rénovation de 4 mois : le hangar doit être aménagé pour l’accueil du public. Des amis et amis d’amis se joignent au projet et tout le monde met la main à la pâte. La dalle de béton est cassée et remplacée par de la sciure. Objets et matériaux sont récupérés pour décorer et meubler. Le Hangar Saboté est né. Pour financer le matériel et les travaux, la compagnie y organise ses premiers apéros-cirque en hiver. « Ce sont des scènes ouvertes où des copains, d’autres compagnies et nous-mêmes présentons des étapes de travail », explique Latifeh. Le public adhère à l’association puis vient, à prix libre, assister aux soirées. « On n’était pas encore très bien installés, il y avait des coupures de courant, mais les gens sont venus, fidèles au rendez-vous », ajoute la voltigeuse.
« On a l’âme voyageuse »
Un spectacle se dessine. La troupe, agrandie par Glenn, ainsi que Yann, acrobate à mobylette, décide de créer un cabaret pour l’été. Durant juillet et août, elle se produit deux fois par semaine et y invite une autre troupe chaque mercredi. « C’est la troisième année qu’on organise le cabaret », se félicite Glenn, en précisant que des apéros-cirque ont lieu régulièrement, le reste de l’année. Le projet à continué à évoluer au fil des rencontres, et aussi des contraintes. La troupe a ouvert un peu plus l’endroit en créant la ferme pédagogique. Les comédiens ont aménagé le lieu avec des habitats légers, des toilettes sèches et un potager bio. « Le lieu s’est construit autour d’un mode de vie dans lequel nous nous accordons tous, affirme Latifeh. On propose des menus végétariens à partir de produits locaux et la buvette est approvisionné par une brasserie et une cidrerie locales », ajoute-t-elle. L’acquisition d’un chapiteau, cette année, permet à la Panik! de se déplacer un peu. « Comme toute troupe de cirque, on a l’âme voyageuse, on veut jouer partout et pas seulement sur le territoire breton », confie Glenn. Mais pas question de déraciner le Hangar Saboté de ce haut lieu de fertilité artistique : « L’idée serait de partir en tournée à un moment donné, tout en continuant à faire vivre cet endroit », ajoute Latifeh.