L’avenir de la bio, entre dérégulations et promesses

L’avenir de la bio, entre dérégulations et promesses
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   Depuis ce mercredi 1er Avril, il n’y a plus de quotas laitiers en Europe. Cette nouvelle étape de libéralisation du marché agricole place les agriculteurs face à des choix de restructurations, à l’heure où la politique agricole du gouvernement est des plus incertaines. La décision, prise dans le cadre de la réforme de la PAC (Politique Agricole Commune) met fin à un système mis en place en 1984. A l’époque, les quotas avaient été créés pour endiguer le problème d’éxcédents chronique de lait. En effet, les subventions accordées aux agriculteurs depuis la création de la PAC avaient engendré une augmentation de la production. L’Europe devait alors racheter le surplus, pour garantir la demande, afin d’empêcher les prix de trop baisser. Ce système a cependant trouvé ses limites et l’Europe, dans l’incapacité de continuer à racheter les surplus, avait finalement décidé de limiter la production par l’instauration des quotas.

 

L’agriculture bio et les circuits courts comme alternative à la compétitivité mondiale

 

   Ces dernières années, avec la mondialisation et l’arrivée, sur le marché des produits laitiers, de nouveaux concurrents, les prix du lait sont devenus de plus en plus sensibles à la conjoncture internationnale. Exemple marquant avec la crise du lait de 2009 : La très forte augmentation de la production en Australie et Nouvelle-Zélande a fait exploser l’offre mondiale. Dans le même temps, la crise économique a entraîné une baisse de la demande. L’Europe commence alors à revoir ses quotas, en les augmentant de 1 %. Le tout avait entraîné une chute de 30 % du prix du lait.

 

   La suppression définitive des quotas européens met aujourd’hui un terme à la garantie des prix du lait. Placés en concurrence directe sur le marché mondial, les agriculteurs ont alors des choix à faire, pour survivre à la course à la compétitivité. Selon Elsa Chanel, coodinatrice de la Frab (Fédération Régionale des Agrobiologistes de Bretagne), beaucoup d’agriculteurs réfléchissent à deux possibilités : « Soit intensifier la production, pour produire plus de lait, ou bien adopter un système de production durable et plus autonome ». Alors que l’Europe voit dans la demande asiatique croissante, de nouvelles ouvertures de marché pour les producteurs Européens, l’agriculture bio et les circuits courts se posent comme une alternative au grand marché mondial et à la compétitivité.

 

« Ce n’est pas une décision prise à la légère et les agriculteurs ont besoin d’être rassurés »

 

   Mais le passage à l’agriculture biologique est une décision importante pour un agriculteur conventionnel, qui nécessite une restructuration de l’exploitation. « Ce n’est pas une décision prise à la légère et les agriculteurs ont besoin d’être rassurés », explique Elsa Chanel, qui craint que « le manque d’assurance du gouvernement sur les aides à l’agriculture biologique contribue à diriger les agriculteurs conventionnels sur de l’intensif ». Il faut dire que l’implication du gouvernement dans l’aide à la bio s’avère plutôt bancale. Le 7 mars dernier, le ministère de l’agriculture annonçait une diminution de 25 % de l’aide aux agriculteurs bio, explicant aux réseaux bio que l’enveloppe prévue était trop petite : le montant de l’aide, passant de 87 millions d’euros en 2013 à 103 millions en 2014, n’avait pas suivi l’augmentation des surfaces cultivées. L’annonce avait provoqué la colère des argiculteurs bio qui ont manifesté le 17 mars, en vue d’obtenir des aides. A Rennes, ils étaient plus de 200 dans les rues. Le gouvernement a finalement annoncé qu’une aide complémentaire, qui viendra compenser les 25 % de réduction, sera versée cet été.

 

La transition, c’est maintenant !

 

   « Le gouvernement semble avoir du mal à tenir ses engagements », fait remarquer la coordinatrice de la Frab. Ainsi, en 2013, le gouvernement s’engageait dans le développement de la bio, avec le « plan ambition bio ». Lancé par le ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll, le plan prévoyait de doubler, d’ici 2017, les surfaces en bio. Celles-ci étaient déjà en forte progression depuis plusieurs années. Ainsi, la part de marché du lait bio, en volume, en France, a été multipliée par 4,3 en 12 ans, atteignant 8,2% au premier semestre 2013, selon le baromètre de la consommation de l’agence bio. La même année, 49 % des français consommaient des produits bio au moins une fois par mois contre 37 % dix ans auparavant. Toujours selon le même baromètre, en Bretagne, entre 2008 et 2013, le nombre de fermes bio a augmenté de 75 %. « La demande de produits bio en France est de plus en plus forte, des agriculteurs sont prèts à se convertir, tous les signaux sont au vert, il faut maintenant que le gouvernement suive », défend Elsa Chanel.

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