Les circuits courts et leur développement en débat à Morlaix
Un sur cinq. C’est le nombre de producteurs pratiquant la vente en circuits courts en France, selon des chiffres du recensement agricole de 2010. Un chiffre élevé, mais qui cache cependant des disparités selon les régions. En Bretagne, d’après des données récoltées par le Civam (Centre d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu Rural), 3129 producteurs pratiquent la vente en circuits courts, soit 1 sur 10. La région Rhône-Alpes, quant à elle, figure en tête du classement des régions pratiquant ce type de vente, avec une exploitation sur trois vendant en direct ou avec un seul intermédiaire. C’est ce qu’on peut voir dans le film « Cultivez local ! », réalisé par l’association Pims et par l’Ardear (Association pour le développement de l’emploi et agricole) Rhône-Alpes, et qui a voulu mettre en valeur des initiatives locales en matière de circuits courts, dont 3 dans cette région. Toutes sont portées tantôt par les agriculteurs eux-mêmes, ou par les consommateurs, ou encore les élus. On découvre ainsi un restaurant scolaire municipal approvisionné par des produits locaux, un magasin bio de producteurs en coopérative, une association regroupant une vingtaine de fermes qui propose de la vente en paniers dans la Drôme, une fromagerie bio créée par des éleveurs laitiers ou encore un abattoir repris par les éléveurs et pratiquant la vente directe en Mayenne.
« Valorisant pour la production »
Projeté au cinéma La Salamandre, le documentaire a été le point de départ d’un temps d’échange entre le public et différents acteurs du Pays de Morlaix, pratiquant la vente en circuit courts ou développant un projet. C’est le cas de Briac, qui cultive des légumes grâce à la traction animale, sur la ferme de Trézenvy, à Plougasnou. « Je vends des paniers directement à la ferme, une fois par semaine », explique-t-il. Sandrine, quant à elle, porte avec son compagnon et d’autres agriculteurs du secteur un projet de création de magasin de producteurs à Pleyber-Christ. « Nous avons répondu à un appel à projet de la mairie de Pleyber-Christ, qui cherchait à créer ce type d’activité dans de nouveaux locaux construits par Morlaix Communauté. Le magasin doit voir le jour au printemps 2015 », précise-t-elle. Mais qu’est ce qui a poussé ces jeunes agriculteurs à se lancer dans les circuits courts ? « Je n’y vois que des avantages », répond Briac. « C’est particulièrement valorisant pour notre production, et puis nous entretenons ainsi un lien direct avec le consommateur », explique-t-il. Même son de cloche du côté de Sandrine. « Nous avons toujours voulu faire de la vente directe. Au départ nous avons voulu nous lancer dans le concept de la Ruche qui Dit Oui, mais la philosophie de la société, qui est devenue une start-up, ne nous correspondait plus. Alors après avoir envisagé de la vente sur les marchés, nous nous sommes tournés vers le magasin de producteurs », détaille la jeune femme de 24 ans. « La vente directe nous permet de mieux maitriser notre travail », poursuit-elle. Mais vendre directement n’entraine-il pas des contraintes ? Si Briac, qui a toujours travaillé en vente directe, ne voit pas d’inconvénients, pour Sandrine, « C’est sûr que les circuits courts demandent du temps et de l’organisation. Il faut pouvoir concilier vente et production », reconnait-elle.
Aux consommateurs d’agir ?
Alors, comment développer les circuits courts sur le Pays de Morlaix, qui, s’ils sont présents, constituent encore bien souvent des initiatives isolées ? « Ce sont aux consommateurs d’agir », affirme Sandrine. Briac verrait, quant à lui, la création d’une Amap (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne, ndlr) d’un très bon œil, ayant précédemment travaillé avec deux structures de ce types du côté de Brest et Crozon. « Les Amap permettent aux consommateurs de réellement s’engager, cela permet de renforcer les liens entre citoyens et producteurs. Et puis, ce n’est pas aux agriculteurs de prendre les risques seuls, c’est bien que les habitants y soient aussi associés », explique-t-il. Sans oublier « les politiques, qui peuvent aussi contribuer au développement de ces pratiques », a souligné quelqu’un dans le public. La création d’une monnaie locale, actuellement en projet sur le secteur de Morlaix, pourrait aussi contribuer à leur expansion. « Utiliser une monnaie locale, qu’on fait circuler sur le territoire, permet de développer les circuits courts, et ce dans tous les domaines, car elle n’est acceptée que par des prestataires définis sur un territoire donné », explique Florent, membre de l’association qui porte ce projet de monnaie locale. A noter également, la constitution d’un groupe de travail autour des circuits courts dans le collectif « Morlaix en transition » qui est en train de se mettre en place. De quoi alimenter les débats et peut-être donner naissance à de nouveaux projets dans le secteur !