Extraction de sable « l’équivalent de 4 pyramides de Khéops » !

Il ne décolère pas. Yves-Marie Le Lay, président de Sauvegarde du Trégor, use des métaphores pharaoniques pour dénoncer le chantier qui s’annonce au large de la Baie de Lannion. « Nous sommes face à un énorme projet, engage-t-il. La CAN (Compagnie Armoricaine de Navigation) prévoit d’extraire 400 000 m³ de sable par an. Dans vingt ans, ils auront prélevé l’équivalent de quatre pyramides de Khéops. »
Face à lui, Sébastien Floch, le président de la CAN, tente de défendre un projet qui pourrait bien chambouler tout un écosystème. « Nous faisons notre travail le plus sérieusement possible, à destination de la filière agricole. Le sable coquillier est un produit naturel et sain, nécessaire à l’agriculture bretonne. L’impact écologique est mesuré », tente-t-il de rassurer.

Ecologie et emploi, les maîtres mots du débat

Face aux deux opposants, une cinquantaine de personnes s’interrogent sur les conséquences d’un tel projet sur les emplois dans la pêche ou le tourisme. Un des aspects remis en cause par les habitants : la turbidité, à cause de l’extraction de sable, l’eau pourrait s’agiter et se troubler. Jean-Christophe Pettier, président d’un club de plongée, craint pour sa profession. « On ne peut pas prévoir les mouvements de sable, c’est dangereux. Je m’interroge sur les conséquences pour les plongeurs professionnels et occasionnels. » Un autre habitant évoque les conséquences « inévitables » sur le lançon, un petit poisson, principale source de nourriture des bars. « Trop de questions restent sans réponse, s’insurge Yves-Marie Le Lay. Pourquoi ne pas récupérer des coquillages qui prolifèrent, comme la crépidule, et les concasser pour créer du sable coquillier ? » Une idée rejetée d’un revers de la main par Sébastien Floch, le président de la CAN. Un ancien éleveur en système herbager durable, Daniel Desjard, émet aussi des réserves quant à la faisabilité du projet. En attendant, les actions de Sauvegarde du Trégor se poursuivent. La manifestation de samedi sur la plage de Beg Leguer met un peu plus la pression sur les élus et autres acteurs partenaires de ce projet qui pose questions.

 

Pour ou contre ce projet d’extraction de sable ?

CONTRE. Jean-Christophe Pettier est président du GISSAGC (Groupe d’intervention et de Sports subaquatiques de la Côte de Granit). Il craint que le projet de la CAN ne vienne troubler son activité. « Nous sommes sur des sites exceptionnels. Or, ce qui est essentiel dans notre profession, c’est la visibilité. Avec ce projet d’extraction, je crains que la turbidité (lire texte principal) vienne altérer notre perception de l’environnement sous-marin. C’est potentiellement un danger si on ne peut pas mesurer les impacts de l’extraction sur les déplacements de sable. Quant à l’écosystème, quel intérêt pour les touristes si la faune et la flore disparaissent ? »

POUR. Daniel Desjard est un ancien éleveur en système herbager durable (méthode Pochon). Il est aujourd’hui transporteur et fournit les agriculteurs en sable coquillier dans le Finistère et les Côtes d’Armor. Pour lui, l’extraction de sable est indispensable pour les agriculteurs biologiques.
« Si le projet de la CAN n’est pas mené à bien, les agriculteurs n’auront pas accès à la fermentation naturelle. Les sols de Bretagne sont connus pour leur acidité. Et la fermentation avec du sable coquiller est la manière la plus naturelle de contrer ce phénomène. Les agriculteurs biologiques et durables seront donc les plus affectés. Grâce à l’extraction de sable, on utilise une ressource locale. Sans cela, les bio et les durables vont devoir faire venir de la route des carbonates de calcium terrestre des régions voisines. Quant à la proposition de mettre en place une collecte et un tri des crépidules -ce coquillage qui prolifère- cela me semble peu crédible.D’autant plus que l’expérience a déjà été menée, sans résultat à ma connaissance. »

 
Plus d’infos

http://www.roullier.com/index.php/fr/activites/armement-naval.html

http://www.sauvegarde-du-tregor.com/