Efecto Pedal, pédalez pour regarder!

Efecto Pedal, pédalez pour regarder!
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À partir d’une idée originale de proposer la diffusion sur grand écran et en plein air de films et documentaires nationaux, l’entreprise a développé des projets de cinéma itinérant en Uruguay et en Amérique du Sud. Et depuis quelques mois, ils proposent aux spectateurs de pédaler pour générer l’électricité nécessaire au fonctionnement des installations. C’est un succès continental ! Et un exemple d’entreprise 100 % socialement responsable.

 

 

– Bonjour Diego, est-ce que tu pourrais te présenter et nous en dire un peu plus sur Efecto Coral et le projet Efecto Cine?

 

Je m’appelle Diego, j’ai 34 ans et une formation en communication audiovisuelle en Uruguay. Lors de mes premières expériences professionnelles, j’ai eu l’occasion de participer à des tournages de films documentaires et de longs métrages. Puis j’ai intégré une entreprise audiovisuelle (Coral Cine) en tant que producteur. Il y a trois ans, j’ai pris la direction de l’un des projets de l’entreprise, Efecto Cine.

 

– Efecto Cine, qu’est ce que c’est ?

 

Ce projet consiste à diffuser des documentaires et des films en Uruguay sur des thèmes variés. Il faut savoir qu’il n’existe pas de tradition du cinéma ici. Les gens n’ont pas l’habitude d’y aller et les salles sont dans un état vétuste. C’est aussi un pays très centralisé sur sa capitale, Montevideo. Avec notre première tournée, « La Matinale », nous avons pris le parti d’apporter dans tout le pays un cinéma de haute qualité et gratuit. Il nous a fallu intégrer la donnée du transport : lors d’une tournée, on remballe le matériel tous les soirs dans une camionnette pour le ressortir le lendemain. Il nous a fallu recruter une équipe compétente et dynamique. Et bien sûr, trouver des moyens financiers. La tournée a été primée meilleur projet Latino Américain durant 2 années consécutives. Efecto Cine s’est renforcé de ce succès et a aujourd’hui une proposition de 80 films.

 

Efecto Cine c’est du cinéma en plein air. Nous installons un écran gonflable, un son digital, et projetons. Mais au-delà de ça, c’est un moment collectif unique. Nous voyons le cinéma comme un agent de sociabilisation, et comme un moyen d’inciter les gens à se penser en société. Comme tous les arts, le cinéma a le pouvoir de faire réfléchir et débattre. Le cinéma uruguayen a proposé plusieurs films et documentaires ces dernières années sur des sujets compliqués pour le pays, qui abordent la dictature notamment. Nous permettons donc à la population de les voir, découvrir son passé et de s’approprier son territoire et son histoire. Certains des spectateurs touchés n’avaient jamais été au cinéma, alors que des films avaient été tournés dans leur village. Grâce aux films projetés, nous abordons des sujets comme la gestion des déchets, de l’eau, le droit des femmes, les transports doux, etc. Un des objectifs du projet est de faire participer les gens. Nous voulons qu’ils se sentent en confiance pour qu’ils puissent donner leur avis.

 

Diego Parodi, directeur de Effecto Pedal

 

 

– Et quand est né Efecto Pedal ?

 

Il s’agit d’un moyen de diffuser Efecto Cine. Tout est né d’un mélange entre la curiosité et le sentiment de responsabilité. Je suis très préoccupé par le sentiment d’amélioration du bien-être social et environnemental en Uruguay. Il y a de plus en plus de voiture et il me semble qu’il faut résister avant d’en arriver au « tout-voiture ». Je suis préoccupé par le fait qu’ici, à Montevideo qui est une petite capitale (1,5 million d’habitants), les gens prennent spontanément leur voiture pour faire une course qu’ils pourraient faire à pied. En plus de se préoccuper de savoir où la garer, s’ils ne vont pas se la faire voler, ou avoir un accident, ils perdent le contact avec des choses simples, comme l’air pur, le soleil, le fait de croiser un voisin dans la rue. Je ne veux pas juger les gens, mais les pousser à réfléchir. J’aime bien l’image du vent de face qui est nécessaire à l’avion au moment de son atterrissage ; je souhaite que l’on soit ce contre-courant nécessaire au développement de la société.

 

Plusieurs initiatives m’ont interpellé, comme celle d’un groupe de rock mexicain qui ont organisé une tournée de 8000 km à vélo, en transportant leur matériel et en invitant le public à pédaler pour générer l’énergie nécessaire à leurs concerts. Ou encore Electric Pedals, cette entreprise anglaise qui utilise des vélos pour faire fonctionner toutes sortes d’installations électriques. Apres avoir rencontré le directeur de cette entreprise, je lui ai dit qu’on aimerait générer l’électricité suffisante pour nos projections. Il fallait aussi que les vélos soient accessibles à n’importe quelle personne : enfants, adultes, et même personnes âgées. Nous avons donc calculé le nombre de vélos nécessaires pour que cela fonctionne, la durée de pédalage et nous avons lancé Efecto Pedal, avec 10 vélos, 10 emplacements pour ceux qui viennent avec leur vélo, et 1 système de pédales manuelles.

Nous sommes devenus les premiers du continent à faire une tournée de cinéma avec cet équipement.

 

– Est-ce que ça a marché, cette idée de faire pédaler des personnes pendant qu’elles regardent un film ?

 

C’était notre grand doute. Et finalement, les gens se sont vraiment pris au jeu. Dès que nous commençons à installer le matériel, les gens n’attendent pas que l’écran soit en place et demandent à monter sur les vélos, même si nous leur expliquons que nous ne pouvons pas stocker l’énergie. Quand le film commence, tout s’autogère avec une grande fluidité. Les volontaires montent sur les vélos, pédalent, et quand ils en ont assez ils descendent et passent le relais à ceux qui attendent derrière. On a installé un voyant lumineux qui leur indique s’ils produisent assez d’énergie ou non. Les gens qui pédalent ne voient en général pas passer le temps. Et quand le film s’arrêtent, ils sont applaudis par les spectateurs, et s’auto-applaudissent car c’est une vraie fierté pour eux d’avoir participé.

 

Avec Efecto Pedal, les gens passent un bon moment, ils voient un spectacle gratuit en compagnie de leurs voisins. C’est quand même mieux que de rester enfermé chez soi !

 

– En quoi Efecto Pedal est une entreprise éco-responsable ?

 

Tout d’abord, depuis un an, nous plantons des arbres. Nous nous disions que c’était bien de produire notre propre énergie, mais que nous ne pouvions pas se dire écologiquement neutres car nous générions de la pollution en faisant nos déplacements en camionnette. Nous avons donc décidé de comptabiliser notre impact carbone – qui est de 12-13 tonnes de CO2 émis pour une tournée en Uruguay – et de planter des arbres pour compenser cette pollution. De plus, avant chaque projection, une personnalité locale responsable de la question e
nvironnementale fait un discours et s’engage à planter un arbre.

 

 

– Quels sont les développements futurs et nouveaux projets que vous prévoyez de réaliser ?

 

Nous avons des projets plein nos tiroirs ! Depuis peu, nous avons commencé à projeter dans d’autres pays. Nous rentrons des Etats-Unis, où nous avons montré le film « Bikes versus Cars » devant 500 personnes au festival du Film et de la Musique d’Austin, au Texas. Imaginez, dans la capitale du pétrole, nous avons fait pédaler des spectateurs ! Et s’ils ne pédalaient pas, l’écran s’écroulait.

 

Nous avons aussi été au Chili le mois dernier, et nous prévoyons d’aller en Argentine, en Équateur et en Colombie. Nous aimerions montrer les mêmes films dans tous ces pays, pour créer un lien entre eux. Et nous continuerons aussi à promouvoir le vélo. Même si nous devons aller dans le mur avec le pétrole, faisons au moins ensemble un tour à vélo avant !

 

 

Pour en savoir plus sur Efecto Cine :

 

https://www.youtube.com/watch?v=Wn5TVJq-BmY

 

http://www.efectocine.com

 

 

 

 

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Antoine et Johanna