Néanmoins nous souhaitons ici relever des incohérences et des limites aux luttes qui viennent de se dérouler.
Nous, les paysans bios du réseau GAB-FRAB défendons un autre système de production et de commercialisation, plus localisé et moins dépendant des transports grandes distances et des énergies fossiles. Nous sommes aussi moins vulnérables face à cette écotaxe car nos gammes de produits alimentaires ne se situent pas sur le marché mondial très concurrentiel et non maîtrisable par les agriculteurs. C’est l’avantage de la création de valeur ajoutée par rapport à la production de volume.
L’écran de fumée formé ainsi dans nos villes ne saurait cacher des problèmes plus graves qui concernent les salariés du système de la surproduction de masse. L’agroalimentaire n’est plus un projet de société, ce système ne peut plus être une solution pour la jeunesse Bretonne. La PAC est un des leviers économiques les plus simples à actionner afin de sortir de la débâcle. Il ne serait pas injuste que les salariés de l’agro-alimentaire déchus perçoivent une partie de cette manne financière (10 000 ou 15 000 €/an ) afin de se reconstruire et d’envisager un futur. La solidarité ne se mesure pas que dans les mots. D’après les chiffres de la DRAAF, 100 actifs par commune en Bretagne travaillent dans l’agri et l’agro. Ce qui représente 12 Ha de Surface Agricole Utile disponibles pour un actif. Les paysans défendant l’Agriculture Biologique et l’agriculture paysanne démontrent tous les jours que le travail pour tous en Bretagne est possible.
La principale organisation agricole organisatrice du mouvement de mauvaise humeur a beau jeu de dénoncer l’excessivité de l’impôt ( nous pouvons même rappeler que son président national sera l’un des plus touché par l’écotaxe à travers son groupe d’aliment du bétail GLON-SANDERS). Le modèle agricole non rentable qu’elle préconise depuis des décennies ne vit que grâce à la PAC, redistribution de l’impôt perçu sur la population Européenne. Beaucoup d’agriculteurs tirent malheureusement leurs revenus uniquement de la redistribution de l’UE. Ils sont dépendants d’un système. L’Agriculture Biologique remet le paysan au centre de la démarche productive en lui redonnant le pouvoir de décision.
Nous regrettons que cette lutte serve aussi encore une fois à dénigrer l’inévitable prise de conscience de l’impact de nos pratiques agricoles sur notre milieu et celui de nos concitoyens. Nous ne serons pas étonnés des reculades du gouvernement et des pouvoirs publics face aux pressions exercées par les soi-disant représentants de la profession. Hier l’attention à notre environnement pouvait apparaître comme une charge, mais aujourd’hui c’est notre seule richesse non délocalisable et gratuite. Nous n’avons plus d’alternative pour vivre en Bretagne.
Les agriculteurs bios du Finistère regroupés au sein du GAB 29 ne se sentent donc pas solidaires des mouvements orchestrés lors des dernières semaines par des baguettes expertes en communication.
Nous déplorons aussi, comme aux plus belles heures de la surproduction agricole, l’utilisation de denrées alimentaires comme projectiles pendant les manifestations quand on connaît les difficultés que peuvent connaitre les populations les plus défavorisées pour se nourrir. En outre, les structures de l’agriculture biologique et leurs adhérents sont engagés dans les programmes de reconquête de la qualité de l’eau et notamment dans les programmes algues vertes. Nous sommes choqués des jets de choux-fleurs quand on sait que leur surfertilisation issue d’engrais chimiques à base de gaz naturel entraîne des phénomènes de marées vertes au nord du département. Nous souhaitons aussi rappeler que les œufs détruits sont produits grâce à la déforestation de l’Amazonie pour y produire le soja OGM nécessaire à la ponte des poules de batterie.