1

Assainissement : changeons notre regard et reconsidérons nos déchets.

(Plume Citoyenne) Nous sommes élèves en Seconde Bac Pro Technicien Menuisier Agenceur au lycée Alphonse Pellé de Dol-de-Bretagne. Cette année, nous allons participer à un projet pédagogique mettant en lien plusieurs acteurs de notre territoire. En effet, nous allons réaliser des éléments de coffrage pour la mise en place de toilettes sèches à L’Ôôôberge, l’habitat participatif de notre commune. Au-delà de la fabrication de ces ouvrages, ce projet sera pour nous l’occasion de faire connaissance avec les différents acteurs et partenaires impliqués dans cette initiative. Nous documenterons ici nos avancées et nos rencontres via une série d’articles.

Premier article par Guillaume et Mathis, élèves de seconde Bac Pro Technicien Menuisier Agenceur au lycée Alphonse Pellé de Dol-de-Bretagne, accompagnés de Rachel Guitton, professeure documentaliste.

Vendredi 18 Novembre 2022, nous avons rencontré des habitants de l’Ôôôberge. Irène, Samuel et les deux François, qui nous ont accueilli dans l’espace commun. Cette rencontre fut l’occasion pour nous de découvrir le projet et l’histoire de cet habitat participatif et surtout d’en apprendre davantage sur l’assainissement et ses problématiques actuelles.

 

Les toilettes à eau, une révolution devenue un non-sens écologique

Les toilettes à eau que nous utilisons aujourd’hui ont été inventées au XIXe siècle et ont pour principe de fonctionnement, le tout-à-l’égout. A l’époque, puis tout au long du XXe siècle, ce système d’assainissement était considéré comme un véritable progrès ayant permis d’éradiquer des maladies et des épidémies comme celle du choléra. Or, nous découvrons aujourd’hui que ce système est un non-sens écologique notamment parce qu’il fonctionne avec de l’eau potable.

Très pratiques, les toilettes à eau ont l’avantage d’être faciles à utiliser, il suffit de tirer la chasse d’eau pour faire disparaître nos excréments. C’est confortable, hygiénique et ça préserve l’intimité. Mais ce système demande une logistique complexe et une consommation énergétique importante. L’usage des toilettes à eau souille 150 litres d’eau potable par personne et par jour1. Et les installations pour dépolluer et épurer l’eau sont coûteuses en énergie car concrètement, il s’agit tout de même de dépolluer environ 13 millions de mètres cubes d’eaux usées par jour ! Cette action de dépollution est compliquée et il persiste malgré tout une pollution résiduelle qui est évacuée dans les océans, dans la mer et dans nos rivières. Et puis, évidemment, les toilettes à eau représentent un coût financier pour les usagers (prix de l’eau potable, abonnement au réseau, impôts…).

Cependant, les toilettes à eau et le tout-à-l’égout restent dans l’imaginaire collectif un progrès essentiel qui a apporté beaucoup de confort à toutes les classes sociales. Pour bon nombre de personnes, il est impossible d’envisager une autre solution d’assainissement, les toilettes sèches étant alors perçues comme un retour en arrière.

Les toilettes sèches, bien plus qu’un enjeu écologique

Aujourd’hui, il est grand temps de repenser le modèle de nos toilettes et de se pencher plus attentivement sur le concept des toilettes sèches. En effet, grâce aux échanges avec les résidents, nous avons découvert que les enjeux de l’utilisation des toilettes sèches sont multiples et touchent différents champs de notre société.

Grâce à Samuel, nous avons découvert qu’en utilisant le tout-à-l’égout comme assainissement principal, nous perdions des ressources tout en générant des déchets. En effet, nos excréments et notre urine contiennent des nutriments (azote, potassium, phosphate…) très utiles en agriculture comme engrais et fertilisant. Ils deviennent alors des ressources naturelles indispensables pour nos sols. Il y a donc derrière la généralisation de l’assainissement écologique un enjeu agricole : prendre soin de nos terres, nourrir nos sols de façon écologique plutôt que de le faire avec des engrais chimiques polluants.

Ces derniers temps, l’épidémie de Covid-19 et, sur notre territoire, les épidémies de gastro dans les parcs à huîtres nous ont montré que le traitement de l’eau via les stations d’épuration et de potabilisation n’est pas efficace et arrive à saturation. De plus, l’épisode de sécheresse de 2022, nous a fait prendre conscience que l’eau potable est une richesse à préserver et qu’il devient donc illogique de la souiller et de gaspiller en tirant la chasse d’eau de nos toilettes. Nous sommes donc face à un enjeu de citoyen et à un enjeu de santé publique.

Et puis bien sûr, derrière la question de l’assainissement se cachent aussi des enjeux économiques, politiques et sociaux (être accessible à tous, culturellement, socialement, techniquement et financièrement).

Après cette matinée passée aux côtés des habitants de L’Ôôôberge, nous nous sommes rendus compte que développer l’usage des toilettes sèches, c’est s’engager dans une démarche de prévention des sols et dans une démarche de réduction de nos pollutions domestiques. C’est aussi réduire les risques sanitaires et considérer nos excréments non plus comme des déchets qu’il faut s’empresser de faire disparaître mais plutôt comme des ressources naturelles. Il reste cependant des freins importants à lever pour la généralisation de cet assainissement, notamment celui du tabou autour de nos excréments et celui des préjugés autour des toilettes sèches (odeurs, manque d’hygiène, retour en arrière…).

Dans un prochain article, Lucas vous présentera le système retenu et développé par les habitants de L’Ôôôberge pour équiper cet habitat collectif en toilettes sèches.

 

 

Pour aller plus loin : L’Ôôôberge, habitant.e.s du monde et aussi d’ici, Habitat participatif à Dol-de-Bretagne : http://www.loooberge.org/?PagePrincipale

Source des images proposées : Illustrations tirées de l’exposition Terr’eau 2016, graphisme Julien Revenu, https://www.terreau.org/Exposition-Terr-Eau-2016.html

 

1 Fabien Ginisty, Chiottes sèches à tous les étages, L’âge de faire, n°138, février 2019




MOTHERLOAD , la révolution du vélo-cargo

(Plume citoyenne) Le dimanche 22 janvier, c’est à Morlaix (29), que l’association APAV (A Pied A Vélo en pays de Morlaix ) organise un ciné-débat autour du film-documentaire « Motherload » de la réalisatrice Liz Canning. En partenariat avec La Salamandre, le cinéma du collectif SEW, il sera projeté à 15h30. La volonté de l’association est d’amener le public à se questionner sur les alternatives à la voiture individuelle, notamment la marche et le vélo, et à imaginer d’autres formes de mobilité, plus émancipatrices, conviviales et durables.

C’est en 2008, suite à la naissance de ses jumeaux, que la californienne Liz Canning s’est résolu à troquer son vélo contre une voiture censée être plus adaptée à son nouvel usage familial. Mais cette cycliste joyeuse et convaincue a vite déchanté…
Elle s’est rendue compte que ce nouveau véhicule ne lui convenait pas, qu’il n’était pas en accord avec son mode de vie, ses valeurs et même qu’il la rendait malheureuse !
Mais comment faire sans voiture pour continuer ses déplacements avec Rocko et Stormy, ses jumeaux qui grandissaient ?
Après quelques recherches Internet, elle découvre l’existence du vélo-cargo et d’une riche communauté américaine réunie au sein du Cargo bike Movement.
Enthousiasmée par ce mode de vie, Liz décide de réaliser un documentaire participatif sur ce mode de transport, qu’elle juge comme aussi révolutionnaire que ne fût au 19 ème siècle, celui de son ancêtre, la bicyclette. Dès 2011, elle commence à recueillir à travers le monde, du Danemark au Ghana, en passant par l’Australie, des centaines de témoignages d’utilisateurs et d’utilisatrices de vélo-cargos. Le résultat est sans appel, ils sont tous et toutes uniment convaincu.es, la vélorution du vélo- cargo est en marche !
Sorti en 2019, « Motherload » fait le tour de nombreux festivals dans le monde et remporte plusieurs prix, notamment un prix spécial du jury au célèbre festival américain de Sundance.

 

En Bretagne également, les vélo-cargos sont de plus en plus nombreux sur les routes.
Tristan, Émilie et Julien, respectivement menuisier, assistante maternelle et infirmier, utilisent le vélo-cargo dans leurs déplacements, professionnels pour les deux premiers et familiaux pour le troisième. Ils nous livrent quelques mots symboles de ce que cela leur a apporté : « liberté, efficacité, lien social, agilité, environnement respecté, activité physique, transmission de valeurs aux enfants, plaisir et combat… ». Des propriétaires visiblement enthousiasmés et qui ont renoncé à une voiture dans leur foyer . Et qui sont aussi devenus des militants actifs dans des associations de promotion du vélo au quotidien.

 

 

 

Au cœur de la Manufacture des tabacs de Morlaix, l’APAV proposera un temps d’échanges, de débats et de rencontres entre le public et des propriétaires passionnés de vélo-cargos. Vous aurez même la possibilité d’essayer différents modèles (longtail, biporteur …) dans le sublime écrin de la cour du SEW car nul doute que ce documentaire solaire, ode à la liberté retrouvée, vous aura donné envie de remiser votre voiture contre une bicyclette. « Motherload, kid tested, planet approved » !

 

Pour en savoir + :

site officiel : http://motherloadmovie.com/
FB : https://www.facebook.com/MOTHERLOADmovie2/
YouTube : https://www.youtube.com/channel/UCQg6vIR05Ng5i2pHk_1dM6A




Programme Plages Vivantes, une nouvelle approche pour préserver nos plages qui bordent notre Bretagne

(Plume citoyenne) Comment concilier la préservation des habitats du littoral tels que la laisse de mer et les activités humaines en maintenant une logique à la fois économique et respectueuse de l’environnement ?

Plages vivantes” est un programme de sciences participatives mené par la station biologique de Concarneau en lien avec le Muséum d’Histoire Naturelle pour inviter tout un chacun.e à observer la biodiversité des hauts de plages dans la «laisse de mer».  Pour beaucoup de touristes, une belle plage est d’un blanc immaculé, vierge de toutes algues. Pourtant ces paquets d’algues laissés par la mer à marée haute témoignent d’une plage bien vivante. 

Les observer permettra aux scientifiques de mieux analyser l’intérêt de ceux-ci et de mieux caractériser ce qui composent ces laisses. De plus, cela pourrait offrir une meilleure compréhension et des prédictions plus justes des effets des changements globaux et locaux qui ont un impact sur ce milieu. 

Les laisses de mer ne riment ni avec « sales » ni avec « laisser-aller ».

En effet, la laisse de mer est un écosystème à part entière, elle interfère dans la chaîne alimentaire de nombreuses espèces.  Il ne faut donc pas confondre algues vertes et laisses de mer ! Les apports massifs d’algues vertes sont le résultat d’un excès d’azote et de phosphore provoqué par les activités humaines, agricoles et non agricoles. Contrairement aux laisses de mer, elles n’ont aucun intérêt écologique et dégradent les écosystèmes côtiers. Leurs impacts visuels et olfactifs, préjudiciables au tourisme, conduisent très fréquemment les services municipaux à les évacuer.

Suivis naturalistes réalisés par les étudiant.es du lycée agricole de Suscinio, en Gestion et Protection de la Nature

Durant l’année 2022 – 2023, un groupe de 5 élèves en  BTS Gestion et Protection de la Nature ont réalisé un projet tutoré au côté de Géraldine Gabillet, chargée de mission environnement au CPIE (Centre permanent d’initiatives pour l’environnement). Ce CPIE souhaite mieux connaître la qualité écologique des plages et du littoral du Pays de Morlaix. Particulièrement, il souhaite observer et étudier l’impact du nettoyage des plages ainsi que des activités de loisirs sur les espèces végétales et animales. Par conséquent, deux suivis naturalistes sur cinq plages différentes du littoral du Pays de Morlaix ont été réalisés. Ces suivis ont permis de récolter des données,  en vue de les enregistrer sur la base de données des sciences participatives. Les différents  protocoles ont été effectués sur  deux saisons différentes afin d’avoir des résultats comparables selon les périodes de l’année. Le premier protocole, ALAMER, permet grâce à des clés de déterminations simplifiées, de reconnaître les différentes espèces d’algues qui ont été déposées par la marée. Grâce à la participation d’un maximum de personnes (touristes, locaux etc…), les scientifiques sauront  dans quelle mesure les espèces d’algues de la laisse de mer sont différentes d’une plage à l’autre ou au cours des saisons. 

Le protocole dit OLAMER,  est encore expérimental et complémentaire du protocole précédent. Il est dédié aux oiseaux du littoral et plus spécifiquement de l’estran et sa laisse de mer qui constituent des habitats essentiels pour l’alimentation de nombreuses espèces d’oiseaux. Pour finir le protocole OSPARITO, est un programme ludique à destination d’élèves de cycles 2 et 3 pour étudier et s’approprier la problématique de la pollution marine. 

A travers un protocole scientifique développé autour de l’univers de l’enquête policière, les élèves participeront à la collecte de données scientifiques sur les déchets aquatiques. Néanmoins, ce protocole peut être décliné et simplifié: une simple collecte de déchets incitant chacun.e à en faire autant au quotidien. Finalement les résultats de ces protocoles apporteront des informations sur l’état de conservation des plages. En comparant les différents résultats, diverses interprétations seront émises. En comparant aussi ces données à des systèmes de références, elles faciliteront et contribueront à la prise de décisions des communes et autres collectivités locales. C’est pourquoi son évolution est fortement corrélée avec les activités humaines. Il est donc important et nécessaire de valoriser cet habitat pour répondre au changement climatique. 

Pour conclure le projet tutoré, les étudiants de Suscinio ont proposé à une école primaire de la ville Santec une animation autour des protocoles afin de sensibiliser les futures générations à l’importance de l’environnement et tout ce qui nous entoure en général.

 

 

Liens des protocoles : 

https://www.plages-vivantes.fr/alamer/edito/le-protocole-olamer

https://osparito.surfrider.eu/participer-au-projet/  




« Et si le père Noël hait thunes … ordures » ou comment fêter Noël autrement ?

« A quoi peut ressembler un joyeux Noël anticapitaliste, zéro thunes et zéro ordures ? » Pour commencer à y répondre, c’est à Quimperlé (29) , le 2 décembre à Ty Pouce, que l’association OzActes propose une soirée sur le thème d’un Noël différent, pour des fêtes simples et solidaires.

Courses aux cadeaux fabriqués au bout du monde, gaspillage alimentaire, poubelles débordant d’emballages, pollution plastique, pollution phytosanitaire…Stop, n’en jetez plus, ça déborde!
Prendre le temps de s’interroger sur le sens profond des fêtes de Noël, peut permettre de remettre en lumière les plaisirs essentiels de cette période. Il est tout à fait possible de se faire du bien en privilégiant les liens humains, aux vivants, plutôt que ceux aux biens matériels. Profiter de ses proches, partager des moments chaleureux, se créer des souvenirs, être respectueux de la planète,
c’est tout le sens qu’OzActes met en valeur dans cet atelier proposé aux bricol’heur.euses. Pour venir fabriquer son sapin alternatif et ses décorations, il suffit d’emmener sa bonne humeur, les outils et matériaux seront fournis ainsi que la ty soupe qui sera proposée par Ty Pouce. Ensemble, il sera possible de réfléchir à une décoration de Noël naturelle et écologique, que l’on conservera sur des années… et bien plus encore car les temps d’échanges sont l’essence même de cette période tournée vers l’attention aux relations.


Comme un petit pied de nez aux côtés obscurs de l’impact des fêtes de Noël sur la planète, les membres d’OzActes cherchent à renverser les choses et cela dans la joie et toujours avec humour.
Une étude du Stockholm Environment Institut a montré en 2007 que nous augmentions significativement notre empreinte carbone lors des fêtes de fin d’année… Pour exemple, sur les 3- 4 jours autour de Noël, on estime l’impact carbone par personne à 650 kg de CO2. Soit presque un tiers de ce que l’on devrait émettre en un an pour maintenir les objectifs climatiques en 2050…


Claire et Aline, toutes deux membres de l’association, ont particulièrement travaillé autour de l’impact du célèbre sapin de Noël dont 18% de ceux achetés en France, sont produits en Bretagne.
Pour le côté obscur de sa culture conventionnelle, il est noté que les sapins sont, au cours de leur croissance, soumis à de très nombreuses pulvérisations de produits phytosanitaires et d’épandage d’engrais qui, ont et auront, sur de nombreuses années, des conséquences sur les sols et sur les eaux.
Un peu moins connu, ils peuvent également nécessiter des hormones de croissance pour leur donner une forme conique. Produits de synthèse dont certains sont soupçonnés d’être cancérigènes… La culture des sapins est une monoculture sur des centaines d’hectares qui anéantit l’équilibre de la biodiversité. L’achat de terres par les entreprises du secteur fait également grimper le prix des terres agricoles au détriment des paysan.nes produisant des cultures alimentaires comme le souligne Claire. « Le résultat de cette culture intensive est une mauvaise santé des écosystèmes, du vivant et donc des humain.es ».
Et même en fin de parcours, les sapins peuvent encore provoquer une pollution de l’air s’ils sont brûlés à l’air libre : selon l’ ADEME, brûler 50 kg de sapins équivaut à rouler 13000 km avec une voiture diesel. Pour OzActes, les opérations de broyage organisées par les collectivités ne sont pas non plus la solution et l’association appelle également à réfléchir sur la racine du problème car les déchetteries débordent de végétaux à composter en fin d’année.


Et si vraiment la présence de sapins naturels vous est nécessaire à Noël, Claire propose quelques conseils judicieux pour le faire le plus respectueusement possible : « Cueillir seulement quelques branches pas trop grosses, avec de bons outils pour ne pas abîmer l’arbre et en veillant à ne pas déséquilibrer sa silhouette. »
Un autre monde est possible, un autre Noël aussi. Et si c’était ce que nous demandions sur notre lettre de vœux adressée au Père Noël … ou plutôt à Gaïa, notre Terre commune ?

 


En pratique :
RDV à Ty Pouce , 4 ruelle des Gorrêts, Quimperlé, le 2 décembre à 18h
02 98 71 67 1




Tara, Observatoire du plancton… Et du plastique

Etudier les plastiques qui arrivent sur nos côtes, voir comment ils vieillissent et quels types de plancton s’y agglomèrent… un observatoire, unique en France, scrute le littoral de Port-Louis, dans le Morbihan. Un travail complémentaire à la mission du bateau d’exploration scientifique lorientais Tara sous de lointaines latitudes.

 

Plastique et plancton - Ramassage de plastiques sur la grande plage de Port-Louis et animation sur le thème "La vie dans une goutte d'eau".
L’équipe scientifique de l’Observatoire du Plancton est composée de deux médiateurs, Roman Portanguen et Jérôme Even, et d’un chargé d’études littorales, Antoine Charpentier. En haut et en bas à gauche, le dernier ramassage de plastiques sur la grande plage de Port-Louis dans le Morbihan, le 28 avril 2022.  En bas, L’Observatoire du Plancton a une mission de vulgarisation et d’éducation. Elle organise des animations à destination du grand public toute l’année.

 

Les deux médiateurs scientifiques et le chargé d’études littorales de l’Observatoire du Plancton, accompagnés de bénévoles, ramassent quatre fois par an depuis quatre ans tous les plastiques qu’ils trouvent sur les plages. L’objectif est de suivre l’évolution de ces déchets et de permettre aux chercheurs de bénéficier de données sur le plastique et ses concentrations. Une démarche à laquelle prend part Tara dans le cadre d’un projet de sciences participatives avec les écoles.

Des études

«Nous faisons le tri en fonction des caractéristiques des plastiques pour, notamment, mettre en évidence le taux des emballages à usage unique, comme les emballages alimentaires ou de produits ménagers. Nous comptons les particules et renseignons nos bases de données pour comprendre ce que l’on retrouve», explique Antoine Charpentier, chargé d’études littorales.

Chaque année, la base de données s’enrichit. «Ces données doivent permettre d’avancer dans la recherche de matériaux de substitution», poursuit Antoine. En janvier 2020, une stagiaire est venue renforcer l’équipe pour travailler sur la colonisation des plastiques en mer par le plancton.

En faisant vieillir différents types de plastique, l’Observatoire souhaite découvrir quel matériau se dégrade une fois que le plancton s’y est aggloméré, et si ce plancton est majoritairement toxique ou non. Le projet est réalisé en collaboration avec les plaisanciers et le laboratoire de recherche de l’Université de Bretagne Sud.

Des prélèvements en rade

Sur commande de Lorient Agglomération et en collaboration avec la Sellor pour le maintien de sa labellisation Ports propresl’Observatoire a aussi augmenté le rythme de ses prélèvement dans la rade à l’entrée du Blavet. «Nous avons huit stations de prélèvement, qui sont échantillonnées chaque mois de mars à décembre avec les plaisanciers, ce qui représente dix journées de prélèvement par an».

Les échantillons sont étudiés par les scientifiques pour caractériser le plancton de la rade, mieux comprendre le fonctionnement et l’évolution des écosystèmes de ses côtes et déterminer s’il y a des variations saisonnières et annuelles.

«Nous recherchons les planctons et les nutriments (nitrates, phosphates et silicates) présents dans l’eau. Des éléments qui permettent par exemple d’expliquer pourquoi nous avons des marées vertes», précise Antoine.

 

D’où viennent ces particules ?

Les analyses au niveau planétaire montrent que l’origine des microplastiques n’est pas seulement due à la peinture des bateaux ou à la fragmentation en mer des gros plastiques sous l’effet des vagues et du soleil.

Une partie de ces déchets arrivent déjà dans les océans sous forme de microplastiques par la voie des fleuves ou par voie aérienne. Elles sont notamment issues du lavage des textiles synthétiques et de l’usage des véhicules (usure des pneus, freinage), dans des proportions inattendues.

L’usure des pneus serait à elle seule responsable du dépôt océanique annuel de 100 000 tonnes de microparticules par voie aérienne (particules fines de moins de 10 microns) et 64 000 tonnes par voie fluviale. Les chiffres proviennent d’une étude de modélisation publiée le 14 juillet 2020 dans la revue Nature Communications.

En juillet 2022, les derniers ramassages à Port-Louis, en haut de plage, ont surtout recensé des matières légères et volumineuses, comme le polystyrène qui, poussées par le vent, finissent bloquées le long des murs qui bordent la plage. On y trouve également des preuves plus directes de la présence humaine (sac plastique, bouteille…).

Dans la laisse de mer, se nichent de nombreux petits plastiques fins à usage unique qui restent collés aux algues, des emballages de petits gâteaux notamment. On y trouve également des matières plastiques vraisemblablement transportées par les algues (tissu, filet…). Plus bas, près de l’eau, il est courant de repérer des morceaux plus lourds comme des bouts de tuyau.

Le prochain ramassage est prévu en novembre 2022 avec la classe science d’une école de Port-Louis. Peu de surprises attendues. Les collectes de l’Observatoire du Plancton «restent sensiblement les mêmes d’une opération à l’autre».

Une simulation scientifique démontre que les déchets plastiques peuvent être réduits de 80 % à l’horizon 2040 en combinant trois actions simples : amélioration de la collecte et de l’élimination des déchets plastiques, amélioration des techniques et des capacités de recyclage et réduction de l’utilisation du plastique, notamment les emballages à usage unique.

 

 

 

La vie dans une goutte d’eau

L’Observatoire du Plancton est une association loi 1901, agréée Jeunesse et Sports. Sa vocation est de rendre accessible à tous la connaissance des milieux aquatiques et de favoriser leur protection durable. Il propose des animations et conférences toute l’année à Port-Louis et développe des animations estivales. Elle propose des sorties nature et des ateliers à destination des scolaires.

Adresse : 1 Bd de la Compagnie des Indes à Port-Louis.
Tél. : 02 97 82 21 40 / Site web : http://observatoire-plancton.fr

 

La Fondation Tara Océan en perpétuelle exploration

 

5 000 miliards de morceaux de plastiques flottent à la surface de nos océans. C’est ce qu’a estimé Tara Océan, la première fondation reconnue d’utilité publique consacrée à l’Océan en France. Sa goélette est rentrée à son port d’attache de Lorient, le 15 octobre dernier, après avoir parcouru 70 000 kilomètres en deux ans.

 

Sur une période de six mois, de mai à novembre 2019, la goélette scientifique Tara a parcouru les quatre façades maritimes européennes et prélevé des échantillons dans neuf des principaux fleuves d’Europe. Il s’agit de la première mission dédiée à la pollution plastique des grands cours d’eau réalisée à cette échelle. Elle a été initiée par la Fondation Tara Océan, en partenariat avec 17 laboratoires de recherche et coordonnée scientifiquement par le CNRS.

 

 

Le 12 décembre 2020, elle a repris la mer pour une expédition de deux ans sur 70 000 km. 21 escales étaient programmées le long des côtes sud-américaines et africaines, jusqu’en Antarctique. Sa mission : analyser le «microbiome» de l’océan, c’est-à-dire l’ensemble des micro-organismes (virus, bactéries, plancton…) qui peuplent l’Atlantique Sud, et comprendre comment ils réagissent au changement climatique et à la pollution. Ces organismes marins minuscules (moins d’un millimètre) constituent le premier maillon de la chaîne alimentaire et sont essentiels à tout l’écosystème océanique.

 

Un monde invisible qui représente au moins deux tiers de la biomasse des océans

 

Ils «captent notamment le dioxyde de carbone atmosphérique à l’échelle planétaire et produisent en retour l’oxygène que nous respirons chaque jour. Rouage essentiel de la grande machine climatique, le fonctionnement de ce monde invisible reste pour l’heure encore largement méconnu», explique Colomban de Vargas, co-directeur scientifique de la mission, chercheur au CNRS à la station biologique de Roscoff. Ils représentent pourtant «au moins deux tiers de toute la biomasse des océans», soit quatre fois plus que la biomasse cumulée de tous les insectes sur terre.

Les premiers scientifiques ont embarqué en février à Punta Arenas au sud du Chili. La goélette a ensuite longé l’Amérique du Sud jusqu’au canal de Panama, transité par les Antilles françaises, redescendu le long de l’Amazonie, de l’Argentine, puis mis le cap sur la mer de Weddell, en Antarctique. Les scientifiques ont pu étudier le panache du fleuve Amazone, qui «est en train de changer ses caractéristiques à cause de la déforestation et des mines», précise Daniele Ludicone, co-directeur de la mission. Ou encore de prélever des échantillons autour d’icebergs alors qu’ils «s’effondrent de plus en plus à cause du changement climatique». La goélette est rentrée à son port d’attache de Lorient, le 15 octobre 2022, à l’occasion de la Fête de la Science.

 

 

Une base internationale au Pôle Nord

 

15 ans après une première expédition de 500 jours en Arctique, la Fondation Tara Océan se prépare à lancer une nouvelle exploration scientifique au long cours en direction du Pôle Nord. L’Arctique abrite une vie marine unique. La fonte des glaces, sur ce territoire gelé en permanence, est prévue pour 2045. Cette expédition a pour but de renforcer la recherche française et internationale sur ce milieu, parmi les plus extrêmes de notre planète, afin de mieux comprendre l’impact du changement climatique sur la biodiversité et les capacités d’adaptation des espèces endémiques.

Base internationale, la Tara Polar station, sous forme de dôme flottant ovale, devrait se laisser piéger dans les glaces en 2024 ou 2025. Elle embarquera des scientifiques du monde entier, au sein d’un équipage de 12 à 20 personnes pour des missions de 18 mois consécutifs jusqu’en 2045. Climatologues, biologistes, physiciens, glaciologues, océanographes, médecins, mais aussi artistes, journalistes et marins vont s’unir et cohabiter au cœur de Tara Polar Station pour effectuer des observations et mener des expériences sur place, sous des températures oscillant entre -20° et -45° en plein cœur de la nuit polaire en hiver.

 

 

Sources :

  • Entretien avec Antoine Charpentier,
  • «L’Echopépode» n° 28 (août 2020), publié par l’Observatoire du Plancton.
  •  Fondation Tara Océan

 

A lire

Plastique et planton - Le livre bleu de Tara Océan

Le Livre Bleu de Tara – Aux sources de la pollution plastique

téléchargeable ici en version PDF

Et en complément :

L’économie circulaire, une solution aux pollutions plastiques ? (fondationtaraocean.org)

 

 

 

Pour en savoir plus

OCEANS. LE PLASTIQUE, VRAIMENT PAS FANTASTIQUE, une série documentaire en trois parties.

 

[1] LE PLASTIQUE, TUEUR ET PERTURBATEUR EN SERIE

Il y a assez de plastique dans les océans pour faire 400 fois le tour de la Terre. Toutes les 60 secondes, 17 à 20 tonnes de déchets plastiques, soit le poids de 5 éléphants, y sont déversées. C’est un tueur en série et un perturbateur. Il cause chaque année la mort d’un million d’animaux marins et touche plus de 800 espèces. Le plastique est un fléau à éradiquer par les 3 R : réduire, réutiliser, recycler. 175 pays se sont retrouvés au Kenya, à Nairobi, en février 2022, pour ouvrir la voie à un traité international dans le cadre de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement. Un accord juridiquement contraignant est attendu pour 2024.

Lire

 

[2] DU PLASTIQUE PARTOUT DANS LE MONDE

On produit et on utilise du plastique aux quatre «coins» du globe. Les déchets qui en découlent affluent en quantités variables dans l’Océan en fonction de la plus ou moins bonne gestion locale de leur collecte et de leur traitement. Dimanche 17 septembre 2022, un World Clean Up Day sera organisé un peu partout dans le monde. Qui sont les principaux pollueurs de l’océan par les plastiques et quelles sont les mesures prises à l’échelle du globe pour enrayer cette pollution ? Réponse dans la deuxième partie du dossier documentaire «Plastique, vraiment pas fantastique».

Lire

 

[3] COMMENT ERADIQUER L’INQUIETANT «7e CONTINENT» ?

Seulement 9% des déchets plastiques sont recyclés dans le monde. Une multitude d’innovations ont vu le jour pour valoriser ces déchets, devenus des ressources précieuses, et pour tenter de les extraire de nos océans. Ils sont traqués jusque dans les fleuves et les rivières ou à la sortie des réseaux d’eaux pluviales. L’économie circulaire ne s’attaque pas à la racine du problème : les plastiques entretiennent la filière polluante des hydrocarbures. Des voix s’élèvent : nous devons changer de paradigmes. Le meilleur déchet plastique, qu’il soit recyclé ou non, même biosourcé, est celui qui ne sera jamais produit.

Lire

 

Un article écrit par Béatrice Mingam




Bascule Argoat, entre tiers-lieu et éco-lieu des transitions écologiques en Centre Ouest Bretagne (56).

A la suite de la deuxième Edition de son Forum des coopérations, le Réseau Cohérence publie en partenariat avec Eco-bretons une série d’articles sur l’engagement. Chaque article présente une initiative inspirante en Bretagne avec un focus sur sa manière d’accompagner l’engagement dans les transitions : comment sortir de l’entre-soi ; comment toucher de nouvelles personnes ou comment se relier à d’autres initiatives et coopérer ? Des enjeux auxquels nous tentons de répondre au travers de ce dossier. Nous continuons notre présentation avec une initiative du Centre Ouest Bretagne, au cœur de Roi Morvan Communauté : le Tiers-lieu Bascule Argoat. Pour comprendre comment ce lieu à la fois d’habitation, d’accueil et d’expérimentation des transitions écologiques et sociales fonctionne et aborde la question de l’engagement, nous avons interviewé Simon Suire, habitant permanent de Bascule Argoat.

Cohérence : « Pour commencer, pourrais-tu nous en dire un peu plus sur Bascule Argoat ? »

Simon : « Bascule Argoat, c’est un collectif d’une petite quinzaine de personnes, de 24 à 41 ans, qui fonctionne en gouvernance partagée et en auto-gestion [Vous pouvez trouver plus d’informations sur leurs définitions de ces termes par ici : https://argoat.la-bascule.org/notre-mode-de-fonctionnement]. Aujourd’hui nous avons une Raison d’Être posée depuis le début de l’aventure et après deux ans et demi d’existence elle nous paraît trop large et pas assez précise, et nous souhaitons la rafraîchir.

Concrètement Bascule Argoat c’est un grand bâtiment de 800m2 avec un grand jardin de 3500m2 en ruralité, entre Rostrenen et le Faouët. On est plutôt un projet associatif avant d’être un projet d’habitat même si le projet d’habitat est parti intégrante du projet. »

 

 

Cohérence : « Comment parvenez-vous à susciter un engagement à travers vos activités ? »

Simon : « Bascule Argoat suscite l’engagement par deux moyens, tout d’abord sur notre lieu à travers l’accueil et l’expérimentation. Nous expérimentons beaucoup de choses qui sont liées aux transitions et nous ouvrons notre collectif. Concernant l’accueil nous avons une semaine d’accueil par mois qui est dédiée à la découverte de la vie en collectif à Bascule Argoat et de nos outils. Des personnes – que nous ne connaissons pas forcément – nous contactent et peuvent venir découvrir comment on vit, fonctionne, travaille, etc… C’est ce qui selon nous permet de planter des graines en inspirant les personnes. Par exemple pour la gouvernance partagée, cela permet de tester nos modes de fonctionnement et des outils d’intelligence collective car nos réunions sont toutes publiques et ouvertes aux visiteurs et visiteuses qui peuvent y assister (mais pas forcément y participer). Sur l’écologie, concernant notre alimentation ou la question de la sobriété énergétique, on montre également ce qu’il est possible de faire avec peu de moyens et des vertus écologiques, voire sociales ou démocratiques. Ça passe par nos projets dans le jardin, nos projets de bricolage ou de rénovation du bâtiment où tout est axé sur le faire soi-même, les low-techs1 et l’encapacitation individuelle.

Ensuite, nous essayons d’accompagner et de favoriser les transitions écologiques, sociales et démocratiques sur notre territoire. Ça passe par des projets avec les élu-es locaux, on travaille par exemple en ce moment sur le Schéma de Cohérence Territoriale (ScoT) du Centre Ouest Bretagne. On organise des consultations citoyennes sur ce plan qui est un document stratégique d’organisation de territoire sur 20 ans et la communauté de communes doit validé ce projet. C’est un document long et très complet avec du jargon administratif et juridique et donc on organise des séances où on lit ensemble le document, on explicite les termes compliqués, on apprend nous même en le faisant et on anime ces échanges là. L’enjeu est de comprendre le document afin d’avoir les clefs pour pouvoir y réagir.

On participe également à un groupe d’entraide qui fonctionne bien et qui s’est créé peu de temps après notre installation : le « groupe du dimanche ». Ce groupe réunit des personnes, sur un rayon d’une trentaine de km, qui se retrouvent une fois par mois pour échanger leurs besoins, envies et services sur le territoire. Nous participons à ces rencontres et je m’implique notamment dans le groupe de travail de facilitation de ce groupe afin de le dynamiser.

Nous faisons également de l’accueil et la préparation de stages sur le lieu. Pour le moment nous organisons nous même deux types de stage : de low tech et de permaculture. Ces stages nous permettent de transmettre ce qu’on a appris et qui fonctionne, et pas que chez nous mais ce sont des éléments de notre lieu de vie. Grâce au stage, au-delà de l’inspiration par l’exemple, cela nous permet de passer dans une dynamique de transmission de ce qu’on fait et ce qu’on sait. »

Cohérence : « Qu’est-ce qui selon toi marche le mieux pour toucher plus de monde ? »

Simon : « C’est difficile à dire car on a parfois du mal à mesurer l’impact qu’on a. J’ai l’impression que les stages et les immersions via l’accueil ça marche bien. Pour l’accueil il y a des gens qui viennent nous voir pour découvrir un truc et souvent on fait parti d’un circuit de ces personnes qui visitent d’autres éco-lieux alors qu’un stage les gens viennent rechercher un savoir précis avec souvent la volonté de l’appliquer directement. Le point commun de ces deux choses c’est que l’immersion marche vraiment bien pour faire évoluer les personnes, faire changer de posture car même si ce n’est jamais parfait on fait une démonstration par l’exemple. D’être en situation dans un lieu qui a des low tech, qui fonctionne en gouvernance partagée, ça permet de les voir fonctionner, de voir leurs apports et leur richesse. Et ce n’est vraiment pas la même chose que de voir une conférence, lire un article, regarder une vidéo… Ce qui touche vraiment les gens c’est qu’on propose des choses fonctionnelles. Par exemple manger végétarien tous les jours ça paraît inaccessible pour beaucoup de gens. Quand on voit le poids d’un régime alimentaire carné vis-à-vis d’un régime alimentaire végétarien sur les émissions de CO2 individuel il y a un vrai enjeu à montrer qu’on peut manger bien et sain en étant végétarien. C’est quelque chose auquel on est super attachés et on fait attention à proposer quelque chose qui donne envie. C’est plein de couleurs, avec des produits de saison… On mange beaucoup de choses de notre jardin, c’est super inspirant et ça nous réjouit beaucoup (hier soir 75 % de notre assiette venait de notre jardin). Ça nous fait réaliser que ça vaut vraiment le coup de mettre de l’énergie dans le jardin. Concernant les low tech on a de tout : des trucs qui fonctionnent bien et qu’on utilise, des choses qu’on a plutôt en « vitrine » et d’autres qui ne marchent pas forcément. On met en avant ce qui marche bien : la marmite norvégienne qui permet de cuisiner en consommant beaucoup moins d’énergie ; les panneaux solaires« low tech » qui permettent de chauffer l’eau en diminuant notre consommation d’électricité (système hybride chaudière à bois, solaire en low tech & électrique si besoin en complément). Le troisième truc qui marche bien c’est qu’on a des vélos donc on peut proposer aux gens d’aller faire des balades à vélos, on ne réinvente rien mais donner la possibilité ça encourage les gens à aller vers une forme de mobilité douce. On a un petit atelier vélo avec de quoi les réparer.

Et le fait d’avoir des regards extérieurs ça nous aide à avancer. Ces personnes qui viennent nous disent ce qui marche mieux ailleurs quand on propose quelque chose qui ne marche pas très bien (ça nous arrive aussi!). »

Cohérence : « L’accueil est donc au centre du projet Bascule Argoat, comment est-ce que ça fonctionne pour bien accueillir aussi souvent ? »

Simon : « C’est Ce qui facilite l’accueil chez nous c’est notre système de « boussolage » : les visiteur-euses qui viennent à la maison notamment pour les semaines de découverte, on les appelle les «explorateur.ices». Et un-e bon-ne explorateur.ices se doit d’avoir une bonne boussole. Donc chaque personne qui arrive a une « boussole », c’est une personne qui va lui donner le meilleur cap en fonction de son intention. Il y a une première prise de contact au téléphone ou par mail, en amont de la venue, afin de se présenter et de comprendre au mieux l’intention de la personne pour sa venue afin de mieux la guider dans son séjour. Ensuite quand la personne est sur place, sa boussole est son point de contact privilégié vis à vis du groupe (même si les personnes du reste du groupe peuvent être sollicités bien évidemment). La boussole est référente pour certains sujets en particulier, par exemple, si la personne veut étendre son séjour (c’est sa boussole qui va amener la demande au groupe). Pour faciliter les accueils on a aussi des phases ou temps qu’on appelle d’« inclusion » et de « déclusion ». Donc côté inclusion c’est le moment où la boussole explique comment fonctionne la maison, qui y vit, ce qu’il va se passer pendant le séjour. Et pour le temps de déclusion c’est un temps de bilan avec la boussole pour savoir si la personne a nourri ses intentions, ce que la personne a apprécié ou moins bien vécu puis dans ce temps il y a a aussi une discussion autour de la participation consciente. C’est un modèle économique où on rend visible nos charges, nos besoins, nos investissements éventuels par rapport à ce qu’il se passe (combien coûtent le chauffage, la nourriture, les temps d’accueil…). En face de cette présentation les personnes peuvent contribuer de plusieurs manières (en compétences, en partage, temps, argent, etc…). On a mis un espace pour reconnaître la participation non financière des personnes. On a aussi une culture d’affichage pour fluidifier l’accès à l’information pour les personnes en visite : il y a plusieurs endroits où il y a les informations qui sont un peu partout dans la maison. Par exemple en cuisine des éléments pour guider les personnes (ce n’est pas forcément évident de cuisiner pour beaucoup quand on a pas l’habitude), notre raison d’être et intention de lieu sont affichées dans le couloir, il y a le tableau des participations conscientes, les agendas de la semaine et du mois, les différents lieux autour et où sortir, les marchés, les distances à vélos avec les lieux autour et le tableau d’autogestion des tâches (qui permet d’auto-organiser la vie quotidienne avec les tâches telles que la cuisine, ménage, poules…) où les personnes s’inscrivent à leur convenance. »

 

Cohérence : «Comment est-ce que vous vous connectez à d’autres lieux engagés ? »

Simon : « Bascule Argoat fait parti de l’archipel de la Bascule qui est notre communauté associative, c’est un modèle d’organisation inspiré des écrits d’Edouard Glissant.*1 Bascule Argoat est une île dans un archipel de 5 îles de la Bascule. Nous avons une vision commune, cette orientation autour des transitions et de faire bouger les choses en ce sens mais avec des modes d’action différents. Il y a une île du côté de Rennes qui est plus dans une expérimentation de modèle économique et d’entreprenariat alternatif. En Bourgogne il y a un lieu beaucoup plus tourné vers l’accueil, avec beaucoup plus d’espace pour cela. Il y a une autre île itinérante qui fait de la formation sous forme d’éducation populaire. Et l’un des éléments sur lesquels Bascule Argoat participe activement c’est la recherche de nouveaux lieux. Je pense que ce qui marche le mieux c’est de créer des îles, des ports, des points de contact, des lieux de rencontre et d’expérimentation. Je peux pas donner d’exemple très précis mais on a pas mal de pistes de lieux qui pourraient accueillir d’autres îles plus tard. On est également en contact avec d’autres collectifs pour éventuellement former des regroupements mais aussi avec des Mairies, avec des privés. Des personnes ou des groupes qui cherchent des accompagnements pour créer des collectifs, qui cherchent l’inspiration ou des outils et donc on essaye d’alimenter ces dynamiques de lieux (tiers-lieux, éco-lieux…) car on croit beaucoup dans la force de ces lieux comme points de repères, les îles pour trouver des ressources,… Le fonctionnement de l’archipel se fait par un comité avec des représentant-es de chaque île qui se réunit une fois par mois. Cette réunion est la plupart du temps en format « cockpit », pour garder le lien avec un état d’avancement des différents projets. Pour le moment notre objectif commun est de resserrer les liens entre les projets qui sont éloignés géographiquement. On a mis en place une rencontre tous les 3 mois entre les différents projets pour se retrouver, qu’on appelle « les 4 saisons de la Bascule ». Et on essaye d’alterner les lieux, quand on se retrouve c’est festif, se rencontrer, se retrouver… et c’est aussi des ateliers sur comment trouver d’autres lieux, comment dépasser le cercle des convaincus, comment avancer ensemble, homogénéiser nos pratiques… ou des ateliers du sensible et corporel pour se connecter autrement à l’autre. »

1 La Low-Tech est l’ensemble des technologies qui ont pour caractéristiques leur simplicité de mise en œuvre, leur accessibilité (aussi bien technique que matérielle ou financière), leur réparabilité et leur durabilité.

2 https://la-bascule.org/larchipel