En balade au fil du Jarlot

Dans le cadre du Festisol à Morlaix, une balade à la découverte du Jarlot était organisée, proposée par des bénévoles de l’association Eau et Rivières de Bretagne. L’occasion de découvrir sous un jour nouveau cette rivière qui fait partie du quotidien des morlaisien.ne.s. Reportage

Le rendez-vous est donné en haut du Parking du Pouliet, près du centre des impôts, à Morlaix. Après les pluies des jours précédents, le soleil est avec nous pour cette après-midi, sous le signe de l’eau. Accompagnés de Dominique Poupon et Jean-Jacques Lohéac, deux bénévoles de l’association Eau et Rivières de Bretagne, nous allons partir à la découverte du Jarlot, l’une des rivières emblématiques de Morlaix. Longue de 21 kilomètres, elle prend sa source à Plougonven, et rejoint le Queffleuth, pour former le Dossen, alias la Rivière de Morlaix. L’un des affluents du Jarlot est le Tromorgant.

Le petit groupe que nous formons (une dizaine de personnes) commence à cheminer. Direction « la station de pompage de l’eau », annonce Jean-Jacques. L’occasion d’emprunter l’ancienne voie ferré devenue Voie Verte, et de passer aussi devant les Jardins Solidaires, créés par le Comité de Chômeurs de Morlaix. Le Jarlot s’étire sur notre droite, alors que nous longeons les locaux des Chiffonniers de la Joie, par derrière.

Après quelques minutes de marche, nous arrivons auprès de la station. C’est ici que les eaux de la rivière sont pompées pour obtenir de l’eau potable. Eh oui, l’eau du robinet à Morlaix provient du Jarlot ! (Après traitement pour potabilisation bien évidemment) « Ici sont extraits entre 6000 et 8000 mètres cubes par jour », détaillent Dominique et Jean-Jacques. L’eau est ensuite traitée par l’usine du Pillion, à Plourin-Les-Morlaix. Nous nous approchons de la station, en la surplombant depuis une petite passerelle en fer. Cela nous permet aussi de remarquer aussi la présence d’un bief, signe qu’un moulin était présent sur le secteur autrefois.

La station de pompage à gauche au fond.

La première escale est finie. Nous repartons, cette fois vers le parking du Pont Noir, sur la commune de Plougonven. A pied pour les plus motivés, en covoiturage pour les autres. Cette fois, nous allons suivre et remonter la rivière au plus près, à partir du Moulin de l’Ermitage, rejoint après avoir emprunté une portion de la voie verte n°7, ancienne voie de chemin de fer qui reliait Morlaix à Carhaix. Arrivés à l’ancien moulin à papier aujourd’hui détruit, nous filons sur un chemin qui surplombe le Jarlot. Les berges ayant bénéficié d’un débroussaillage par l’AAPPMA (Association de Pêche et de Protection du Milieu Aquatique) de Morlaix, nous pouvons nous aventurer sur celles-ci. Après avoir pris soin de descendre sans glisser malgré le sol boueux, nous voilà sur le bord de l’eau. Le débit du Jarlot semble bon. Le bruit de l’eau tinte à nos oreilles. C’est parti pour une marche de plusieurs kilomètres, au plus près de l’eau.

L’occasion d’admirer quelques plantes aquatiques, mais aussi des peupliers ou encore des plants de grand carex qui peuplent les berges. Pas de poissons à l’horizon, mais nous tombons sur des traces laissées par des sangliers qui ont remués la boue. Un héron se laisse également admirer, volant au-dessus de la forêt. Nous sommes entourés de végétation, au bord de l’eau. L’occasion de prendre un bon bol d’air frais et de profiter de la bienfaisance des arbres, du bruit apaisant de la brise et du Jarlot, qui prend par endroit des allures de rivière sauvage.

Après quelques kilomètres, nous arrivons au terme du parcours, au Moulin Marrant. Il est temps de faire demi-tour et de repartir vers le Pont-Noir, cette fois ci par la Voie Verte, chemin plus facile d’accès. Chacun.e semble ravi.e d’avoir pu participer à la balade qui nous a permis de découvrir le Jarlot sous un jour nouveau, grâce notamment au travail fourni par les bénévoles des associations locales.







A Morlaix, une conférence-débat pour repenser nos liens au vivant… là-bas et ici

Organisée dans le cadre du FESTISOL – le Festival des Solidarités dont le thème est « Environnement et droit des peuples », cette conférence-débat qui se déroulera à la MJC de Morlaix dans la soirée du mercredi 20 novembre, invite le public à découvrir les liens entre les droits des peuples autour de l’eau ainsi que leur influence dans le verdissement du droit international et son évolution vers la reconnaissance d’un droit à un environnement sain.

Avec un voyage qui commencera aux points perdus de la planète, où des peuples originaires font entendre leurs voix aux plus hautes sphères dans les cours régionales de droits de l’Homme. Il s’agira de plonger dans les droits culturels des peuples dans une perspective basée sur leur approche de la nature environnante – leurs montagnes, leurs rivières, la mer et la façon dont ces éléments ont façonné leurs styles vie -. Le besoin de les protéger comme une entité à part entière, donne les premières bases de la reconnaissance des droits de la nature.

Il s’agira ensuite d’aborder les droits culturels liés à la Bretagne et à ses rivières, illustrés par les « Atlas socioculturels de l’eau » (1) de l’association Eaux et Rivières de Bretagne. Le Collectif Mammennou Doùr dans les Abers viendra aussi témoigner de la Marche qu’il a organisée au printemps dernier, de la Source de l’Aber Wrac’h jusqu’à l’embouchure au cours de la dernière semaine de mai. Un parcours qui a laissé toute sa place au sensible (2)…

Quel est le lien qui nous unit à nos cours d’eau, là-bas et ici ? Comment nos identités culturelles et modèles de société sont-ils travaillés par nos relations au vivant ? Comment les luttes pour la sauvegarde de l’eau et des rivières se sont technicisés au fil du temps ? Comment valoriser nos savoirs ancestraux, peu considérés dans les instances de gestion de l’eau ? Comment ces sujets sont-ils pris en compte en tant que sujets de gouvernance, enjeux de démocratie environnementale ?  Le droit et la loi : sont-ils les meilleurs moyens de les préserver ?

Une soirée riche en témoignages et questionnements de militant·es, avec les éclairages : d’une juriste en droit international de l’environnement : Veronica Gomez (Ligue des droits de l’Homme/LDH), de Aurélie Besenval, chargée de mission « Eau & culture » à l’association Eau & Rivières de Bretagne, de Marie-Laure Floch et Joëlle Colombani du Collectif Mammennou Doùr. Les échanges seront animés par Marie-Emmanuelle Grignon et Laurence Mermet pour Eco-Bretons.

(1) https://www.eco-bretons.info/atlas-socioculturels-de-leau-faire-comprendre-que-la-culture-fait-aussi-partie-du-dialogue-environnemental/

(2) https://www.eco-bretons.info/dans-les-abers-des-rencontres-de-leau-sensibles-avec-le-collectif-mammennou-dour/




A Morlaix, des frites bio, locales, et à vélo !

« On perd pas l’nord », c’est le nom de la friterie itinérante à vélo qu’on verra bientôt sillonner les routes de Morlaix et ses environ proches. Au guidon : Clément De Larochelambert et Léa Lateur, deux ch’tis qui veulent faire (re)découvrir les frites, la fricadelle, la flammiche…à base de produits locaux et bios. Réduction des déchets, réutilisation de matériaux, mobilité douce, inclusion du public…sont aussi au menu.

Des frites, des frites, des frites ! Et surtout des bonnes. C’est parce qu’ils voulaient retrouver le goût de leurs chères frites du Nord que Léa et Clément, deux ch’tis habitant désormais dans le Finistère Nord se sont lancés dans un projet original : la création d’une friterie itinérante, à vélo. « Tout est parti d’une blague » rembobine Clément. « On s’est dit que puisque les frites nous manquaient, on n’avait qu’à créer notre propre friterie ! Mais avec nos valeurs : ouverte au plus grand nombre, éthique, bio, locale ». Un projet qui s’inscrit aussi en parallèle à celui-ci de tiers-lieu, porté par le collectif Joyeux Chahuts, auquel Clément et Léa appartiennent.

Baptisée « On perd pas l’ Nord », la friterie du duo sillonnera le territoire de Morlaix et des communes proches. Il y aura quatre point de vente : deux le midi, et deux le soir, à Morlaix, Plouezoc’ch et Plougasnou. « Pas trop loin, car on sera à vélo ! », rappelle Clément. On pourra aussi retrouver la friterie sur des événements locaux, une fois par mois dans l’idéal.

Côté menu, les deux nordistes vont proposer des frites, avec des pommes de terre de variété Maiwenn, en bio, issue de la production locale de la ferme « Savez-vous planter des choux », de Saint-Pol-de-Léon. Elles seront cuites grâce à de la graisse végétale, et non à partir de graisse de bœuf, comme c’est le cas traditionnellement. On trouvera également, outre des soupes et salades bios, des plats du Nord telles que la flammiche au maroilles ou encore la fameuse fricadelle en version végétarienne. « Pour celle-là, on va travailler avec la boulangerie des Cent Marches à Morlaix, qui va nous fournir du pain invendu », précise Clément. Limiter les déchets est aussi l’un des objectif de la friterie : on pourra venir avec son propre saladier, et bénéficier d’une remise de 5% sur le tarif. Les équipements utilisés dans la friterie seront également de seconde main. Le duo n’oublie pas non plus la sensibilisation du public. « On va essayer de se poser dans des endroits où il pourrait y avoir aussi des animations, par exemple près de la bibliothèque du quartier de la Boissière. On peut imaginer des ateliers autour de la réduction des déchets, avec d’autres acteurs ».

Et pour la circulation de la friterie ? Léa et Clément utiliseront leurs guiboles et leurs vélo. Une carriole sera accrochée derrière, réalisée suivant un modèle de châssis développé par l’association ligérienne Véloma. La structure sera fabriquée à base de matériaux de récupération ( bois, inox…), en compagnie de la recycleie Le Repair, basée à Pleyber-Christ. « Et on travaille aussi à la conception avec Roold, atelier basé à Saint-Thégonnec, qui récupère des vélos hors d’usage et réutilise les cadres pour en construire de nouveaux », développe Clément.

Avant de se lancer sur les routes du secteur de Morlaix avec leurs frites et autres fricadelles, Clément et Léa ont lancé un financement participatif sur le site breton Kengo. Objectif : collecter des fonds pour le démarrage de leur activité, prévue pour décembre : achat et montage du châssis de la carriole, achat des matériaux pour la fabrication, aménagement de l’espace….

Pour apporter sa pierre (ou sa patate) à l’édifice (ou à la friterie), c’est par ici : https://kengo.bzh/projet/4762/on-perd-pas-lnord




Sur le Pays de Morlaix, Le Buzuk lance de nouveaux billets

Depuis 2016, le Buzuk, monnaie locale citoyenne, circule dans le Pays de Morlaix. Après 8 ans d’utilisation, l’association qui développe le projet souhaite imprimer de nouveaux billets, dont un billet de 29 buzuks, en hommage au Finistère. Un financement participatif est lancé.

Depuis octobre 2016, on peut régler ses achats dans le Pays de Morlaix avec des billets de Buzuk, dans les commerces qui l’acceptent. La monnaie locale lancée il y a maintenant huit ans poursuit son chemin, et compte aujourd’hui 1200 familles, associations, entreprises ou collectivités utilisatrices. 800 000 Buzuks ont ainsi été dépensés sur le territoire. 162 000 euros ont été échangés pour des Buzuks au cours de l’année 2023. Une bonne nouvelle pour l’équipe de bénévoles qui travaille d’arrache-pied pour développer cette monnaie locale, accompagnés par Nicolas Makeiew, le salarié de l’association.

Mais voilà, au bout de huit années d’utilisation, les billets, sécurisés, commencent légitimement à vieillir, et donc a être retirés de la circulation. Il va falloir en réimprimer ! C’est pourquoi la monnaie locale lance un financement participatif spécial, via le site HelloAsso, et le fonds de dotation SDH (Solidarité pour un Développement Humain), qui permet la défiscalisation des dons à hauteur de 66%.

Grâce à cette campagne, l’association espère récolter au moins 3000 euros, qui serviront à rémunérer la graphiste (qui a oeuvré sur les précédents billets), et à payer l’impression des devises, ainsi que les frais de communication pour le lancement.

Nouveauté pour cette édition 2024 : la création d’un billet de « 29 buzuks », en hommage au département du Finistère. Une façon aussi pour le Buzuk de démontrer concrètement « que la monnaie est une convention sociale, qui peut (et devrait !) être modifiée, pour l’intérêt général et le bien commun. » « Et en plus, ça nous permettra de travailler notre table de 29 en l’utilisant pour payer ! », ajoute l’association sur un communiqué.

A noter aussi si les finances le permettent, l’introduction du breton sur les billets !

Alors, si vous voulez travailler votre calcul mental, votre pratique de la langue bretonne, et utiliser une monnaie qui aide à relocaliser les échanges, sans spéculation financière, vous pouvez contribuer au financement des nouveaux billets ici : https://www.helloasso.com/associations/solidarite-pour-un-developpement-humain-sdh/collectes/buzuk-campagne-2024

A découvrir en vidéo, le fonctionnement du Buzuk et le but du financement participatif :


La Bretagne fête ses monnaies locales le 12 octobre

Le samedi 12 octobre, douze monnaies locales de Bretagne historique organisent, chacune sur leur territoire, une grande journée de fête.

Le Buzuk propose dans ce cadre une conférence participative « Argent et climat : nos comptes à rebours ? », au Stal Café, à Plounéour-Menez, à 16h.

Dans le reste de la Bretagne, on pourra retrouver des animations à Saint-Malo-De-Guersac (44) avec les monnaies locales « Le Rozo » et « Moneko », à Lorient (56) avec « Le Segal », à Questembert (56) avec l’Ourse, à Louvigné-du-Désert (35) avec La Galette, dans le Trégor (22) avec Le Pezh…

Tout le programme est disponible sur la page Facebook de l’événement




A la « Manu » de Morlaix, ce que les artistes font aux Jardins, ce que les Jardins font aux artistes

Montage photos de : Gérard Rouxel, Laurence Mermet, Ximena de Leon Lucero, Jacqueline Ledoux, Elise Hallab.

Le premier volet de ce triptyque d’articles consacré à la renaissance si singulière des Jardins de la Manufacture des tabacs de Morlaix, se focalisait sur celui qui en a la charge, Tiphaine Hameau, « un humain du sensible et du geste compagnon de la plante ». Se présentant avec justesse comme artiste-jardinier nourri par l’Arte povera et le Land art, il lui tient à coeur de proposer à d’autres artistes d’entrer en dialogue fécond avec les Jardins sous différentes formes : résidences, expositions, spectacles.

Réalisé avec le concours et la plume de Tiphaine Hameau ainsi que celles des autres artistes que ce 2ème volet vous invite à découvrir. Deux d’entre elles sont en sortie publique de résidence du 25 au 29 septembre 2024.

Volet 2 – Parmi les artistes que les Jardins de la Manufacture accueillent, le photographe Gérard Rouxel, la graveuse/dessinatrice Ximena De Leon Lucero et la plasticienne Elise Hallab. Les deux premiers vivent à Morlaix et co-animent COURANTs D’ART dans une ancienne tannerie de Plourin-les-Morlaix où se déroulent expositions et ateliers partagés.

Gérard Rouxel travaille en immersion dans différents lieux pour saisir l’invisible, ce que l’on ne définit pas mais qui constitue l’esprit des lieux. Très touché par ses rencontres au fil des saisons avec Tiphaine Hameau et les Jardins, le photographe y est intervenu à plusieurs reprises ces dernières années.

Entre novembre 2021 et mai 2022, dans le cadre d’un projet d’éducation artistique et culturelle (EAC) proposé par l’association Les Moyens du bord, avec Ximena De Leon Lucero, il a accompagné les élèves de deux écoles primaires locales… En-quête(e) de lumières(s)*.

Gérard Rouxel a ainsi initié les élèves de l’école publique bilingue (français-breton) Jules Ferry de Saint-Martin-des-Champs, à l’art subtil de saisir l’ombre et la lumière dans les Jardins de la Manufacture : « Au-delà de l’apprentissage de la photographie, les élèves capturent les images qui parlent à leur sensibilité, à leurs cinq sens. C’est un travail sur l’imaginaire et l’invisible », confiait-il à Ouest-France**. Et quels lieux plus sensoriellement inspirants que ces Jardins !?!

Photo : Les Moyens du bord

Puis en Juillet 2023, dans le cadre d’une sortie de résidence qu’il nous présente ci-dessous, le photographe a fait découvrir ses images sur les murs de la Manufacture, marqués par les traces du temps et plus surprenant, en terrarium, c’est-à-dire des bocaux fermés dans lesquels les photos cohabitent et co-évoluent avec le substrat végétal également présent.

De son côté, Ximena De Leon Lucero pratique la taille douce sur cuivre, le monotype et le dessin. Le plus souvent elle mélange le trait puissant et net du burin à celui sensible et doux de la pointe sèche. Si le projet EAC** de découverte de la gravure qu’elle a mené avec les élèves de l’école publique bilingue morlaisienne Poan Ben ne les ont pas conduit.es jusqu’aux Jardins de la Manufacture, ce n’était que partie remise puisque Ximena y oeuvre actuellement, avec une autre artiste, Élise Hallab.

Leurs résidences que la plume de Tiphaine Hameau nous décrit maintenant, s’appuient pour chacune sur un temps de recherche, d’expérimentation, de restitution puis de médiation. Leurs réalisations seront visibles par le public du mercredi 25 au dimanche 29 septembre de 15h à 19h30. Un temps de rencontre avec Élise le mercredi 25 de 16h à 19h puis avec Ximena le vendredi 27 de 16h à 19h.

« Dans les ombres du jardin (se balade une chèvre…) »

La résidence de Ximena De Leon Lucero repose sur deux axes de recherche : les ombres, comme le cliché d’un instant figé et, d’autre part, les traces sur l’écorce des arbres du jardin.
Le présent du jardin : les ombres, dans leur instant de vie éphémère. Attraper l’expression d’un instant, de capter une « pose » de la nature dans le plus haut de sa force, dans un moment d’apogée lumineux, comme le « Mié » dans le Kabuki japonais. L’âme d’un instant précis, à un moment précis, dans un lieu précis et emblématique du jardin : l’abri de son gardien. Pour ce faire : du papier d’essences naturelles (Aguagami – kitakana – kizuki) et des crayons…

Photos Ximena De Leon Lucero : Janvier 2024_ombres Graphite sur papier Japon – Mai 2024_écorce Graphite sur papier japon

« Le passé du jardin : il était une fois une chèvre, gentille bête qui, grâce à son appétit féroce, dévora les ronces d’un verger abandonné. La chèvre permit de renouer avec la plénitude de
l’espace, on put l’arpenter à nouveau, on doit beaucoup à la chèvre. Hélas, c’est aussi la chèvre qui, dans son appétit féroce, blessa malencontreusement et fatalement de nombreux arbres.
Comme un retour des choses, qui voudrait que des éléments partent pour que d’autres prennent place à leur tour, des moulages de troncs rongés, des « gravures sur arbres », des impressions et des objets, tenteront de garder le passage de l’animal et la trace de ce temps qui fut. »

Couleurs des plantes invasives et d’autres de la saison d’été

Élise Hallab, qui n’est pas une inconnue pour Eco-Bretons***, vit et travaille à Nantes aux Ateliers Bonus.
Après avoir effectué ses études d’art entre Brest, Nantes et Bruxelles, elle poursuit ses travaux en édition et sérigraphie. Depuis 2015, elle explore les potentialités des encres naturelles en sérigraphie à partir de cueillettes et de collectes de végétaux. Ses travaux artistiques collectifs ou personnels questionnent les notions de paysage, de couleur et de saisonnalité en relation avec la matière première. L’artiste avait notamment fait pousser des plantes tinctoriales dans le jardin solidaire de Morlaix, au cours de l’été 2022, pour en extraire le jus servant à fabriquer ses encres.

Sa résidence actuelle dans les Jardins de La Manufacture s’inscrit en regard du travail de Tiphaine Hameau concernant le rangement des déchets organiques et l’organisation des espaces, le dessin du jardin et parfois la géométrie ; mais aussi par l’aspect patrimonial du jardin et de recherches autour du lin morlaisien. En effet, sa démarche artistique consiste, en arpentant le paysage, à glaner au gré des saisons feuilles, fleurs, fruits, écorces, matériaux utilisés pour la fabrication des couleurs. À partir de ses récoltes, le jus coloré obtenu est travaillé pour être utilisé comme encre de sérigraphie ou comme bain de teinture.

Photos Elise Hallab : composer, cueillir, lire

Si la démarche de Tiphaine Hameau entre en belle résonance avec la volonté de Morlaix Communauté d’accorder une place particulière aux artistes contemporain.es dans les Jardins de la Manufacture des Tabacs, elle n’est pas sans poser un problème inédit à cet écrin de nature. En effet, la qualité du programme d’interventions artistiques proposées*** conjuguées à la magie du lieu, ont pour conséquence d’attirer de plus en plus de monde, au point qu’il s’agit de trouver un équilibre entre la nécessaire quiétude des vivants non-humains de ces Jardins et la volonté de faire découvrir ses trésors vivants, ce par l’instauration d’une jauge de participant.es. Gageons que, de mieux en mieux renseigné, le public saura pratiquer l’art de la patience, si chère aux jardinier.es.

Prochainement : le 3ème et dernier volet de ce triptyque consacré aux relations qu’entretiennent avec les Jardins les étudiant.e.s de BTS gestion et protection de la nature du lycée de Suscinio de Morlaix dans le cadre de leurs projets.

* https://lesmoyensdubord.fr/en-quetes-de-lumieres-ximena-de-leon-lucero-gerard-rouxel/

** https://www.ouest-france.fr/bretagne/morlaix-29600/en-images-en-quete-de-lumieres-dans-les-jardins-de-la-manu-a-morlaix-7baa6392-ab63-11ec-859a-5b04fa3130a0

*** http://www.eco-bretons.info/elise-hallab-ou-quand-lart-se-mele-au-vegetal/ ET http://www.eco-bretons.info/encres-vegetales-aux-couleurs-subtiles-pour-latelier-serigraphie-de-elise-hallab/

**** Avec les rencontres estivales Station verger, entresort sonore, manuel, ludique et poétique du collectif Les Aimants et Les monologues en plein champ, lecture-promenade musicale de l’écrivaine-comédienne Stéphanie Tesson accompagnée par Olivier Depoix/accordéon, et Emmanuelle Huteau/clarinette-tuba-chant qui ont enchanté les participant.e.s.


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Portrait de femme n°18 : Flavie Despretz : L’art de faire ensemble

Flavie Despretz est une bretonne pure souche, baignée dans les objets bruts depuis toute jeune. Le monde du recyclage a toujours fait partie d’elle. C’est tout naturellement qu’il a perduré à l’âge adulte. Et quoi de mieux que l’artisanat d’art pour l’exprimer, le montrer et le faire vivre.
« C’était une évidence […] nous avons tellement de matières intéressantes dans nos poubelles, tellement de choses qui sont là et que nous jetons ».
De la construction de cabanes dans les bois, aux luminaires avec des morceaux de canettes et de vieilles bandes de cinémas, le travail de la matière l’interroge.
Travailler les matériaux, les faire vivre de nouveau dans un environnement, questionner nos pratiques, nos habitudes. C’est dans cet objectif que Flavie a créé l’événement « La Balade Artistique »
.

« Le projet est de faire sortir l’art […] que les gens se ré- émerveillent de nos paysages
et de notre environnement ».

Plus d’une quarantaine d’artistes étaient présents le dimanche 19 mai 2024 à Carantec dans le Finistère. Le concept de la balade est de présenter une prestation artistique (tableaux, danse, land- art, sculptures…) en symbiose avec le littoral de Carantec. Pour que tous et toutes puissent découvrir l’art au-delà d’une galerie ou d’une exposition fermée.

Tableaux de Noelle Irvoas, photographie de Sophie Sanchez, Balade Artistique Carantec, 2024.

Lors de cette journée, Flavie a créé une œuvre souhaitant refléter la montée des eaux et la fragilité du littoral. « La commune de Carantec fait partie du littoral en danger […]Il est important pour moi de le montrer et de replacer l’humain face à la nature », rappelle Flavie.

Imaginez-vous d’ici trente ans, vous baigner dans le sable, comme si de rien n’était, car nous n’aurons pas changé nos habitudes face au dérèglement climatique. C’est l’idée que Flavie a souhaité montrer à travers ses œuvres saugrenues sur la plage du port de Carantec.
« C’est une reconnexion : de se parler, de regarder ce qu’il se passe, voir ce que l’on peut faire ensemble. Le jeu est surtout de ne pas paraître effrayant, mais plutôt de passer par le comique et l’ironie ».

Baignade sur la plage. Flavie Despre, photographie @DilineGwen, Balade artistique Carantec, 2024

« Parler ou faire parler d’écologie par le rire et non par la peur »

Avec tout ce que l’on voit dans les médias, sur les réseaux sociaux ou à la télévision, Flavie se sert de l’art comme moyen d’expression, pour faire passer un message différent. Pour que les personnes se rassemblent et échangent face à l’absurdité.
« Les gens font comme si de rien n’était alors que l’on sait que nager dans le sable c’est une horreur […] tout va bien dans le meilleur des mondes », assure-t-elle.
Techniquement les œuvres sont en « plâtre du Marais » un mélange de plâtre et de chaux aérienne
avec un corps en filasse.
Flavie a choisi ce matériau pour sa légèreté et sa flexibilité. Cela lui a permis d’aller chez les personnes et de faire des moules sur mesure.

« Les baigneurs de l’absurde, œuvres de Flavie Despretz, Balade Artistique Carantec, Sophie Sanchez, 2024

Autre proposition, l’ours blanc sirotant son cocktail tout en scrutant l’horizon, sur le plongeoir
de la plage de la Grève Blanche, donne matière à réflexion.
Un message simple réalisé collectivement par les bénévoles et autres artistes -dont Flavie en est la
cofondatrice avec Léa Roussy- de la journée.
« Passé le moment de surprise et de rire, les gens parlaient spontanément d’environnement »
C’est donc cela l’art selon Flavie Despretz. Le faire ensemble par l’humour et par l’amour.

L’Ours de Carantec, Œuvre Collective, Balade Artistique, Photographie de Sophie Sanchez, 2024.

Propos recueillis par Sophie Sanchez.
Merci encore à Flavie Despretz pour son temps et son incroyable travail lors de la journée Balade Artistique Carantec.

Retrouvez le travail de Flavie
Sur son site internet :
https://flaviedespretz.wixsite.com/home
Et sur Instagram :
@flavieluminariste
@baladeartistique_carantec


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