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Quelques questions autour de l’Economie Sociale et Solidaire. Question 4 : et finalement si le choix du statut n’était pas anodin ?

Question 4 : et finalement si le choix du statut n’était pas anodin ?

La loi sur l’économie sociale et solidaire dans son article 1° alinéa II considère que le statut associatif, coopératif, mutualiste ou de fondation n’était plus une condition sine qua non pour faire partie de cette famille de l’économie. En soi cette précision n’est pas gênante tant il apparaît évident que le statut n’est pas protecteur de comportements déviants par rapport aux principes dont les entreprises de l’ESS se revendiquent alors même que spontanément d’autres entreprises, que rien n’obligent du fait de leur statut de sociétés commerciales, les appliquent avec enthousiasme. Toujours dans « Les Echos », qui décidément s’intéresse beaucoup à l’économie solidaire, on en trouve une illustration intéressante http://business.lesechos.fr/entrepreneurs/idees-de-business/familles-solidaires-une-start-up-modele-de-l-economie-sociale-et-solidaire-207097.php?xtor=EPR-21-%5Bentrepreneurs%5D-20160212-%5BProv_%5D-1681742%402 Familles solidaires : une start-up modèle de l’économie sociale et solidaire

En effet, voilà une entreprise  qui est un vrai projet collectif, qui a une vraie démarche solidaire, qui vise des objectifs incontestablement sociaux et qui dans ses statuts prévoient que les excédents doivent être majoritairement réinvestis dans des projets similaires. Le seul point qui a titillé ma curiosité c’est justement le statut juridique retenu, la société en commandite par actions. C’est effectivement un statut rarissime, moins rare toutefois que la société en commandite simple. La raison évoquée, l’indépendance par rapport aux bailleurs de fonds peut paraître surprenant. De fait, ce statut est le plus ancien des sociétés commerciales existant en Europe et fut même celui qui permit le développement du capitalisme à la fin du Moyen-Age, grâce aux capitaines et aux marchands qui les financèrent. Il convient également de noter que c’est le statut de l’entreprise qui fut longtemps l’archétype du capitalisme familial à la française, Michelin. Mais ces exemples ne valent peut-être pas modèle et peut-être qu’après tout l’obligation de réinvestir suffit à donner de la vertu à ce pacte entre commanditaires solidaires et commandités sociaux.




Quelques questions autour de l’Economie Sociale et Solidaire. Question 3 : tout ce qui est collaboratif est-il forcément solidaire ?

Question 3 : tout ce qui est collaboratif est-il forcément solidaire ?

En latin « laborare »  en Français « travailler » donne collaborer « travailler ensemble » puis collaboration et plus récemment collaboratif,

En latin « operare », en Français « travailler à » donne coopérer « travailler ensemble » puis coopération et coopératif.

Ainsi donc si les étymologies ont un sens économie collaborative et économie coopérative seraient, en quelque sorte, synonymes. Et pourtant, tous les jours les comportements et les modèles économiques des nouveaux loups garous de la mondialisation viennent contredire cette analyse. Mais la confusion est encore monnaie courante tant l’expression « économie du partage » ou « économie collaborative » a l’air de plaire. Dès lors tout projet qui peu ou prou fait intervenir le client comme acteur partiel du service qu’on lui rend devient collaboratif. Le mal ne serait pas grand si on se limitait à cette petite supercherie sémantique. Mais les choses se corsent lorsque des entrepreneurs en herbe revendiquent d’être « économique, social et écologique » http://www.entreprises.ouest-france.fr/article/application-ces-morbihannais-veulent-revolutionner-troc-grace-au-smartphone-10-02-2016-25430?utm_source=of-ofe_newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=20160211_local_votreNewsletter Application. Ces Morbihannais veulent révolutionner le troc grâce au smartphone

Parler de troc implique un échange non monétaire. Cela existe déjà en dehors de toute application informatique et de nombreuses associations développent des espaces de gratuité ou des armoires à troc où on vient déposer GRATUITEMENT un objet dont on n’a plus l’usage en espérant trouver en échange l’objet magique dont on a tellement besoin. On est ici dans l’économie du don et du contre-don où la réciprocité n’est pas systématique. Rien de tel dans une application dont l’idée de départ serait non pas de donner quelque chose mais d’acquérir quelque chose à moindre coût. Si tel était le modèle économique de cette application, ce ne serait qu’un avatar de plus de cette nouvelle tendance de l’économie conventionnelle à emprunter des valeurs de l’économie sociale et solidaire pour générer de la valeur au sens où l’entendent les économistes libéraux. Mais on commence à y être habitué. J’aimerai pourtant tellement être démenti par un projet de ce type.

 




Quelques questions autour de l’Economie Sociale et Solidaire. Question 2 : l’ESS est-elle forcément une aventure collective ?

Question 2 : l’ESS est-elle forcément une aventure collective ?

L’économie sociale et solidaire est composée d’entreprises, dont l’un des principes de base est la gestion collective. Cette caractéristique est en quelque sorte leur marque de fabrique. Mais qui dit entreprise dit forcément entrepreneur. Et c’est là qu’on retrouve l’une des questions qui traverse l’ESS depuis de longues années : une entreprise d’économie sociale et solidaire est-elle forcément  une aventure collective ? Il se trouve que, lors du salon des entrepreneurs, les entreprises  sociales et solidaires étaient à l’honneur. Ils ont même eu droit à un palmarès, un petit peu comme s’il existait une compétition au sein du social business http://business.lesechos.fr/entrepreneurs/idees-de-business/reussir-dans-le-social-conseils-et-temoignages-de-quatre-entrepreneurs-206905.php?xtor=EPR-21-%5Bentrepreneurs%5D-20160203-%5BProv_%5D-1681742%402 Réussir dans le social : conseils et témoignages de quatre entrepreneurs

Certes, la présentation de ces entreprises est impeccable. Le plan d’affaires semble carré, la vision du projet est nette et l’utilité sociale du service est bien mise de l’avant quoique sur un des lauréats, on pouvait se poser la question de sa place dans un tel palmarès tant le produit, un ordinateur-radiateur, s’il relève de l’innovation technologique ne porte pas en lui les germes d’une quelconque solidarité. Disons que c’était la caution écologique de ce palmarès puisque maintenant on ne peut parler d’ESS sans parler aussitôt de développement durable. Mais il y a quand même quelque chose qui cloche dans ce palmarès. Ce ne sont pas les entreprises sociales de l’année qui sont récompensées mais les entrepreneurs sociaux. Et cela est effectivement gênant. Même si à tour de bras, on nous parle de bénévoles (comme dans n’importe quelle start-up de la cantine numérique), de travail en équipe (comme dans n’importe quelle start-up de Californie),,il n’est question ici que de l’Entrepreneur avec un grand E comme s’il s’agissait d’un voyage individuel dans lequel des hommes (il n’y a en effet aucune femme dans ce palmarès) particulièrement charismatiques auraient entraîné d’autres dans un projet qui était avant tout le leur. Même si je veux bien admettre que l’impulsion est souvent le fait d’une personne, l’effort est collectif et il aurait été plus conforme aux principes de l’ESS qu’il y eût un palmarès des meilleures entreprises sociales. Mais il ne vous aura pas échappé  que ce palmarès est publiée dans « Les Echos », organe de presse dont les prises de position, parfois très ultra-libérales et très anti-sociales, sont connues et que la sélection des projet a été faite par un cabinet parmi les plus appréciés des milieux patronaux proches de ces thèses. Leur héros est l’individu, non l’équipe. Ceci explique cela.




Cette ferme, c’est tout un cirque !

« Ce qui réunit tout le monde ici, c’est la volonté commune de faire du spectacle », affirme Glenn, musicien de la compagnie Panik !. « Ici », c’est dans la ferme de Jean-Paul et Céline, à Sarzeau, dans le Morbihan. On y cultive les arts du cirque. Amendées par l’entraide, arrosées de bonne humeur, leurs terres ont vu germer un cabaret : le Hangar Saboté. Ce soir encore, touristes et locaux sont venus en nombre pour assister au spectacle de la Panik !, mais aussi profiter du lieu. Les derniers arrivés rejoignent la file d’attente de la billeterie-caravane, à quelques mètres de l’entrée du grand chapiteau. D’autres sont attablés depuis un moment, devant le bus-restaurant. Au centre du lieu se dresse une cabane ouverte, au toit ondulé, dans laquelle une moitié de 4L bleue est encastrée. C’est la buvette ! Derrière le comptoir, Marc est au service. « Je suis un très bon ami de la troupe, je file un coup de main selon ce qu’il y a à faire », explique-t-il. Présent sur le lieu pour toute la saison, Marc y travaille bénévolement, comme tout le personnel du cabaret. « Eté comme hiver, il y a vraiment plein de gens qui gravitent ici », se réjouit Latifeh, voltigeuse de la troupe.

 

La sciure remplace la dalle de béton

Sa rencontre avec Laura et Marine, à l’école de cirque équestre « Le moulin de Pierre », marque le début de l’épopée. En 2012, sorties de l’école, entourées de leurs deux chevaux et animées par l’envie de faire du spectacle, les filles décident de s’installer à Questembert, en Bretagne. « Marine est bretonne, elle avait des contacts dans le coin et savait qu’on pouvait y passer l’été avec nos chevaux et faire un petit spectacle », explique Latifeh. Séduits par la représentation, Jean-Paul et Céline proposent à la jeune troupe de se produire dans leur ferme, mettant à disposition un hangar à vaches inutilisé. « Sans la ferme, on n’en serait pas là, assure la voltigeuse. Ce qui est difficile avec les chevaux, ce sont les intempéries : quand il pleut ou qu’il fait froid, on ne peut pas répéter à l’extérieur », précise-t-elle.

Commence un chantier de rénovation de 4 mois : le hangar doit être aménagé pour l’accueil du public. Des amis et amis d’amis se joignent au projet et tout le monde met la main à la pâte. La dalle de béton est cassée et remplacée par de la sciure. Objets et matériaux sont récupérés pour décorer et meubler. Le Hangar Saboté est né. Pour financer le matériel et les travaux, la compagnie y organise ses premiers apéros-cirque en hiver. « Ce sont des scènes ouvertes où des copains, d’autres compagnies et nous-mêmes présentons des étapes de travail », explique Latifeh. Le public adhère à l’association puis vient, à prix libre, assister aux soirées. « On n’était pas encore très bien installés, il y avait des coupures de courant, mais les gens sont venus, fidèles au rendez-vous », ajoute la voltigeuse.

 

« On a l’âme voyageuse »

Un spectacle se dessine. La troupe, agrandie par Glenn, ainsi que Yann, acrobate à mobylette, décide de créer un cabaret pour l’été. Durant juillet et août, elle se produit deux fois par semaine et y invite une autre troupe chaque mercredi. « C’est la troisième année qu’on organise le cabaret », se félicite Glenn, en précisant que des apéros-cirque ont lieu régulièrement, le reste de l’année. Le projet à continué à évoluer au fil des rencontres, et aussi des contraintes. La troupe a ouvert un peu plus l’endroit en créant la ferme pédagogique. Les comédiens ont aménagé le lieu avec des habitats légers, des toilettes sèches et un potager bio. « Le lieu s’est construit autour d’un mode de vie dans lequel nous nous accordons tous, affirme Latifeh. On propose des menus végétariens à partir de produits locaux et la buvette est approvisionné par une brasserie et une cidrerie locales », ajoute-t-elle. L’acquisition d’un chapiteau, cette année, permet à la Panik! de se déplacer un peu. « Comme toute troupe de cirque, on a l’âme voyageuse, on veut jouer partout et pas seulement sur le territoire breton », confie Glenn. Mais pas question de déraciner le Hangar Saboté de ce haut lieu de fertilité artistique : « L’idée serait de partir en tournée à un moment donné, tout en continuant à faire vivre cet endroit », ajoute Latifeh.





« Petite école, grand avenir » : une journée d’échanges avec l’Institut de Silfiac

L’institut de Silfiac est un lieu qui s’est donné pour objectif de réfléchir à la crise de civilisation que connaît notre société : économique, environnementale, sociale, culturelle..Il ambitionne.d’être un lieu de rencontre et de débat ouvert à tous ceux qui s’interrogent sur les solutions à mettre en œuvre pour promouvoir un authentique développement durable et solidaire. C’est dans cette optique que depuis fin 2008, l’Institut organise des « journées de rencontres », permettant le débat entre le public et les spécialistes. De nombreuses thématiques ont ainsi été abordées : biodiversité, énergies renouvelables, action des citoyens, aménagement du territoire, crise économique bretonne, transition…

Ce samedi 27 février, la question de l’aménagement du territoire sera de nouveau abordée, sous le prisme de la question des écoles rurales. « L’objectif de la journée « petite école, grand avenir » est de tirer les enseignements des actions et réflexions des acteurs de la défense de l’école rurale et de l’option pédagogique des classes multiâges et, éventuellement, de les confronter aux positions officielles de l’Éducation Nationale. Enseignements dont nous montrerons la portée au-delà de l’école. », indique ainsi l’institut. Au programme : des interventions de spécialistes en matière de pédagogie et d’aménagement du territoire, ainsi que des présentations et témoignages d’initiatives concrètes (regroupement de petites écoles, mobilisation de la population contre la fermeture des classes…). A noter que la journée est co-organisée par l’Institut de Silfiac, le Snuipp (56, 22,29) (Syndicat National Unitaire des Instituteurs Professeurs des écoles et Pegc), avec la participation du collectif « Les enfants de Louise ».

 

Plus d’infos et inscriptions à la journée :

http://www.institutdesilfiac.org/

 




Quelques questions autour de l’Economie Sociale et Solidaire Question 1 La jeunesse est-elle l’avenir de l’ESS et réciproquement ?

Question 1 La jeunesse est-elle  l’avenir de l’ESS et réciproquement ?

Lors du salon entreprendre, il a été beaucoup question d’économie sociale et solidaire. C’est un signe qui ne trompe pas que nous sommes vraiment en crise car depuis que l’économie des pays européens va de crise en crise ce qui, hormis les temps de guerre et la parenthèse heureuse des Trente glorieuses, est quand même notre lot depuis près de deux siècles, toute période de crise s’est toujours traduite par une résurgence des valeurs de solidarité. C’est d’ailleurs au fil de ces poussées de fièvre que l’Economie Sociale et Solidaire s’est peu à peu construite et diversifiée. Il n’est donc pas étonnant que les jeunes se sentent une attirance pour ce concept, attirance d’autant plus grande que le concept restera flou dans leurs esprits http://place-publique.fr/Les-eleves-des-grandes-ecoles

Les élèves des grandes écoles rêvent d’économie sociale et solidaire De tout temps, la jeunesse a été plus généreuse que la génération précédente, autant par exaltation de l’âme que par méconnaissance des vicissitudes de la vie. Pourtant, pour avoir déjà vécu deux poussées fortes de prurit ESS, je dois admettre que c’est la première fois que je vois une attirance spontanée aussi forte. Les choses serait-elle en train de changer ? Je demande à voir. Il faut cependant bien reconnaître que cela va de pair avec un rapport au travail et à l’emploi qui lui aussi a changé. A force de leur seriner qu’elles et ils allaient devoir changer 10 fois de boîte et 20 fois de métiers dans leur vie, les jeunes autant par nécessité que par opportunisme développent une relation à l’entreprise sous toutes ses formes qui rompt radicalement avec la vision, ne serait-ce que de la génération précédente, celle qui s’est éveillé à l’économie avec l’Internet balbutiant des années 90. Aussi pensent-ils peut-être qu’une entreprise sans patron et au service de la collectivité acceptera plus facilement leur nomadisme professionnel, alternant les périodes d’activité productives, parfois très intenses, et les temps plus hédonistes du « prendre soin » de soi et des autres. Si cela était, sans nul doute, ces jeunes peuvent être l’avenir de l’ESS mais il faudra, avec eux, bâtir un nouveau modèle d’organisation et de gouvernance d’entreprise dans lequel la relation monétaire et les rapports de pouvoir seront radicalement différents de ce que nous connaissons, y compris dans nos entreprises de l’ESS. Mais d’un autre côté, comme le titre si bien Les Echos, il ne s’agit que des élèves des grandes écoles et de leurs rêves, ce qui limite singulièrement l’impact d’une telle étude. En effet, ces grandes écoles forment d’abord et avant tout des cadres, ce qu’on appelle le management. Or les palinodies qui ont secoué quelques fleurons de l’économie sociale « de papa » viennent justement du fait que ce management, bardé de concepts, s’est imposé dans ces entreprises au plus grand mépris des règles de gouvernance qui en avait fait l’originalité et la force. Et comme ces jeunes esprits n’avouent avoir qu’une idée approximative de ce qu’est l’ESS, peut-être trouveront-ils que finalement ces principes démocratiques et les règles d’équilibre des pouvoirs sont une contrainte à leur légitime aspiration à diriger (puisqu’ils sont encore formés à cela).

Mais comme la jeunesse n’est pas une classe sociale, juste une tranche d’âge, il est vraisemblable que les deux cas de figures apparaîtront. Et c’est aux dirigeants actuels de l’économie sociale et solidaire de repérer celles et ceux qui pourront contribuer à régénérer son modèle et éviter ceux qui à l’inverse continueront à le faire dégénérer.

Remarque subsidiaire : il n’est pas tout à fait anodin que cette étude soit publiée dans « Les Echos », organe de presse dont les prises de position, parfois très ultra-libérales et très anti-sociales, sont connues et ait été réalisée par un cabinet parmi les plus appréciés des milieux patronaux proches de ces thèses