#7 Portraits d’équipe : Laurence Mermet, secrétaire de l’association

Laurence Mermet est actuellement enseignante dans les lycées agricoles du Finistère, un métier qui lui apporte beaucoup. Femme affirmée, engagée dans ses choix personnels et envers les autres, Laurence a passé la majeure partie de sa carrière à côtoyer des militants écologistes : du côté civil et associatif comme du côté politique. De France Nature Environnement à Greenpeace en passant par le parti des écologistes, Laurence nous parle de son apprentissage, des valeurs qu’elle défend aujourd’hui et de ce en quoi elle croit.

Tu es secrétaire de l’association Eco-bretons, tu as également été présidente, si je ne me trompe pas, peux tu nous parler de ton histoire avec l’association ?

Je suis toujours dans la dynamique du CA de l’association. Mon histoire avec l’association a démarré au tout début, avec ceux qui avaient initialement porté le projet . Ils étaient venus me voir en me faisant part de leur intention et je trouvais que c’était une super idée de créer un média régional dédié au développement durable avec un statut associatif. Ce n’était pas gagné d’avance, mais je leur ai apporté un soutien ponctuel au début, plus fréquent ensuite.

Ton investissement dans des structures liées à l’écologie, à l’environnement, au développement durable, ne date pas d’hier. On peut dire que ça prend une grande place dans ta vie.

Adolescente j’étais déjà pas mal préoccupée par la question animale, nos rapports complexes et hélas de plus en plus insupportables avec les animaux. J’ai été végétarienne quelques années et abonnée à l’« Action zoophile », une petite feuille de chou antivivisectionniste. Je suis de nouveau végétarienne depuis 5/6 ans maintenant. Je constate avec espoir que cette problématique émerge avec force dans notre société depuis quelques années.

Ensuite j’ai fait des études qui m’ont conduite aux métiers de l’information et de la communication et mon premier boulot, c’était dans un groupe pétrochimique, au service communication, j’y avais effectué un stage. Il s’agissait de faire de la comm’ sur la pétrochimie, les produits organochlorés, la belle chimie, magnifique ! A un moment donné, il était question que je sois embauchée, mais ça ne faisait pas sens pour moi.. Il y’a eu un rejet intérieur. Et à ce moment-là, j’ai trouvé un boulot dans les petites annonces de Libé, à l’époque la FFSPN (Fédération française des sociétés pour la protection de la nature) qui par la suite est devenue France Nature Environnement cherchait sa chargée d’information et puis de coordination rédactionnelle de sa revue La lettre du hérisson . J’ai postulé et je suis entrée à la FFSPN. Les locaux étaient situés dans le Jardin des plantes, c’était chouette. Et à partir de ce moment là, ça a été une prise de conscience, j’ai eu l’énorme privilège de travailler en militant. C’est à dire que j’ai pu travailler en cohérence avec des convictions qui a un moment donné se sont révélées très fortes. J’y suis restée 5 ans.

Ensuite je suis devenue attachée de presse à Greenpeace France, au moment de la reprise des essais nucléaires français durant l’été 1995.

Le passage à la vie politique avec les écologistes

Au bout de cinq ans passés avec Greenpeace, qui m’ont à jamais marquée, le cabinet de la ministre Dominique Voynet m’a approchée. Cette dernière entamait sa cinquième année au Ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement, à l’époque ça s’appelait comme ça, et elle cherchait une nouvelle attachée de presse. Passer de l’autre côté de la barrière après avoir été avec ceux qui exercent un indispensable contre-pouvoir, celui de la société civile, ça a été extrêmement intéressant ; découvrir ce que l’on peut faire et ce que l’on ne peut pas faire quand on est un.e politique dans les rouages du pouvoir; comment une ministre écologiste minoritaire au sein d’un gouvernement qui s’affichait de gauche plurielle peut-elle travailler en bonne intelligence avec les associations, les ONG, sachant sa marge de manœuvre extrêmement limitée. Il fallait apprendre à jouer fin sur certaines thématiques, notamment le nucléaire qui était sous la tutelle du ministère de l’industrie. Je suis restée avec elle près d’un an et ensuite elle a passé la main à Yves Cochet qui a pris sa suite en tant que ministre jusqu’aux élections présidentielles où le candidat socialiste Lionel Jospin fut éliminé au 1er tour, le 21 avril 2002.

Ensuite j’ai travaillé à la Mairie de Paris, au service communication de la Direction de la Voirie et des déplacements, pour un élu écologiste. Tout ça était extrêmement intéressant, voir comment un maire socialiste, puisqu’il s’agissait de Bertrand Delanoë, avec une équipe là aussi gauche plurielle dont des écologistes, allait réussir à transformer Paris et notamment verdir la politique des déplacements dans une capitale telle que Paris !

Ça, ça a été toute ma vie parisienne, en train de défendre la cause écologique mais en mode intensif et un peu hors-sol. C’était un métier très très prenant. A un moment donné, ça ne faisait plus sens non plus de défendre ces questions en vivant de cette façon là. L’écologie urbaine bien sûr c’est important mais moi, j’avais envie de devenir rat des champs, plus rat des villes. J’ai donc franchi le pas pour la Bretagne, au fin fond du Finistère, dans le Pays de Morlaix où je me plais tant. Ensuite, j’ai travaillé pour le réseau associatif Cohérence, toujours avec une certaine cohérence !

J’ai également travaillé comme collaboratrice de conseillers régionaux écologistes durant un mandat. J’ai ainsi découvert l’échelon régional, ça aussi c’était instructif. C’est important de comprendre les différentes strates politico-administratives françaises, c’est même incontournable. Voir où sont les freins, comment on peut travailler en bonne intelligence avec notamment les agents de la fonction publique, tous grades confondus. Ils sont incontournables, au service des élus certes mais le pouvoir passe et les fonctionnaires restent. Le pouvoir des fonctionnaires est en fait important, ils connaissent les dossiers et les suivent, ce n’est pas toujours facile d’ailleurs pour eux quand il y a un changement de couleur politique de devoir s’adapter. Il y a parfois des résistances.

« En politique il n’y a que des coups à prendre (…) et en particulier quand on est écologistes »

Ça a été très dur, c’est toujours complexe et si je peux retenir une leçon de mon compagnonnage avec des écologistes politiques c’est d’avoir pu pénétrer dans la complexité des situations, des choses. Devoir satisfaire tout le monde, ce n’est pas possible… donc c’est un monde très particulier, écologiste ou pas. Une certaine idée du bien commun, du service publique, heureusement beaucoup d’élus l’ont. Des limites. Parce que je trouve qu’en politique il n’y a que des coups à prendre, on n’arrive jamais à satisfaire qui que ce soit, en particulier quand on est écologiste… et minoritaire. On doit apprendre à composer, à être en permanence dans le compromis, nos propres militants et sympathisants nous renvoient en plus une image négative « Mais c’est plus du compromis, c’est de la compromission ! ». C’est une marge de manœuvre extrêmement compliquée et je trouve qu’il y a des élu.e.s écologistes de terrain qui ont réussi à faire bouger les choses, sur le bio dans les cantines, sur le mariage gay… quand on voit ce qu’a fait Noël Mamère sur la commune de Bègles, quand on voit ce que fait Damien Carême avec les réfugiés à Grande-Synthe. Là franchement, sur le terrain… ils assurent ! Mais il faut redoubler de force, c’est deux fois plus compliqué que lorsque l’on est issu d’une grande formation politique. Le bipartisme a hélas dominé la vie politique de notre pays durant de longues années.

Tu y crois encore ?

J’en suis sortie désenchantée, désabusée sur la difficulté à assumer notre nature humaine dans toutes ses dimensions, mais je garde du respect pour certain.e.s élu.e.s écologistes parce que je trouve que c’est courageux de s’y coller. Un homme comme Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan, qui se bat bec et ongle contre les pesticides, pour sauver les abeilles, entre autres, fait un travail remarquable au Sénat. Donc voilà je garde de l’admiration et de la sympathie.

Aujourd’hui je crois beaucoup plus dans la capacité de la société civile, et du local à se mobiliser. C’est comme ça qu’on arrive à déplacer le curseur, et les politiques suivent…

L’enseignement en lycée agricole : Les jeunes, priorité au projet de vie avant le projet professionnel

J’ai sauté à pieds joints dans l’enseignement, et je suis vraiment contente d’avoir mis les deux pieds dans l’enseignement agricole parce que quand on vit dans une région rurale comme la Bretagne, qui plus est avec des enjeux agricoles énormes, je trouve que c’est une bonne façon de découvrir et faire découvrir les enjeux de notre région, de ses territoires et aussi de mieux connaître et comprendre les jeunes. Le changement que nous voulons voir en ce monde, il part de la pédagogie auprès des jeunes générations. J’ai évidemment une réputation de militante écolo que j’assume et qui irrite parfois certains jeunes issus de milieux agricoles conventionnels mais c’est justement très intéressant de discuter avec eux, leur apprendre à argumenter, accepter des points de vue divergents (idem pour moi !). Tu dois pouvoir justifier pourquoi tu dis ça, pourquoi tu penses ça. C’est important d’avoir une pensée structurée parce que cela offre une liberté d’action et de l’autonomie.

Et je ne suis pas là pour faire du prosélytisme, je distingue parfaitement ma casquette de militante écologiste de ma casquette d’enseignante avec laquelle je dois apprendre aux jeunes à développer une pensée critique par eux même. C’est essentiel. Je suis rassurée de voir qu’il y a quand même une prise de conscience dans les jeunes générations. Certains s’en foutent, ils sont hélas déjà désabusés. En même temps, je trouve que c’est une époque difficile pour la jeunesse, très anxiogène. Nous les adultes, on leur met la pression « et quel métier tu vas faire ?! » et « les études, les études, les études ». Alors évidemment que le projet professionnel c’est quelque chose d’important, mais j’ai encore l’idée un peu désuète que l’école c’est quand même un sanctuaire où on doit aussi les aider dans l’accompagnement d’un projet de vie, avec des désirs, des rêves, des valeurs ! Cela comprend bien sûr le développement d’un projet professionnel. Autant la génération de nos grands-parents pouvait exercer le même métier toute sa vie, c’était possible, depuis le monde a tellement changé et ses mutations s’accélèrent. Alors quelle responsabilité c’est d’accompagner une orientation professionnelle ! Cela existe, des gens qui se sont sentis coincés toute leur vie du fait d’erreurs d’orientation. Il y a aussi parfois des maladresses, malheureusement, au sein du corps enseignant, des collègues qui considèrent qu’une filière pro c’est pour les jeunes qui ne sont pas bons scolairement. Je ne peux pas concevoir qu’on puisse penser ça. Une filière pro ça doit correspondre à quelqu’un qui a envie de rentrer rapidement dans la vie active. Quel que soit leur choix il faut accompagner au mieux ces jeunes gens malgré la pression des adultes. Et en même temps il y a plein de choses encourageantes, toujours.

Des gens qui t’inspirent, des lectures ?

D’abord au-delà de l’écologie, d’une manière plus large il y a Edgar Morin. L’entrée dans sa pensée complexe. Nous avons un mode de fonctionnement complexe, dans un monde complexe et notre nature humaine fait que l’on a besoin de simplifier les choses pour pouvoir les appréhender, pour pouvoir avancer. Au risque de la simplification qui ne rend pas justice à la complexité des situations. C’est pour ça d’ailleurs que je trouve toujours difficile d’arriver à prendre parti complètement pour quelque chose, quelqu’un, un parti, un point de vue…
On fait des choix, il faut certes les assumer à un moment donné de la compréhension que nous avons d’une situation, mais en ne perdant pas de vue que celle-ci est complexe, et moi petit individu, je ne peux absolument pas embrasser la totalité de cette complexité. D’où la nécessité de penser et de faire avec les autres : la belle et difficile aventure de l’intelligence collective !

Intégrer et assumer la lenteur pour mieux comprendre, donc, la complexité des situations. Je le dis notamment aux copains qui ont la dent très dure à l’égard de Nicolas Hulot. Certains lui reprochent son parcours et le fait d’avoir finalement franchi la ligne politique en rejoignant l’équipe gouvernementale de l’actuel président de la République. Il est vrai que moi-même, devant certaines décisions prises, comme par exemple la récente autorisation de tuer des loups, la colère me fait les rejoindre ! Mais je pense qu’il fait ce qu’il peut là où il est. J’aime bien la notion de « faire de son mieux », c’est à dire « je fais ma part du mieux que je peux avec toutes les limites que j’ai et que les structures m’imposent ». C’est tellement facile de plaquer un jugement définitif. La complexité, si on veut lui rendre justice, mérite que l’on prenne du recul, que l’on ne condamne pas péremptoirement l’action d’une personne, comme si d’ailleurs pouvait à elle seule sauver une situation globale. Un Zorro, ça n’existe pas.

La désobéissance civile et la vie en retrait dans les bois de Henry David Thoreau, La voie de la non-violence de Gandhi, celle de Martin Luther King, avec aussi la défense des droits civiques et Vandana Shiva, cette personnalité indienne que je trouve très inspirante. Je prends en ce moment un peu plus le temps de découvrir l’éco-féminisme. Savoir qu’il y a des éco-féministes notamment aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en France qui depuis les années 70, ont associé la cause féministe à la cause écologiste qui n’est qu’une seule et même chose, qu’elles ont mis et continuent de mettre la puissance féminine au service de la Vie. Je trouve ça magnifique.

Tu as participé à l’initiative  Vertes de rage , on peut faire un rapprochement avec l’Eco-féminisme.

Oui, alors Vertes de rage, effectivement, c’était au départ une initiative de quelques copines journalistes parisiennes, avec une belle sensibilité à l’écologie. Nous avons éprouvé le besoin de pousser un grand coup de gueule. L’une d’entre nous, Pascale d’Erm, vient d’ailleurs de publier un très beau livre, Sœurs en écologie  dans lequel elle raconte justement l’histoire des éco-féministes à travers le monde. Nous voulions manifester avec force notre inquiétude et faire bouger les choses car nos enfants, petits à l’époque, étaient comme tous les enfants en contact avec des substances chimiques présentes absolument partout dans la vie quotidienne. Nous avons publié une retentissante et éphémère tribune. Nous avions aussi la chance d’avoir accès à certains médias nationaux. Lorsque l’on peut faire passer des messages pour être entendu par une audience la plus large possible, on le fait. C’était une action ponctuelle qui voulait donner plus d’échos à cette grave problématique. Une association comme Générations futures mène, avec d’autres, depuis des années un travail de longue haleine qui porte ses fruits, timidement mais assurément. Il ne faut rien lâcher face aux menaces qui pèsent sur la santé du vivant dont nous faisons partie !

Ta vision de la transition dans ton quotidien, ce dans quoi tu t’évertues à agir

Vers 13 ans, j’avais décidé de devenir végétarienne suite à un incident alimentaire, l’absorption de viande avariée. Aujourd’hui, j’aimerais bien mener ma cohérence alimentaire vers le végétalisme, mais pas le véganisme qui exclut également tout produit d’origine animale parce que je veux pour le moment encore continuer de porter de la soie, de la laine, du cuir, en étant attentive à leur mode de production, mais bon… cela ne me satisfait pas encore. Disons qu’au niveau alimentaire, je suis en transition. C’est un cheminement long, se nourrir, et c’est quelque chose d’extrêmement politique. On le constate dans les choix agro-industriels, là où ça mène la planète, et les traitements que nous animaux humains infligeons aux animaux non humains, ça m’est aujourd’hui insupportable.

Des actions me semblent également essentielles à mener, en particulier auprès des jeunes dont les cerveaux sont de plus en plus soumis à la dispersion et à l’hyper-sollicitation (le fameux temps de cerveau disponible !). On ne le voit que trop bien avec le monde du numérique que je ne condamne pas pour autant. Il y a du meilleur comme du pire. Et ces jeunes sont assaillis d’informations qui arrivent en flux incessants, sans hiérarchisation, avec très peu de capacités à en vérifier l’origine, la validité, la pertinence…Hélas tout les pousse à la dispersion mentale alors qu’il y a une impérieuse nécessité à se mettre dans l’attention, à réduire tous ces flux envahissants. Et là on rejoint le politique, la nécessité du vivre et du faire ensemble pour les biens communs. Nous ne savons que trop combien il est difficile de résister aux pouvoirs financiers qui règnent en maîtres quasi absolus si nous n’y prenons pas garde aujourd’hui. Et ils ont tout intérêt à avoir à faire à des populations qui réfléchissent le moins possible. Il faut donc au contraire être extrêmement vigilant. Nos démocraties sont plus que jamais fragiles sur une terre en proie à des désordres multiples. Il va nous falloir beaucoup, beaucoup d’attention les uns pour les autres… et laisser enfin nos esprits, si créatifs lorsqu’ils sont libres et autonomes, bâtir les utopies pour demain.

Merci !




Ouessant : point d’étape à mi-parcours de la mise en œuvre de la transition énergétique et écologique des îles du Finistère.

Alors que les vents balayent les côtes Ouessantines en ce début septembre, l’heure est au bilan de mi-parcours. Une journée qui fait suite au lancement de «La mise en œuvre de la transition énergétique et écologique des îles du Finistère» le 6 septembre 2016. Ce mardi 5 septembre 2017, les acteurs se sont à nouveau réunis afin d’offrir une visibilité sur l’avancée du projet. Analyse d’un échantillon idéal, un milieu fini aux prises avec les éléments : Ouessant, Molène et les autres îles du Ponant.

Les îles du Ponant – qui signifie îles du « couchant » en référence au soleil – sont actuellement le laboratoire d’expérimentation sur deux plans d’action principaux : le BEL (Boucle Energétique Locale), financé par la région Bretagne à raison de 823 000 euros sur 3 ans et le TEPCV (Territoire à Energie Positive pour la Croissance Verte) financé par l’état pour un montant de 867 000 euros sur 3 ans également. L’association les îles du Ponant en est le maître d’ouvrage.

« Diminuer de 37% des émissions de Co2, sur les trois îles » était l’objectif énoncé par Denis Bredin, le président de l’association, en 2016. Le bilan à ce jour montre une diminution de 16% des émissions totales pour les trois îles (Sein, Ouessant et Molène) dont une diminution de fioul de 386 700 L (l’équivalent de la consommation de l’île de Sein pendant 1 an). Ce résultat est obtenu grâce aux différentes opérations à destination des populations îliennes : la diffusion d’environ 11000 LED contre les ampoules à incandescence des îliens, l’opération de remplacements des appareils de froid énergivores1 auxquels 239 habitants y ont pris part, la rénovation de l’éclairage public et la mise à disposition de kits poules.

(1). CDP2017 « Sur les îles, il est constaté un suréquipement en appareils de froid, notamment en congélateurs. L’opération consiste donc à soutenir financièrement les usagers à remplacer leur appareil de froid énergivore par un appareil A++ ou A+++)

Ouessant, l’hydrolien à l’essai

Denis PALLUEL, Maire de Ouessant, mets l’accent sur le projet PHARE qui consiste à utiliser les trois sources d’énergies exploitables sur l’île à l’aide de panneaux photovoltaïque, d’éoliennes et d’hydroliennes. En effet afin de garantir aux habitants une alimentation électrique suffisante et constante il est nécessaire de transformer et combiner ces trois énergies. Depuis 1 an, les lampadaires à LED ont bien poussé comme les panneaux photovoltaïques sur la salle omnisports (291m²) mais en ce qui concerne l’éolien c’est une autre histoire comme l’explique le maire :

« Tout le monde va dans le même sens pour développer les énergies renouvelables mais après sur le terrain c’est pas aussi simple que ça puisqu’à Ouessant, mais Sein et Molène aussi, on considère ces îles comme des sanctuaires et on ne doit rien faire, mais je ne désespère pas de convaincre qu’une ou deux éoliennes ne vont pas défigurer Ouessant. Le contexte administratif est très compliqué, la réglementation sur les éoliennes dit qu’elles doivent être à 500 mètres des habitations et en même temps dé que vous êtes à 500 mètres vous êtes en espace protégé. Il y a donc une équation difficile à trouver, c’est un appel pour dire « Faut savoir ce que l’on veut », c’est dommage de voir qu’il y a plein de partenaires mobilisés avec nous et qu’on bloque sur cet aspect-là. D’autant plus qu’on ne cherche pas à faire un champ d’éoliennes, ça serait une ou deux et je dirais même, peut être, provisoirement car d’ici 10 ou 15 ans si le parc hydrolien s’amplifie on aura pas forcément de raison de garder ces éoliennes. »

En ce qui concerne l’hydrolien, c’est encore au stade expérimental mais prometteur avec une possibilité de fournir jusqu’à 400MGWh par an sur les 2200MGWh nécessaires pour une autonomie totale en énergies renouvelable. Après avoir passé l’hiver dans le canal du Fromveur, l’hydrolienne D10 de SABELLA est au port de Brest pour quelques opérations d’optimisation de la connectique. Ces modifications permettront de délivrer davantage de puissance à la centrale qui après avoir traité l’énergie brute de l’hydrolienne, la stockera dans ses batteries récemment installées.

Si les tests sont concluants, deux hydroliennes D12 viendront prendre le relais de la « petite » D10 courant 2020. Cette ferme d’hydroliennes baptisée Eussabella pourra fournir jusqu’à 70 % des besoins de l’île de Ouessant.

Molène, les goémoniers 2.0

Le Ledenez vraz (La grande presqu’île en Breton) de molène qui sert de « refuge de mer » et qui abrite quelques habitations de goémoniers réhabilitées pour accueillir les touristes pour 1 à 2 nuit est aujourd’hui complètement autonome en électricité grâce à ses panneaux photovoltaïques (35m²), bien évidemment ce ne sont que quelques habitations, mais elles confortent pour l’avenir comme le précise le maire de Molène, Daniel MASSON :

« On est complètement autonome, on est très surpris, c’est tout bête, c’est tout simple, il y a du soleil ça marche et la nuit on stock. C’est vraiment un truc à tout petite échelle, expérimental peut être, mais ça nous permet d’avoir des petites maisons complètement autonomes, tout ça pour dire qu’on expérimente, ça réussi, après il faut se donner les moyens pour faire autre chose. On a des projets notamment sur du photovoltaïque qui va alimenter un éclairage public à LED par le SDEF » (Syndicat départementale d’énergie et d’équipement du Finistère)

Du fait des lourdeurs administratives qu’implique l’éolien, le maire de Molène souhaite se concentrer dans un premier temps sur le photovoltaïque car pour l’hydrolien c’est techniquement compliqué :

« il n’y a pas assez de fond sur l’île, mais on compte sur nos amis de Ouessant pour nous tirer un petit bout de câble qui ira jusqu’à molène, mais ça c’est à négocier »

L’éolien, une énergie prometteuse pour l’île de sein et pourtant…

Dominique SALVERT, Maire de l’île de Sein se réjouit de la nouvelle centrale photovoltaïque installée sur la toiture de l’écloserie (517m²) qui vient s’additionner à celle déjà existante du centre nautique (46m²), trois autres toitures devraient se voir équipées de panneaux solaire pour atteindre une surface de totale de 1000m2.

Afin de compléter cette solution, il est question d’installer une éolienne avant d’envisager une autre solution si les contraintes administrative et réglementaire ne se dénouent pas comme le signale le maire de Sein :

« Comme le disait mon collègue de Ouessant, les problèmes administratifs et réglementaire sont très importants, on avance petite à petit… C’est dommage car si on avait ces équipements-là, si on l’avait au complet, on serait à 70 % d’autonomie… On ira jusqu’au bout du possible pour l’éolien avant d’envisager d’autres technologies »

L’énergie des habitants également mise à contribution 

L’association les îles du Ponant, les municipalités et les différentes structures partenaires cherchent d’abord à changer le comportement des usagers, sortir du système de consommation à outrance, néanmoins, comme le défend le maire de Molène, les îliens ont déjà des habitudes de consommations liées aux contraintes de leur territoire et savent composer avec :

« Comme toutes les îles on a surtout une grosse consommation pendant les vacances d’hiver (…). C’est en faisant des progrès sur l’isolation des maisons et puis si vous avez froid vous mettez un pull, vous n’êtes pas obligé de mettre à 23° votre maison. Là-dessus on a des comportements îliens plus sensés. On pas eut l’habitude d’avoir extrêmement de confort donc le peu qu’on a est très agréable.»

Des temps de paroles pour informer et discuter avec les populations ont lieu tous les trois mois environ, et mobilisent généralement « une bonne centaine de personne à chaque réunion sur Ouessant, dont quelques-uns devant la porte. ». Un point d’interrogation majeur « Combien cela va-t-il coûter ? ». Mais au final les usagers y trouvent leur compte grâce au PIG(2), programme qui prendra fin en octobre, certains se sont même vu financer jusqu’à 80% des équipement pour réduire la consommation énergétique de leur logement. Madame Richard, habitante de Ouessant, a payé 1000 euros sur les 15000 euros d’investissement total et a pu s’offrir un réfrigérateur moins énergivore, de nouvelles fenêtres, ainsi qu’un régulateur thermique. Les usagers sont accompagnés dans leurs démarches par l’association des îles du Ponant et sont de plus en plus nombreux à le faire. Cependant l’association, regrette que le programme arrive à sa fin car l’émulation avait réussi à prendre. Ils cherchent actuellement un moyen de le prolonger et répondent à d’autres appels à projet, car l’association est « toujours à la recherche de nouveaux programmes ».

Afin d’allier l’économie d’énergie et la production d’électricité d’origine renouvelable pour éviter le gaspillage d’énergie, il est important de pouvoir adapter l’offre (la production d’électricité) à la demande (la consommation des habitants) comme l’explique le directeur délégué d’EDF SEI, Christian GOSSE :

« La variation de la consommation des clients peut varier d’un à dix suivant qu’on soit la nuit, l’hiver ou à noël… il faut pouvoir ajuster l’offre à la demande de nos clients en permanence, à l’instant T, à la seconde voir à la milliseconde. C’est ce qu’on a développé et ce qui est important, c’est 3 choses : le compteur numérique pour avoir un pilotage très serré de sa maîtrise de l’énergie car l’enjeu de toute cette transition c’est aussi que chaque consommateur soit conscient qu’il doit changer son comportement, le deuxième point c’est un stockage tampon, c’est la fameuse batterie, car quand on produit des énergies renouvelables il faut un stockage car lorsque le client n’a pas d’attente, pas de besoin, on la stock, et après quand il va en avoir besoin parce que c’est la soirée, qu’il va faire froid, on va la réinjecter à travers cette batterie. Cette batterie tampon est extrêmement importante pour garantir la gestion des systèmes. Le dernier objet c’est le pilotage, on a créé un système de pilotage qui joue le rôle de chef d’orchestre, il aura pour but d’arbitrer la production d’ENR, l’énergie de l’hydrolienne et la batterie. »

(2) Le PIG (programme d’intérêt général) pour Ouessant qui prendra fin au moi d’Octobre avait permis à 105 personnes de bénéficier d’aide au reconditionnement de leur logement pour des économies d’Energie. D’autres programmes ont financé les actions de l’association des îles du Ponant mais il faut sans cesse continuer à répondre à des appels d’offres au vu de la durée limitée de ces plans d’action (d’une durée relativement courte entre 3 et 5 ans)

. Il existe également d’autres programmes complémentaires comme le LOGIC pou l’île de Sein ;

Nos amis les îliens 

D’autres zones îliennes sont sources d’inspiration pour l’association des îles du Ponant qui appartient à l’ENSI (la fédération des petites îles d’Europe). Comme l’île d’Eigg, cette petite île d’Ecosse, située dans les îles Small, rachetée par ses habitants en 1997, est aujourd’hui complètement autonome en énergies renouvelables. Leur source d’énergie repose principalement sur l’hydroélectricité avec 3 barrages, du photovoltaïque et de l’éolien avec 6 éoliennes (l’île de Ouessant n’en construirait pas plus de deux par îles si la réglementation française vient un jour l’autoriser). Cependant à chaque île ses spécificités, les plans d’autonomies ne sont pas juxtaposables d’une île à l’autre, mais ils sont inspirants. Cet hiver, au mois de décembre, c’est au tour des îles du Ponant d’accueillir des îles lointaines en questionnement énergétique en invitant les îles de la Madeleine pour un voyage d’étude à Ouessant.

Le projet nécessite la coopération des acteurs associatifs, institutionnels, privés et civils qui s’efforcent de mêler leurs compétences avec le plus d’efficacité possible. Pas facile lorsque les lourdeurs administratives entravent leurs efforts comme on peut le constater pour l’éolien sur l’île de Molène et celle de Ouessant. Autre exemple, l’autorisation d’expérimentation sur le plan d’eau qui a mit plus de 20 ans à être accordé.

« Il faut que le législateur intègre le droit à l’expérimentation. Sur l’eau on vient juste de nous l’accorder, c’était 20 ans de bataille (…) il faut que le législateur pense à ouvrir régulièrement les cadres, même si on doit rendre des comptes ensuite. Histoire que le dossier ne prenne pas 20 ans comme celui ci. » répond le conseiller régional André Crocq délégué à la transition énergétique. Puisque les choses sont dites yapluka.

Pour aller plus loin : 


: http://www.eco-bretons.info/iles-finistere-route-vers-transition-energetique

La fédération des petites îles d’Europe :  http://europeansmallislands.net/fr/

1

http://www.idsenergies.fr

Auteurs : Inès CARADEC et Tanguy COAT




Le Tag 29 propulse quatre projets ESS sur le Pays de Morlaix

Pour aller plus loin

adess29.fr




Le feuilleton de l’été « Les mots valises » : L’innovation (chapitre 3, épisode 2)

« L’innovation sociale consiste à élaborer des réponses nouvelles à des besoins sociaux nouveaux ou mal satisfaits dans les conditions actuelles du marché et des politiques sociales, en impliquant la participation et la coopération des acteurs concernés, notamment des utilisateurs et usagers.

http://old.eco-bretons.info/

http://www.avise.org/decouvrir/innovation-sociale/innovation-sociale-de-quoi-parle-t-on

http://www.atelier-idf.org/connaitre-ess/innovation-sociale/innovation-sociale-exemples-franciliens/

http://www.lelabo-ess.org/-developper-l-innovation-sociale-.html

http://fonda.asso.fr/-Exemples-d-innovations-sociales-.html




#6 Portraits d’Equipe : Dominique Guizien, président de l’association

Président de l’association depuis un peu plus de deux ans, Dominique Guizien est impliqué dans le tissu associatif Morlaisien. Curieux de trouver la meilleure manière d’infuser le développement durable, l’économie sociale et solidaire, le développement associatif au sein de la localité Morlaisienne, il s’investit dans ce qu’il estime être « le seul système viable : le système écologique » .

Bonjour Dominique, tu es actuellement président de l’association Eco-bretons, quelle est ton action ?

Je suis président depuis maintenant presque 2 ans, mais je suis impliqué dans l’association, et notamment au conseil d’administration, depuis plus longtemps, 2013 plus exactement.

Je représente l’association vis à vis de l’extérieur, notamment lors des rencontres avec les partenaires financiers : conseil général, Morlaix agglomération, l’Agence de l’eau… Mon rôle c’est aussi de veiller à ce que l’association ait les conditions de sa survie. Actuellement,  tout ce qui se passe , les réductions de budget dans les collectivités territoriales, la suppression de la réserve parlementaire, la suppression annoncée des emplois aidés, fait que Eco-bretons, comme beaucoup d’associations, affronte des difficultés pour passer l’année 2017.

Difficile

Difficile certainement,  sauf si on est une association qui a de grosses réserves.

Mon autre rôle c’est de faire en sorte que les grands principes fondateurs de l’association soient respectés. Alors les grands principes c’est quoi ? C’est en premier lieu la gratuité du service, et ça devient compliqué compte tenu de ce que l’on vient de dire sur les financements. C’est aussi une certaine ligne éthique dans le traitement de l’information, parce qu’on est pas les seuls à traiter de ce que l’on appelle communément « le développement durable ».

Pourquoi avoir accepté de prendre le rôle de président ? C’est un rôle de responsabilité, d’engagement, de constance. Un attachement particulier à l’association, aux projets, aux gens qui y travaillent ?

J’ai rarement été un spectateur dans ce que je faisais.

Je suis tombé dans la marmite associative quand j’ai fait l’ESSEC, une école de commerce installée à l’époque en plein Paris, dans les locaux de l’Institut Catholique. J’ai animé deux activités dans le cadre de mes études. J’ai contribué à l’animation de ma promotion et de la promotion suivante sur deux axes : premier axe, un club de pétanque. Jouer à la pétanque dans la cour de « la Catho » c’est particulièrement jouissif et surtout organiser, dans ce cadre là, un grand tournoi de pétanque, rassemblant plus de 800 joueurs sur l’esplanade des invalides, ce fut un grand moment. Autre chose j’ai été secrétaire général national d’une association qui s’appelait l’association des cercles Europe qui, au début des années 70, promouvait deux choses, d’une part l’élargissement de l’Europe, on passait de six à neuf et de neuf à quinze, et surtout une Europe des régions. C’était plus ou moins lié au mouvement fédéraliste.

Et puis, je n’ai pas toujours été dans l’administration. J’ai 42 ans de vie professionnelle, j’ai du faire une demi douzaine de métiers. Deux périodes bien distinctes : une première de 20 ans avant l’ENA et la seconde de 20 ans aussi après. Dans l’administration c’est classique, parcours de haut fonctionnaire, on se bouge tous les 3 ou 4 ans de ministère en ministère et de poste en poste.

Par contre avant, sur les 20 ans de mon activité précédente il y a trois phase, une phase de coopération technique en Afrique du Nord, une petite phase de deux ans ou j’ai créé ma première boîte et ensuite les dix années suivantes ça a été effectivement essentiellement associatif.

Au delà d’être président, tu es pas mal investi dans le monde associatif Morlaisien, le monde associatif tout court en fait.

Oui, j’étais. C’est vrai qu’il y a une époque, au début de ma retraite, où j’avais été un peu plus sollicité. Je sortais alors d’une élection politique qui m’avait apporté un petit peu de visibilité. Par ailleurs, puisque beaucoup de sujets m’intéressent ; parmi eux évidemment la transition écologique, l’économie sociale et solidaire, la solidarité active, le développement du mouvement associatif au sein de l’ESS ; je me suis retrouvé administrateur et parfois assez rapidement président ou coprésident, vice président de certaines associations (Force 5, Resam, ADESS).

L’intérêt du monde associatif selon toi : monde des possibles, liberté de création, mise en réseau des acteurs, quel est il ?

L’intérêt du monde associatif par rapport à d’autres c’est quand même la possibilité de développer des services ou des relations entre les individus qui ne soient pas fondées uniquement sur le modèle marchand. Ça offre beaucoup de possibilité mais présente aussi quelques inconvénients, notamment de moyens pour fonctionner.

Pourquoi le développement durable ?

Ca s’est passé en trois temps.

 Premier temps, le rapport de 1972 The Limits to Growth, du Club de Rome, premier choc. Là je sortais d’école, j’avais suivis des cours de marketing de produits agricoles, j’envisageais de venir faire carrière dans l’agro-alimentaire breton. Et je commence à me poser des questions, « mais oui c’est vrai ça si on part du principe que les ressources sont finies il vaut mieux les ménager. » Sans grande originalité, j’avais l’intuition que le bon filon ça allait être le recyclage et la récupération et que ceux qui arriveraient à trouver les bons systèmes s’en sortiraient. Quand on voit où on en est 40 ans après, on se dit qu’on aurait pu aller plus vite.

Second choc, le naufrage du pétrolier Amoco Cadiz en 1978. Quand j’ai vu que l’on utilisait des palettes de plâtre, stockées sur un quai de Roscoff pour couler le pétrole dans le chenal de l’Ile de Batz, je me suis dit « ah là quand même, il y a quelque chose qui ne va pas très bien ». Non seulement il y a un problème de recyclage des déchets mais il y a un problème plus grave : les pollutions du milieu naturel et nous n’avons pas de réponse intelligente

La troisième prise de conscience a eu lieu en 2003 lorsque je me suis retrouvé directeur des ressources humaines au ministère de l’écologie. Je n’ai pas choisi ce ministère par hasard non plus. Au ministère de l’écologie j’ai découvert toutes les problématiques de l’écologie : l’eau, l’air, la biodiversité …etc et surtout la diversité des métiers. C’est là que j’ai découvert que le fonctionnement systémique ne s’appliquait pas qu’aux organisations humaines mais que c’était avant tout le fonctionnement normal de la nature. C’est à dire que rien ne se passe dans une partie du système sans que cela ait un effet sur un autre partie. Et cet effet sur cet autre partie provoque une rétro-réaction qui, soit amplifie l’effet premier, soit le corrige. Selon la façon dont on gère les feedback, c’est à dire les boucles de retour, on arrive à un système qui devient à peu près stable ou qui devient décadent. L’effet systémique de l’économie actuelle serait plutôt un effet déstabilisant puisque l’effet retour a plutôt tendance à amplifier le premier que l’inverse. Alors que lorsque l’on regarde le modèle économique de la transition écologique, à l’inverse, l’effet retour aura plutôt tendance à stabiliser les choses.

Mon choix pour l’écologie n’est du tout un choix philosophique. C’est avant tout une question d’efficacité ;  le modèle écologique est plus efficace, c’est tout.

Dans le chapitre 2 épisode 3 du mot « transition », tu parles d’une transition radicale mais qui ne peut être que progressive, est ce que tu peux nous en parler ?

Je prends « radicale » a son sens premier c’est à dire « allant aux racines ». Si on veut véritablement que les choses changent il ne faut pas se contenter de l’écume des choses. Par exemple : faire pipi sous la douche c’est bien, ça évite de tirer la chasse d’eau donc on économise de l’eau. En plus c’est rigolo, ça reste ludique. Mais si on se pose la question du cycle de l’eau là ça devient intéressant, parce qu’on peut aller au fond des choses, à leur racine ; on commence alors à entamer une démarche qui est une démarche, pour le coup, radicale.

Toute transition est un changement et chaque petit changement est quelque part un petit traumatisme. Si les traumatismes sont gérés progressivement ils sont supportables. S’ils sont trop simultanés ça devient plus dur à gérer et dans ce cas là on change de modèle, on risque de se marginaliser. Je pense au mouvement des décroissants dont je crois qu’ils veulent aller trop vite, trop loin et trop rapidement. Moi je crois beaucoup à l’évolution progressive. Chacun a un cheminement différent, on ne fait bouger les gens que ce sur quoi ça les intéresse.

Les américains ont un mot pour ça qui s’appelle « nudge » , c’est à dire que l’on utilise un stimulus, qui parle à l’esprit des gens, positif, pour changer un comportement qui est négatif. Je prends un exemple récupéré d’un article, la lutte contre les incivilités dans les gares. Tout bête, les gens qui râlent dès qu’un escalator est en panne. On va faire passer un message positif, par exemple «  Prenez l’escalier c’est bon pour votre santé, vous allez vous muscler, perdre du poids…etc » , comme ça le jour où effectivement l’escalator est en panne, vous prenez naturellement l’escalier. En appuyant sur un stimulus valorisant on arrive à un changement. La transition c’est un petit peu ça, il faut qu’on trouve à chaque fois le bon stimulus.

L’exemple le plus typique c’est la nourriture bio. Moi je suis persuadé que parmi les gens qui fréquentent les rayons bio des grandes surfaces ou ceux qui vont en biocoop, tous n’y vont pas dans une délmarche de transition assumée. Certains y vont uniquement parce qu’ils sont effrayés par le message diffusé par les médias sur « la bouffe dégueulasse », parce qu’ils ont lu un article sur le fait que « la myrtille sauvage c’est bon pour le teint », parce que « le thym c’est bon comme antiseptique naturel »…etc

 C’est ça qui les fait venir donc ils vont acheter du bio, ils vont payer un peu plus cher pour ça. Ces gens lorsqu’ils payent du bio et ils payent juste la santé : « bah ça me coûte plus cher mais ça me coûte moins cher qu’en médicaments ». Stimulus zéro. Ils ont acheté du bio, c’est bien, mais ils ne sont pas en transition. Par contre s’ils rentrent dans un magasin et que dans ce magasin on les informe un peu plus sur les tenants et aboutissants de leur consommation et sur des événements locaux qui illustrent cette démarche de transition, là ils ont l’opportunité de rentrer dans une démarche plus réfléchie.

C’est un petit peu le sens de la démarche d’Eco-bretons. Ce n’est pas juste, par exemple, de présenter un maraicher bio en disant « ah oui c’est bien de faire du bio ! ». C’est aussi lorsque l’on va interviewer quelqu’un qui fait du bio, d’essayer de regarder son parcours, de regarder pourquoi il est arrivé à ça, ce qu’il y a derrière tout ça. Ensuite il faut que le lecteur fasse le rapport entre cet article et d’autres articles  qu’il a vu récemment sur la gestion du cycle de l’eau par exemple.

Est ce qu’on a encore le temps d’avoir cette démarche progressive ?

Moi je ne suis pas comme Jean Jouzel je ne suis pas à ce point alarmiste. Mais ce n’est pas parce que je pense qu’on a encore un peu de temps qu’il ne faut pas commencer dès maintenant d’essayer de faire bouger les comportements de la majorité. Mais il faut quand même avoir à l’esprit un point important. On pourra avoir tous les comportements vertueux dans des pays qui ont des comportements plus prédateurs jusqu’à présent, quand on sera 9 millions ½ d’habitants sur terre si ceux-ci n’ont ne serait ce que le dixième ou le quart de notre empreinte écologique, de toute manière on est mal barrés. Donc ce que je vais dire, je vais le dire avec précaution : le pire risque c’est l’évolution démographique. Et là, il n’y a pas de solution simple.

Les innovations

Peut être qu’on trouvera des innovations qui vont faire que pour un même niveau de standard de vie, l’empreinte écologique globale sera fortement diminuée. Et là je suis extrêmement attentif à ce que font certains acteurs majeurs de l’économie mondiale, c’est à dire des personnes qui ont des ressources supérieures à des ressources d’état entiers.  J’ai découvert ainsi  que deux des personnes les plus riches du monde ont tous les deux pris des parts dans une société Californienne qui envisage de produire ce qu’ils appellent de la viande propre, c’est à dire de la viande sans animaux. La protéine animale sans animaux, pas d’élevage, pas de torture. Alors est ce que c’est de la pure communication, du bluff ?Je suis plus que dubitatif, je ne suis pas contre l’innovation technologique, mais  depuis 40 ans j’ai été un petit peu vacciné contre les apprentis sorciers. Ça serait bien qu’on fasse une évaluation écologique, a priori, de ces pratiques, notamment de leur impact sanitaire. Et lorsque je n’en sais strictement rien, c’est l’application du principe de précaution, principe de valeur constitutionnelle. Quand on ne connaît pas l’impact des choses, il vaut toujours mieux prendre le temps de creuser la question que faire a posteriori une analyse des dégâts que cela a produit.

La chasse aux apprentis sorciers : prendre le temps de l’application du principe de précaution

Application du principe de précaution puisqu’on en parle. Les sables coquilliers au large de la Bretagne, deux projets, un au large de Duon et un au large de Trebeurden. Projet de Duon c’est démarré. Projet de Trebeurden ça a commencé suite au décret du ministre de l’économie, Macron à l’époque, mais avec de telles contraintes réglementaires  que l’opérateur a dû arrêter provisoirement l’exploitation. Il se retrouvait en contravention par rapport à ceux qui l’autorisaient à le faire. Mais là n’est pas la question. En rapport avec l’application du principe de précaution, on aurait pu regarder l’impact qu’avait eu l’extraction de sable coquillier au Duon avant de lancer une extraction à Trebeurden. On n’était pas à deux/trois ans près, surtout quand on sait à quoi sert le sable coquillier. Hors la station biologique de Roscoff avait commencé une étude, systématique, sur l’impact de l’extraction des sables coquilliers sur les dunes de Duon. On aurait attendu deux ou trois ans, on se serait rapidement rendu compte si oui ou non le sable coquillier avait un impact, comme NOUS le pensions, ou bien si ça n’avait absolument aucun impact. Si il n’y aucun impact et bah on y va, ce sable vaut mieux qu’on le prenne là que l’on ne le prenne sur les côtes. SAUF si l’étude démontrait qu’au delà des frayères il y a d’autres impacts négatifs, SAUF si une étude technique ad hoc démontrait qu’il existe des solutions alternatives pour répondre aux besoins de l’agriculture bretonne, SAUF enfin, si une étude économique sérieuse montrait que l’agriculture bretonne pouvait se passer de ces sables coquilliers,

On va terminer par un livre ou une personne que tu nous conseillerai pour prolonger la réflexion, qui toi t’as aidé en tout cas

 Deux livres en fait que j’ai lu le même été et qui traitent à peu près du même sujet

Le bouquin de Timothy Jackson, le rapport qu’il avait fait pour l’équivalent du conseil du développement durable anglais. C’est un rapport officiel. Le bouquin est sorti en 2010 et explique la démarche de la transition. Prospérité sans croissance, la transition vers une économie durable  de Tim JACKSON.

Le livre d’un économiste suisse qui partant de la crise financière de 2007-2008, démonte les mécanisme d’un changement radical :  Le grand renversement  de Jean-Michel SERVET.

Merci !




Recette. Câpres de capucines

Efficace et savoureux, ce condiment « plein de piquant » va désormais accompagner toutes vos salades!

Ingrédients

  • câpres de capucines
  • gros sel
  • vinaigre blanc
  • eau filtrée
  • estragon ou autres plantes aromatiques

Préparation

Nettoyer les câpres et les essuyer. Les déposer dans une jatte en terre avec du gros sel et couvrir environ 24 heures.

Recueillir les câpres en veillant à isoler les grains de sel. Essuyer les graines si nécessaire, puis remplir aux 3/4 un ou plusieurs bocaux en verre stérilisés. Pour cela, il suffit de plonger les bocaux en verre type « Le Parfait » dans l’eau bouillante.

Dans une casserole, porter à ébullition le vinaigre et l’eau (50-50), avec des plantes aromatiques et quelques graines de coriandre. Couper le feu, puis verser directement le liquide sur les câpres. Refermer les bocaux qui pourront être conservés plusieurs mois à l’abri de la lumière.

Pour que le goût soit bien développé, il est conseillé d’attendre quelques semaines avant de les déguster !

Ne pas utiliser de cuillère ou autre ustensile en métal pour prélever les câpres.