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Sauvegarde du Trégor : « Pas une pincée de sable ne nous sera volée ! »

Porz ar Viliec, à Locquirec, début janvier, est une belle plage affleurée par de nombreux rochers. « Porz ar Viliec, « l’abri aux galets », en breton, était pleine de galets quand j’étais petit, se souvient Jean-Marie Le Lay, le président de Sauvegarde du Trégor. Cette plage connaît un désensablement naturel cyclique : chaque hiver, les rochers refont surface. Ce lieu est aussi un spot de surf très fréquenté. »

Un système fermé   

Au loin, on aperçoit la pointe de Trébeurden et l’Ile Milliau. « C’est là, un peu à l’ouest de l’Ile Milliau, que le projet d’extraction doit avoir lieu. Ce n’est pas loin non plus de l’île Molène, qui connaît déjà un problème de désensablement. Dans cet ensemble fermé qu’est ce type de baie, échangeant très peu avec le large, toute extraction est du sable perdu, non compensé par un apport extérieur. Voilà comment on fragilisera le littoral au moment même où il est le plus menacé par l’élévation du niveau de la mer, consécutif au réchauffement climatique. On est loin de Copenhague ! », lance un Jean-Marie Le Lay en colère.
Le militant sort un petit ouvrage écrit par lui il y a de nombreuses années. « Je l’avais déjà expliqué là : c’est très simple. Quand on creuse du sable, le trou formé est peu à peu comblé. Mais cette reconstitution se fait au détriment de la dune. On peut le voir à Locquémeau : en extrayant du sable, les ancêtres de la Can ont détruit le littoral. Cette pratique a été fortement limitée dans les années 1980. »

Une législation plus ferme

L’association a quelques raisons supplémentaires de se méfier de la Compagnie armoricaine de navigation (Can), avec qui elle a déjà eu affaire. « La Can extrayait du sable dans le gisement de Beg an Fry, au large de Saint-Jean-du-Doigt (29), sans autorisation. La plage de Saint-Jean-du-Doigt était devenue un vrai champ de cailloux. En 2006, on a saisi le tribunal administratif. Ils ont été condamnés. Car la législation a changé. Depuis 1997, il faut disposer d’un titre minier pour pouvoir exploiter le sable en mer. »
Actuellement, la compagnie exploite un gisement dans la baie de Morlaix, aux Duons, bénéficiant d’une autorisation provisoire d’une durée de deux ans accordée par le préfet. Une demande dans les règles a été effectuée par la Can pour une extraction durable. « Mais cette zone est classée Natura 2000, explique Jean-Marie Le Lay. Ils risquent de se heurter à la législation. L’autorisation de prélèvement sera difficile à obtenir, c’est pourquoi ils se rabattent sur la baie de Lannion », estime le président, déjà prêt pour le champ de bataille.
 




Un projet d’extraction de 200 000 mètres cubes de sable

La compagnie en question est la Compagnie armoricaine de navigation (Can), basée à Quemper-Guézennec, près de Pontrieux (22). Cette société, qui appartient au groupe malouin Roullier, emploie 90 personnes. Jusque-là, elle exploitait des gisements de sable à Morlaix et Saint-Brieuc. Mais ces concessions arrivant à échéance, l’entreprise cherche un autre gisement à exploiter dans les années à venir.
La zone convoitée par la compagnie se situe à 1,5 km des côtes de Trébeurden, dans la zone finistérienne (au large de Locquirec), à l’ouest du Plateau du Crapaud, sur une dune sableuse de 15 km². La zone d’extraction délimitée par la Can mesure 4 km². Elle est située entre deux zones Natura 2000. La Can demande la permission d’extraire 400 000 m3 par an pendant 20 ans – et ce en tablant sur 200 000 m3. La ressource convoitée est du sable coquiller, un sable très calcaire utilisé comme sédiment pour alimenter la production de fertilisants agricoles.

Le début d’une longue procédure

La demande de titre minier et d’autorisation d’ouverture des travaux a été déposée par la Can fin décembre. L’instruction du dossier va durer environ deux ans. L’enquête publique est réalisée par la Direction régionale de l’industrie, la recherche et l’environnement (Drire) de Bretagne, puis soumise à l’avis du préfet. Ensuite, une mise en concurrence aura lieu sur les marchés publics.
Pour instruire le dossier, une étude d’impact a été réalisée par une société. Mais la Can a demandé à ce que l’étude d’impact sur la pêche soit réalisée par le Comité des pêches de Paimpol, et en particulier par Laure Robigo, ingénieure halieute. Cette demande a semé la confusion chez les pêcheurs du Trégor-Goëlo, accusant leur président d’être à la fois « juge et parti » dans cette affaire, puisque le Comité a été rémunéré pour cette étude. Finalement, suite à la lecture de ce bilan, les membres du Comité des pêches ont rendu un nouvel avis vendredi dernier : à l’unanimité, il se sont opposés à ce projet. Tout comme les associations locales de protection de l’environnement.
 

A noter que, malgré notre demande insistante, la Can n’a pas souhaité s’exprimer à ce sujet.




Regard citoyen sur l’eau en pays de Ploërmel

Pouvez-nous présenter l’association Polen ?

L’association Polen a été fondée à l’automne 2009 par des citoyens du Pays de Ploërmel. Son objectif est d’oeuvrer pour un développement local, durable, écologique et solidaire. Trois pôles ont été créés : un groupe « éco-habitat », un autre « alimentation et agriculture », et enfin un troisième appelé « vivre autrement ». Nous portons notamment un projet de monnaie locale, et le pôle « vivre autrement » travaille autour du thème de l’eau, depuis l’été 2011.

Pourquoi avez-vous décidé de mener un travail autour de ce thème ?

Le groupe s’est tourné vers la question de l’eau suite à un problème survenu au lac au Duc, un plan d’eau important, qui fournit notamment une partie de l’eau potable du territoire. La prolifération d’algues a rendu la baignade interdite au cours de l’été 2011. A la fin de cette année-là, nous avons décidé la création d’un groupe « lac au duc » pour aller à la rencontre des acteurs qui travaillent dans ce domaine sur notre territoire : associations de pêcheurs, élus, agriculteurs, Grand Bassin de l’Oust…

Sur quoi cette réflexion a-t-elle abouti ?

Nous avons couché tout cela écrit et ainsi donné naissance à une plaquette d’une quinzaine de pages. L’idée, avec ce document, était de compiler une parole citoyenne autour de la question de l’eau. Nous avons voulu nous saisir de cette problématique, qui assez complexe.
Le problème de pollution du lac est accentué de façon conjoncturel, mais nous nous sommes aperçus au fil de nos travaux qu’il était assez ancien. Il y a régulièrement des soucis d’algues ou de mortalité de poissons. Tout ceci n’a pas seulement des conséquences sur la baignade, mais aussi sur le tourisme, l’agriculture, la consommation d’eau…
Il est intéressant aussi d’avoir une vision sur une échelle plus large, et de raisonner non pas seulement en terme de lac, mais aussi de bassin versant, qui est touché dans son ensemble par des problèmes de pesticides et de phosphates. Nous travaillons aussi avec le Grand Bassin de l’Ouest sur ces questions.

Quelles ont été, et quelles sont vos actions dans le domaine ?

Toute l’année 2013 était dédiée à l’eau. Nous avons instauré un cycle de documentaires, et organisés plusieurs sorties et conférences sur ce thème. La fête de l’eau, qui a eu lieu en septembre, en a été le point d’orgue. Notre souhait, avec cette manifestation, était de montrer que le lac était un endroit agréable, et qu’il est important de protéger ce site. De nombreux efforts en matière de protection de l’eau sont encore à réaliser, même si le Grand Bassin de l’Oust y travaille depuis quelques décennies. Si le taux de nitrates a cessé d’augmenter, les phosphates restent un problème par exemple.

 

Le document "Le lac au duc, hier, aujourd’hui, et demain?" réalisé par Polen

Un complément au document (septembre 2013)

 

 

Plus d’infos

www.polen.asso.fr/




La biodiversité, c’est pas sorcier !


Vidéo collège Fougères par BD_info

 

A visionner également, les reportages des autres lauréats :

 

Vidéos :

– Un acteur de la biodiversité "le conservatoire botanique national de Brest"


Ecrits :

Un temps avec…Rémy Lucas

Un acteur de la biodiversité : Jean-François Glinec

Planter des arbres pour la biodiversité !

 




Les landes de Monteneuf labellisées “Espace remarquable de Bretagne”

Réunissant -et même très largement- les conditions requises, les landes de Monteneuf ont été classées réserve naturelle régionale, en juin dernier, par la Région. Un statut réglementaire garantissant la préservation du site, mais pas seulement. Le gestionnaire et les 42 propriétaires (dont 39 privés) pourront également bénéficier d’un soutien technique et financier de la Région pour la mise en œuvre d’actions de protection et de sensibilisation. De nouvelles dynamiques de développement local seront par ailleurs encouragées, en lien avec la Commune de Monteneuf, la Communauté de communes du pays de Guer et le Conseil général du Morbihan.

Une grande diversité faunistique avec une étonnante variété d’oiseaux, chauves-souris, libellules, papillons ou autres amphibiens, reptiles et mammifères.
382 espèces végétales, dont une dizaine protégée au niveau national. Des landes couvertes d’ajoncs et bruyères offrant un paysage riche en couleurs… A proximité de la forêt de Paimpont, les 125 ha couverts par les landes de Monteneuf sont un formidable réservoir de biodiversité. De plus, avec les quelque 420 monolithes des Pierres Droites et les nombreux mégalithes répertoriés, le site constitue un ensemble archéologique d’une richesse inestimable.

Au début des années 2000, des actions de préservation et valorisation ont été entreprises sous l’impulsion de la Communauté de communes de Guer et de la Commune de Monteneuf. Confiées à l’association Les Landes, elles ont d’abord porté sur l’accueil et la sensibilisation du public, avant de s’étendre à de véritables missions de gestion. Ainsi, les inventaires réalisés par l’association ont permis la reconnaissance du site en ZNIEFF type 1 [1][1] (zone d’intérêt écologique faunistique et floristique), en 2010, et conduit les deux collectivités et l’association à aller plus loin, en sollicitant sa labellisation en Espace remarquable de Bretagne, auprès de la Région.

Suite à l’inauguration officielle de cette nouvelle réserve, l’association Les Landes invitera les visiteurs à découvrir le site et son patrimoine à l’occasion de diverses animations ponctuelles, au cours des mois d’octobre et novembre.

 




Un temps avec … Remy Lucas

Est-ce que vous pouvez nous donner quelques informations pour vous présenter ?

Je m’appelle Rémy Lucas. Je suis le créateur et le dirigeant de l’entreprise Algopack située à St Malo ; c’est une entreprise qui a été créée en 2010.
Je suis issu d’une famille Finistèrienne. Mes grands-parents et arrière grands-parents étaient des « paysans marins » qui vivaient de l’agriculture mais aussi un peu de la pêche. Ils allaient récolter le goémon près de Plouguerneau. Ils chargeaient le goémon dans des charrettes à bras avec des chevaux, l’amenaient sur les dunes pour le faire sécher et s’en servaient comme engrais.
Après des études à Brest, j’ai travaillé 15 ans dans la plasturgie. Un jour, j’ai eu l’idée de remplacer le plastique par des algues. À partir de ce jour, j’ai travaillé pendant 10 ans dans mon garage pour passer de la phase d’innovation à la phase recherche-développement. J’ai déposé des brevets après avoir vérifié sur un site pilote que l’innovation était industriable. Aujourd’hui, trois brevets sont étendus au niveau international.

Comment s’est fait pour vous, le choix des algues ?

J’ai participé, lorsque je travaillais dans la plasturgie, à l’émergence les matières agrosourcées à base d’amidon de maïs et amidon de pomme de terre. J’ai choisi l’algue comme bio matériau estimant que c’était le matériau le plus vertueux au regard de la biodiversité et j’ai souhaité créer l’entreprise la plus vertueuse qui soit dans sa globalité : de la matière première jusqu’au produit final.

Qu’entendez-vous par vertueux ?

1 – Les algues absorbent beaucoup de CO2 : elles fonctionnent comme un puit à carbone au niveau de la mer. Elles transforment ce CO2 en sucres et ensuite libèrent de l’oxygène dans l’eau.
2 – Les algues ne consomment ni pesticides, ni eau contrairement à différents agromatériaux à base de maïs ou autre. On ne vient pas polluer le biotope existant mais au contraire on lui apporte quelquechose puisque le développement des algues brunes favorise le développement du plancton en mer.
C’est un matériau en avance par rapport aux plastiques utilisés sur le plan toxicologique : les plastiques contiennent des substances classées CMR (cancérigènes) comme le bisphénol A, le phtalate. Notre matière est moins nocive pour l’homme. Elle ne contient aucune de ces substances, même pas le formaldéhyde.
Il n’entraîne pas de déchets. En fin de vie, on voit des emballages plastiques partout et énormément en mer.
En commençant 50 ans plus tôt, on aurait pu éviter le 8ème continent dont parle Maud Fontenoy. J’ai voulu créer le matériau qui ne générera aucun déchet et j’y suis arrivé ;
Plus encore qu’aucun déchet produit, ce matériau apporte des oligoéléments lorsqu’il est mis en terre.
C’est le premier matériau 100% biocompostable.

 

En quoi fabriquer un matériau à base d’algues favorise la biodiversité locale ?

La biodiversité globale est favorisée au niveau local car on a deux sources d’approvisionnement en algues : la première source est la récolte des algues dans leur élément naturel avec les chaluts et leurs « scoubidous ».
La seconde source, qui se développe maintenant, est la culture d’algues. On cultive les algues en écloserie. On les dépose sur les boutes c’est-à-dire sur des filières et les algues poussent toutes seules. Donc, elles contribuent par leur atout de puit à carbone à un élément naturel très important pour la biodiversité.
Ensuite, c’est une biomasse qui ne pollue pas.
Autre apport : en favorisant le développement de la culture des algues, on contribue à l’émergence d’une filière aujourd’hui en Bretagne qui était historiquement très développée. Utilisée comme engrais dans l’agriculture, cette production a disparu avec l’arrivée des potasses d’Alsace, les engrais chimiques.

 

Jusqu’où pourrait aller la substitution des produits pétrosourcés par des produits biosourcés ?

Tous les secteurs d’activité et tous les usages des plastiques sont concernés : automobile (tableaux de bord,…), jouets, packaging alimentaire ou cosmétique … Ce matériau répond à toutes les caractéristiques techniques requises pour chacun de ces usages.

Y a t’il des obstacles dans la diffusion de ce matériau novateur ?

Le temps est le principal obstacle. Par exemple : pour développer et mettre sur le marché un bouchon cosmétique, il faut fabriquer un moule et que cette pièce soit compatible avec des processus industriels haute cadence de mise sur les bouteilles.
Y a t’il un bénéfice pour d’autres organismes marins que les algues ?
Oui, pour les poissons. L’algue consomme du CO2 pour sa croissance. Elle le transforme en sucre et elle libère de l’oxygène, en particulier « les laminaires ». Plus on apporte de l’oxygène dans l’eau plus on assure le développement du plancton, maillon de la chaîne alimentaire, et plus on favorise la croissance du poisson. Pour le représenter, nous avons une ferme expérimentale dans la Rance et tous les pêcheurs se regroupent autour des algues qui poussent car il y a une multitude de poissons.

Est-ce que l’on peut faire exister la notion de biodiversité dans le commerce ?

Votre génération est plus sensible que la nôtre à toutes ces questions de biodiversité et d’environnement donc on voit une certaine évolution positive, une prise de conscience.
Nous avons une certaine responsabilité pour les générations qui viennent de leur laisser une solution alternative aux plastiques. On est pas là que pour faire de l’argent, on est aussi là pour transmettre et laisser quelque chose.

Les gens sont-ils sensibles à cette démarche ?

Il y a eu trois types de comportements. La première : les gens n’y ont pas cru. La perception a franchi une deuxième étape : c’est possible mais va t’il y arriver ? Et aujourd’hui l’adhésion est totale sur tous les plans.