Steak Machine. « On impose un rythme effréné et absurde aux ouvriers des abattoirs »

Chaque Français consomme en moyenne 86 kg de viande chaque année. « Notre politique est de faire en sorte que le client ne fasse plus de lien entre la vache et le steak ». Les mots de Jean-Paul Bigard en disent long sur l’opacité des abattoirs. Le patron du groupe, premier transformateur de l’industrie agroalimentaire spécialisée dans la viande en France, a tenu ses propos en 2015 lors d’une conversation téléphonique avec Raphaël Girardot, coréalisateur du documentaire « Saigneurs ».  
Si le grand public a longtemps détourné le regard sur ce qui se passait au sein de ces abattoirs, il ouvre davantage les yeux aujourd’hui suite à la publication de nombreuses vidéos chocs par l’association L214. Le journaliste indépendant Geoffrey Le Guilcher a lui voulu se rendre là où tout commence. Il s’est infiltré durant quarante jours en tant qu’intérimaire dans un abattoir industriel de Bretagne. Il relate son expérience dans « Steak Machine », un livre qui interroge les conditions de travail imposées aux ouvriers, point de départ de la souffrance animale. Car son constat est implacable. Il assure que « tant que la cadence sera absurde pour les hommes, il n’y aura pas de viandes propres ». 
Il ne donne pas le nom de l’abattoir, ni sa localisation. Il l’appelle juste Mercure. 3.000 personnes y travaillent et deux millions d’animaux y sont abattus par an.  Une interview  de notre partenaire, Radio Nord Bretagne.

En audio.
Entretien avec Geoffrey Le Guilcher.

 




2016, une très bonne année pour l’agriculture biologique mais…

Depuis le 25 février, et jusqu’au 5 mars, Paris accueille le 54e salon international de l’agriculture. L’occasion pour Eco-Bretons de faire un point sur l’agriculture biologique.

Le 21 février, l’Agence Bio a dévoilé les chiffres de la production et de la consommation de produits issus de l’agriculture biologique. Des chiffres très positifs pour l’agriculture biologique. La Bretagne n’est pas une mauvaise élève puisqu’elle était, en 2015, la sixième région de France en nombre d’exploitations bio et en surface agricole utile (SAU) cultivé en Bio.

En 2010, la Bretagne comptait 1541 exploitations agricoles bio, ce qui représentait 4% des exploitations et 3,2% de la SAU. En 2015, les 2036 exploitations bio bretonnes, en augmentation de 7,7% par rapport à 2014, représentent 4,4% de la SAU. Enfin, en 2016, on compte 2381 exploitations bio en Bretagne.

C’est dans le Finistère que l’on compte le plus d’exploitations agricoles biologiques (572 en 2015, soit 9% des exploitations) et dans le Morbihan qu’il y en a le moins (464 en 2015). Par contre, la part de SAU consacrée au Bio est plus importante dans le Morbihan (4,8% contre 4,3% en Finistère).

« Entre 2013 et 2015, la dynamique d’installation était le moteur de l’augmentation du nombre d’exploitations biologiques. En 2016, la tendance s’inverse : il n’y a jamais eu autant de conversion. Cette vague s’explique par la crise de l’agriculture conventionnelle et la forte demande des consommateurs en produits bio. La dynamique d’installation concerne surtout le maraîchage diversifié en petite surface. Les conversions se font essentiellement en bovin laitier », précise Antoine Besnard, chargé de communication à la Frab Bretagne.

7 français sur 10 consomment régulièrement Bio

Au niveau national, la production biologique a connu une « croissance historique » en 2016. Les surfaces cultivées en Bio ont augmenté de 16% par rapport à 2015 pour atteindre 1,5 million d’hectares. Le nombre de producteurs bio a lui bondit de 12% en un an. On compte désormais plus de 32 000 producteurs bio en France et plus de 200 fermes bio se créent chaque mois.

Si la production a augmenté, la consommation de produits issus de l’agriculture biologique a, elle aussi, connu une année faste. D’après une enquête menée par l’Agence Bio, 9 français sur 10 ont consommé des produits bio en 2016 et 69% déclarent même en consommer régulièrement. Ils étaient 65% en 2015. Pour rappel, en 2003, 46% des français assuraient ne jamais manger de produits biologiques. « Ils trouvent dans la Bio une réponse à leurs attentes avec une agriculture d’avenir, basée sur le respect de l’environnement, du bien-être animal, favorisant l’emploi et le développement territorial », précise l’Agence Bio.

Deux ans de retard

Tous ces bons chiffres sont malgré à tempérer. En effet, la Fnab (fédération nationale d’agriculture biologique) explique que les aides promises par l’état pour inciter et faciliter la conversion des paysans à l’agriculture biologique tarde à être versées. Pour certains agriculteurs, le retard est de deux ans. « À cause d’une gouvernance état-régions totalement défaillante, de nombreux agriculteurs bio sont en grande difficulté financière, malgré la bonne santé de leurs exploitations », regrette la Fnab. « On nous avait promis un versement en mars mais ça a été reporté. On espère que ce sera réglé le plus rapidement possible », ajoute Antoine Besnard.

Une demande en forte hausse, des agriculteurs de plus en plus nombreux à sauter le pas… On pourrait croire que l’agriculture biologique a de beaux jours devant elle. Pour en être définitivement convaincu, il faudrait une véritable volonté politique de changer de modèle agricole. Nous n’y sommes pas encore.

Pour aller plus loin

www.agrobio-bretagne.org

www.agencebio.org

www.fnab.org




À Sarzeau, une association pour Rebom-dir dans la vie

L’association Rebom est un chantier d’insertion qui accueille entre 10 et 18 personnes. Les salariés produisent des légumes bio qui sont ensuite vendus localement.

Sur la presqu’île de Rhuys, à Sarzeau (56) plus exactement, l’association Rebom (prononcé rebond) est, à la fois, un chantier d’insertion et une exploitation maraîchère.

Depuis 2010, elle accueille, sur les cinq hectares cultivés en bio, des personnes en réinsertion, une dizaine en hiver et jusqu’à 18 en été. « Nous sommes un levier pour permettre aux personnes en réinsertion d’avoir un boulot, de construire un projet ou de rebondir dans la vie », explique Thibault Le Bayon, encadrant du chantier d’insertion.

Les salariés du chantier d’insertion participent à toute l’activité maraîchère, du semis à la récolte, mais aussi à la vente. Ils sont embauchés pour six mois, renouvelables trois fois. « Les salariés bénéficient d’un suivi personnalisé par une conseillère d’insertion professionnelle », précise Thibault Le Bayon.

Développer la libre cueillette

La production de Rebom est écoulée en vente directe : « Nous sommes présents sur le marché de Sarzeau trois jours par semaine. Nous faisons aussi de la vente sur place et de la libre cueillette ». Une partie de la production est vendue à des restaurant scolaires, des restaurants et des magasins spécialisés comme BioRhuys et BioGolfe. « Nous proposons également des paniers livrés ou à venir chercher sur place », ajoute Thibault Le Bayon.

Les salariés du chantier d’insertion viennent de tous les horizons : « Il n’y a pas de profil type. Les salariés ont entre 18 et 50 ans. Ils peuvent être en attente de reconnaissance de handicap ou en situation d’addiction ».

Pour la saison à venir, l’association Rebom espère agrandir et développer la libre cueillette. Si vous cherchez un endroit où vous fournir en légumes bio et locaux, n’hésitez plus, rendez-vous chez Rebom.

Pour aller plus loin

www.rebom.org




Les alternatives aux pesticides, c’est par ici !

La semaine des alternatives aux pesticides a lieu, depuis 2005, chaque année du 20 au 30 mars. Cette année, les organisateurs veulent distribuer un kit des alternatives aux pesticides. Pour financer ces kits, une campagne de financement participatif est en cours.

Depuis 12 ans, du 20 au 30 mars, l’association Générations Futures et l’Acap, un collectif de 170 organisations, organisent la semaine des alternatives aux pesticides. L’objectif de cette semaine est de sensibiliser sur les impacts environnementaux et médicaux des pesticides, de promouvoir les alternatives et fédérer un réseau d’acteurs pour un futur sans pesticides. « La semaine pour les alternatives aux pesticides est un temps fort de mobilisation national et international, qui se tient chaque année à la période de reprise des épandages de pesticides », détaille le site de Générations futures.

Durant cette semaine, de nombreux événements sont organisés partout en France et dans une quinzaine de pays. Au programme, visites de fermes bio, d’apiculteurs, ateliers de jardinage au naturel, marchés paysans, conférences, ciné-débats, spectacles, repas bio, formation à la permaculture ou au zéro pesticide dans les communes… En 2016, plus de 1000 événements, dans 17 pays participants, ont rassemblé 400 acteurs de terrains.

60 000 tonnes répandus chaque année

Cette année, les organisateurs font appel à la générosité des éco-citoyens pour « faire fleurir les alternatives aux pesticides ». Une campagne de financement participatif a été lancée afin de créer un kit des alternatives aux pesticides contenant des brochures sur les alternatives aux pesticides, des affiches pédagogiques, des infographies « du champ à l’assiette », des badges… « Autant d’outils inédits, pour lesquels nous n’avons pas aujourd’hui le budget mais qui permettront d’informer sur les alternatives aux pesticides pour démontrer que l’usage des pesticides n’est pas une fatalité », avance Générations futures.

Car si la situation en France s’améliore – 21 nouvelles fermes bio chaque jour en 2016 – nous sommes loin des objectifs du Grenelle de l’environnement. Il visait les 20 % de surface agricole utile en bio d’ici 2020. Nous n’en sommes qu’à 5,8 %. La France reste le deuxième pays d’Europe le plus utilisateur de pesticides. Plus de 60 000 tonnes de pesticides répandus chaque année sur notre territoire : « À quelques semaines de la reprise des épandages dans les champs et alors que les derniers chiffres de l’utilisation des pesticides en France restent mauvais, il est plus que jamais important de nous aider à montrer qu’il faut développer les alternatives aux pesticides ! »

Pour aller plus loin

www.generations-futures.fr

La campagne de financement participatif

 




Au jardin potager de la Ruée, Marco invente l’agri-culture culinaire

Installé à Bain-sur-Oust depuis deux ans, Marco Felez fait pousser des légumes en biodynamie. Il propose également des cours de cuisine et des ateliers variés. Il organise aussi des banquets du potager.

À Bain-sur-Oust (35), il y a un jardin potager d’un genre un peu particulier, le jardin potager de la Ruée. Marco Felez s’est installé là, il y a deux ans, pour lancer son projet autour de trois axes : produire des légumes de qualité, proposer des cours de cuisine et organiser des événements festifs.

Après une carrière dans l’animation culturelle et la coordination de projet, il se lance suite à un licenciement économique. « C’est un vieux rêve d’enfance, je voulais être jardinier quand j’étais petit », explique le sexagénaire qui a suivi, étant jeune, une formation de cuisinier.

Il propose désormais des légumes en vente directe, deux fois par semaine, avec trois formules : les paniers, la cueillette et la vente au détail. « Je travaille en biodynamie, détaille-t-il. C’est-à-dire que je prends soin de la terre et que je travaille en rythme avec la nature, en suivant les saisons et l’influence des planètes. Il est important de comprendre le processus de développement de la plante. »

Des ateliers lacto-fermentation, séchage de légumes…

Deux à trois fois par saison, Marco Felez propose aussi des cours de cuisine : « On apprend au gens à être autonome en cuisine grâce à des modes opératoires et des processus culinaires. Une fois que l’on sait faire une base aromatique, une sauce, une réduction ou que l’on connaît les modes de cuisson, on peut se débrouiller ! » Des ateliers de lacto-fermentation ou de séchage de légumes sont également au programme pour apprendre à conserver les légumes.

Enfin, pendant la belle saison, le jardin potager de la Ruée accueille les banquets du potager, avec des chants, des spectacles, un repas… Pendant la journée, des stages sont organisés, en rapport avec les animations. « Je puise dans mes expériences professionnelles pour proposer des animations variées, diversifier mon activité et créer du lien sur le territoire », se réjouit Marco.

Un programme plus qu’alléchant et qui nous prouve qu’il ne faut pas avoir les deux pieds dans le même sabot. N’hésitez pas à rendre visite à Marco, il a encore plein de projets en tête !

Pour aller plus loin

La page facebook du jardin potager de la Ruée




De jeunes agriculteurs lancent leur épicerie locale et participative

Quatre jeunes agriculteurs bretons ont imaginé un concept d’épicerie locale paysanne et collaborative : Élocop. Regroupés au sein d’une association, ils proposent des produits locaux, garantis sans OGM et sans antibiotiques, issus de filières de production durable. En attendant l’ouverture du magasin, courant 2016, qui sera le premier de ce type dans le Pays de Morlaix, ils confectionnent, deux fois par semaine, des paniers de légumes, de viandes, de fromages. Reportage.

« Désolée, je n’ai plus de salades, à cause de la grêle, elles sont abîmées. Je n’ai que les pommes de terre aujourd’hui. Ça ira ? » Nous sommes à Pleyber-Christ (29), dans un hangar qui abritait auparavant une quincaillerie. Le nuit est tombée depuis quelques minutes, et il ne fait pas chaud. Ce soir, c’est Sandrine qui distribue les paniers de légumes. La jeune femme de 24 ans, accompagnée de son fils de quelques mois, sert une jeune cliente qui vient chercher ses légumes. Des légumes dont elle a préalablement passé commande sur internet.

C’est ici que s’installera, dans les prochains mois, le magasin de producteurs Élocop, au cœur de ce village de 3 083 habitants. Si, ce lundi soir, les clients ne sont pas légion, la distribution cartonne le vendredi. « On a une soixantaine de commandes à honorer ce jour-là », commente Sandrine, qui montre les cagettes alignées sur le sol en prévision du rush de fin de semaine.

Le projet Élocop a débuté il y a maintenant trois ans. « C’était une idée de la mairie », raconte Sandrine. Au centre-bourg, la mairie vient alors de réhabiliter une friche industrielle en un ensemble de logements et de commerces. « La municipalité voulait que des producteurs locaux investissent les lieux afin de commercialiser leurs produits et de conserver un dynamisme rural au sein de Pleyber-Christ. » Quatre jeunes agriculteurs, tous installés en bio, manifestent leur intérêt : l’espace pourrait devenir un lieu de vente directe que certains pratiquent déjà.

S’approvisionner en centre-bourg, sans se rendre au supermarché

« Nous avons alors créé l’association “Croquez local à Pleyber” », se remémore Sandrine. Aidés par la commune et par le renfort de stagiaires, le projet Élocop se met en route. Objectif : monter une épicerie locale, le premier magasin de producteurs de ce type à voir le jour sur le territoire de la communauté de communes de Morlaix. Une opération de financement participatif en ligne est alors lancée pour récolter 20 000 euros. La mise en place de l’épicerie semble alors sur de bons rails.

Mais il faudra néanmoins changer de lieu d’implantation : le loyer demandé par la communauté d’agglomération de Morlaix, propriétaire des locaux commerciaux de l’ancienne friche industrielle, est trop cher pour la petite équipe. « Nous, ce que nous voulions, c’était rester en centre-bourg : beaucoup de contributeurs au financement participatif étaient de Pleyber-Christ », commente Sandrine. Soutenus encore une fois par la mairie, les jeunes agriculteurs parviennent à trouver un nouveau lieu d’installation : ce sera dans l’ancienne quincaillerie, non loin du cœur du bourg.

« Une prise de conscience du mal-manger »

En attendant les aménagements du hangar, qui devraient démarrer au printemps 2016, Élocop poursuit son bonhomme de chemin. Et fidélise déjà des clients. Comme Gwénola, animatrice en maison de retraite, venue chercher ses légumes ce lundi. « Nous, on est enchantés », confie-t-elle. « On attendait depuis longtemps d’avoir accès à de la nourriture locale, produite de façon raisonnée, près de chez nous. » Pour elle, par les temps qui courent, ce mode de consommation est même devenu indispensable. « Il y a une prise de conscience de beaucoup de gens par rapport au mal-manger, les gens n’en peuvent plus de ce trop plein d’additifs dans les produits préparés. Ils espèrent un retour au raisonnable », commente-t-elle.

Même écho du côté de Geneviève, qui récupère ses poireaux, épinards, choux et pommes de terre. « Les temps changent, et les modes de consommation évoluent peu à peu. Il y a un retour au « manger sain » », confirme-t-elle. Sandrine approuve et apprécie les commentaires. Elle qui a fait de la vente directe un pilier de son projet d’installation en agriculture bio apprécie également les relations qu’elle entretient avec les consommateurs. « J’aime bien le contact avec les gens, et j’aime bien savoir où va ce que je produis. C’est aussi très intéressant de partager avec eux, par exemple des conseils pour cuisiner les légumes », déclare-t-elle. 

La vente directe est aussi synonyme de contraintes, notamment au niveau gestion du temps et logistique. « Si cela nous permet de mieux valoriser nos produits, les commandes en panier nous prennent quand même énormément de temps, constate la jeune agricultrice. Par exemple, sur mon exploitation, ça me prend deux jours. Pour les commandes livrées le vendredi, je fais, le jeudi, toutes mes récoltes de légumes qui se conservent plus longtemps, comme les carottes ou les betteraves. Et, le vendredi matin, je termine par les épinards et les salades, pour un maximum de fraîcheur. De 10 heures à 16 heures, j’enchaîne la préparation des commandes, avec soixante paniers à préparer. »

Des consommateurs acteurs de la gouvernance du projet

Pour aller plus loin :
Le site web du projet Élocop
La page Facebook du projet Élocop