À Chevaigné en Ille et Vilaine, Julien Fanny s’affaire entre cuves et alambics. Depuis trois ans, ce breton a ouvert sa propre distillerie, Awen Nature. Il propose des spiritueux pas comme les autres : labellisés bio, composés de matières premières locales et issus d’un processus respectueux de la nature. Une recette qui fonctionne. Désormais, Julien cherche à augmenter sa production. Il a ainsi lancé un financement participatif pour acheter un nouvel alambic.
Absinthe, gin, eau de vie… Une reconversion originale
« Avant, j’étais ferronnier d’art», relate Julien, fondateur d’Awen Nature, « j’ai toujours aimé la création ». Mais des problèmes de santé obligent le breton de 32 ans à mettre un terme à sa carrière. Il se tourne alors vers une seconde passion : les plantes. « C’était une évidence pour moi de travailler avec les plantes », confie-t-il. Déjà fin connaisseur du processus de fabrication de l’alcool, il décide d’en faire son métier. Julien créé ainsi sa propre distillerie, baptisée Awen Nature. Il y conçoit des alcools naturels à base de plantes aromatiques et médicinales. Sa production s’articule notamment autour de deux produits phares, l’absinthe et le gin.
Parti de pas grand-chose, Julien augmente petit à petit la production. Après une première année difficile, le bouche à oreille commence à fonctionner chez les particuliers et les professionnels. « J’ai eu des coups de pouce » révèle l’artisan, qui a obtenu une médaille d’argent au concours général agricole 2015 pour son absinthe au safran. L’année suivante, c’est lors d’un concours international qu’il se démarque. Il obtient ainsi la médaille d’or du concours mondial Spirits Selection grâce à son gin mist. Des récompenses qui lui ont permis de développer ses ventes auprès des cavistes et des bars.
Julien sur un stand Awen Nature
Remettre au goût du jour des produits mal aimés
Si le pari de Julien semble fonctionner, le choix du gin et de l’absinthe n’était pas aisé. « En France, le gin est peu connu », explique Julien, « on a surtout des mauvais gin vendus en grande distribution ». Une méconnaissance qui n’encourage pas la consommation de ce spiritueux à base de baies de genévrier. Persiste un autre obstacle : la mauvaise réputation de l’absinthe. « On a reproché à l’absinthe de rendre fou », détaille l’artisan distillateur, « mais il s’agissait seulement des effets de l’alcoolisme ». A l’âge d’or de cette boisson en 1890, la moyenne de consommation était en effet de douze verres par jour et par personne. En parallèle, de nombreuses absinthes de très mauvaise qualité, appelées « sulfates de zinc », apparaissaient sur le marché.
L’absinthe, devenue symbole de l’alcoolisme, est alors largement contestée. Elle est finalement interdite en 1915. Une interdiction non sans lien avec les viticulteurs, pour qui l’absinthe constituait une concurrence imbattable. « Le succès de cette boisson se faisait au détriment des viticulteurs », expose Julien, « le lobby du vin a amplement contribué à faire interdire l’absinthe ». Pourtant, la plante absinthe possède de nombreuses vertus médicinales, et est notamment reconnue pour ses bienfaits sur le système digestif. Il faudra cependant attendre près d’un siècle pour que des études scientifiques redonnent à la sulfureuse boisson ses lettres de noblesse. Elle est ainsi réautorisée sous son nom d’origine en 2011.
L’absinthe rouge d’Awen Nature
Un processus de production exemplaire
La dangerosité des spiritueux, Julien la voit plutôt ailleurs : chez lui, pas de substances chimiques dans les bouteilles. « Dans les produits conventionnels il y a des choses que l’on ne peut même pas imaginer », alarme-t-il, « car pour les spiritueux, il n’y a pas d’obligation de spécifier tous les ingrédients ». Pour garantir la transparence à ses clients, le créateur d’Awen Nature a choisi la labellisation biologique et Nature et Progrès. Des produits 100 % bio, mais aussi locaux. « Je travaille au maximum en local », confirme Julien, « mon safran vient d’Ille et Vilaine et mon absinthe du pays de Redon ». Il pratique également la cueillette sauvage pour des plantes telles que la menthe aquatique et le houblon sauvage.
L’un des autres engagement écologique sur lequel Awen Nature se positionne, c’est l’eau. La plupart des distilleries fonctionnent en effet en circuit ouvert. C’est à dire que l’eau de refroidissement est jetée après utilisation : pour 60 litres d’absinthe, cela représente 300 litres d’eau. Afin d’éviter ce gaspillage, Julien a choisi l’option du circuit fermé. Il stocke donc l’eau de refroidissement dans des cuves, de manière à la réutiliser indéfiniment. « Ça prend de la place, mais c’est une évidence pour moi de ne pas polluer », témoigne Julien. Dans cette optique, les résidus de plantes issus de la distillation sont eux, compostés. Un concept qui séduit : aujourd’hui, Julien a lancé un financement participatif afin de pouvoir augmenter sa production grâce à l’achat d’un alambic. Et dans l’avenir, l’artisan-distillateur rêve d’ouvrir sa propre boutique !
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