Politique cyclable, un enjeu de transition en Bretagne comme ailleurs.
Alors que le vélo, avec une augmentation manifeste et régulière du nombre de ses pratiquant.es, est depuis quelques années le grand gagnant des déplacements estivaux tout comme ceux du quotidien, Eco-Bretons part à la rencontre du rennais Sébastien Marrec*, chercheur et consultant spécialiste des mobilités actives. Il nous apporte ses éclairages sur le développement de la pratique cyclable en France et plus particulièrement en Bretagne et nous fait un focus sur le futur envisagé et envisageable d’une région cyclable.
autant d’aménagements cyclables n’avaient été créés en si peu d’années. La fréquentation de l’infrastructure, fortement stimulée par les conséquences des grèves des transports publics et de la pandémie, va logiquement de pair avec cette progression : + 31 % entre 2019 et 2022 à l’échelle nationale, selon un échantillon de compteurs. D’autres mesures importantes comme le coup de pouce vélo (82 millions d’euros) et les aides à l’achat (65 millions) ont permis d’appuyer cette dynamique d’investissement.
En revanche, l’ambition d’atteindre 9 % de déplacements à vélo d’ici 2024 est désormais inenvisageable : les observateurs s’accordent à dire que la part du vélo dans l’ensemble des déplacements, aujourd’hui, ne dépasse pas 4 %. La Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC), qui définit la trajectoire de réduction des gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité carbone, fixe toujours un objectif de 12 % de part modale en 2030, qui ne sera atteignable que par un volontarisme sans précédent des pouvoirs publics, des employeurs et une demande sociale en croissance continue.
2 : Quelles sont selon vous les annonces importantes de ce plan et celles qui vous semblent manquer ou mériter un engagement plus généreux de l’État ?
. Un autre objectif marquant du plan est d’atteindre 100 000 km de pistes cyclables d’ici 2030, soit 44 000 km supplémentaires à réaliser en sept ans. Là aussi, l’objectif est réaliste, puisque qu’il s’inscrit dans le rythme prévu par les collectivités – à condition que ces aménagements soient principalement des pistes et des voies vertes, qui s’avèrent beaucoup plus coûteuses à réaliser que des aménagements partagés (comme les bandes cyclables ou les voies mixtes bus/vélo) mais nécessaires dès lors que la vitesse ou le nombre de voitures en circulation sont élevés. Un seul kilomètre de piste bidirectionnelle (pour rouler dans les deux sens) coûte au minimum 200 000 euros en milieu rural, sans contrainte spatiale ni intersection, et au moins 300 000 en milieu périurbain ou urbain. Un ouvrage d’art pour franchir une voie rapide, une voie ferrée ou un cours d’eau alourdit encore davantage la facture.
pour que des projets structurants et de qualité se développent sur l’ensemble du territoire. Au total, 18 euros par an et par habitant sont dépensés pour les modes actifs en France, un budget comparable à celui de l’Autriche, de la Belgique et de l’Allemagne, mais bien inférieur à d’autres. L’Irlande et les Pays-Bas, par exemples, poursuivent des efforts beaucoup plus soutenus. 2 milliards représentent moins de 3 % du budget annuel du ministère des transports en France, alors que l’Irlande investit pour la marche et le vélo 20 % de son budget national consacré aux transports. Pour donner un ordre d’idée, il faudrait atteindre 30 euros pour parvenir à une augmentation significative de l’usage et 60 euros pour atteindre un niveau de pratique comparable à celui des pays les plus avancés en Europe. Soit 4 milliards d’euros par an au niveau national, contre 1,2 milliard à ce stade ! L’Institut de l’économie pour le climat estime que les mobilités correspondent aux deux tiers des 12 milliards en besoins d’investissements des collectivités nécessaires pour la transition vers une économie décarbonée. Plus d’un quart (3,3 milliards) devrait être consacré aux pistes cyclables et au stationnement vélo. Quels que soient les évaluations, cela revient à multiplier au moins par trois le budget de 2020 (1 milliard d’euros), et à faire du développement du vélo le premier domaine d’investissement, non seulement dans le secteur des mobilités mais tous secteurs confondus. En attendant, seules quelques collectivités bénéficieront de réseaux cyclables aboutis d’ici la fin de la décennie si l’enveloppe n’est pas abondée massivement dans les années qui viennent, si tous les outils financiers possibles ne sont pas mobilisés.
Les trois quarts des Bretons utilisent la voiture comme mode de déplacement principal, notamment parce que les services de mobilité sont moins développés que dans d’autres régions, à l’exception des nombreuses aires de covoiturage. Le budget carburant augmente, les distances à parcourir s’allongent, le parc automobile vieillit. Les transports représentent 32 % des émissions de gaz à effet de serre (dont la moitié due à la voiture individuelle) et 36 % des besoins en énergie de la population, ce qui en fait le deuxième poste derrière le bâti (construction, consommation énergétique…).
Seules deux grandes villes se démarquent par leur « cyclabilité » : Rennes et Lorient, qui ont amorcé une politique en faveur du vélo dès les années 1990. La vitesse à Lorient est aujourd’hui quasi intégralement limitée à 30 km/h, ce qui améliore le sort des cyclistes. La Ville de Rennes porte une politique plus ambitieuse de modération de la circulation motorisée depuis quelques années (avec la création, cette année, d’une zone à trafic limité dans le centre historique), d’aménagements en site propre et de consignes gratuites pour se stationner. Quant à Rennes Métropole, elle déploie rapidement un « réseau express » pour relier la ville-centre aux communes de première couronne et a généralisé la possibilité de tourner à droite aux feux rouges. Le Baromètre des villes cyclables – qui mesure régulièrement le ressenti des cyclistes sur leur conditions – montre que le climat général est médiocre, à l’exception de ces deux villes, de plusieurs communes balnéaires ou périurbaines et des communes insulaires, comme Groix (56) ou Bréhat (22), où le trafic motorisé est de facto plus faible ou quasi inexistant par rapport au continent. Ainsi, des villes importantes comme Quimper, Saint-Brieuc, Vannes et même Brest ou Saint-Malo ne sont guère favorables à la pratique.
4 : Comment les territoires bretons peuvent utiliser les récentes annonces ministérielles pour refaire du vélo un transport de masse, qui participe pleinement au système de mobilité des citoyen.nes ?
Pour moi, la priorité est d’abandonner les projets routiers, qui, sauf lorsqu’ils cherchent réellement à dévier un trafic de transit passant par une zone agglomérée, sont inutiles. Ils accaparent beaucoup d’argent public, des terres agricoles et des espaces naturels. Réorienter les moyens initialement prévus ou jusque-là consacrés à ces projets, comme l’a opéré l’Ille-et-Vilaine, représente une opportunité de premier plan. Le Finistère et les Côtes-d’Armor dépensent toujours beaucoup moins pour le vélo que l’Ille-et-Vilaine et continuent de privilégier plusieurs projets routiers, malgré leur attractivité à la fois sur les plans démographique et touristique. Ensuite, les collectivités ont intérêt à s’inspirer de ce qui se fait de mieux, en Bretagne, en France et à l’étranger, sortir de cette croyance selon laquelle ce qui est fait localement est optimal, sinon bien suffisant pour le niveau de pratique actuel : il s’agit de se projeter dans un contexte où il y a aura trois fois plus de cyclistes. Toutes les plateformes de voies ferrées inutilisées de longue date devraient être transformées en voies vertes, et une partie du réseau routier rural réservé aux seuls véhicules des riverains et quelques ayant droits pour offrir des itinéraires plus sécurisés aux cyclistes.
Prioriser, trouver des solutions rapides et économiques est donc souvent incontournable. Le dernier congrès de la FUB, qui s’est tenu à Rennes, a justement fourni des pistes en la matière en montrant que le vélo deviendrait incontournable dans le monde de l’après « tout-voiture ». A ce propos, si les élus et techniciens doivent s’appuyer sur les dernières recommandations du Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), un établissement public d’État et le travail de bureaux d’études spécialisés dans les modes actifs, ils peuvent aussi faire appel au Collectif Bicyclette Bretagne (CBB). Ce regroupement régional de vingt-six associations d’usagers du vélo, créé en 2020, interpelle d’une seule voix l’ensemble des collectivités bretonnes pour réclamer un réseau cyclable couvrant la totalité du territoire, des équipements et mesures afin de développer l’intermodalité – notamment l’aménagement de parcs de stationnement pour les vélos dans tous les pôles intermodaux (avec le train, les cars, les bus, les bateaux, le tramway de Brest, le métro de Rennes, etc.). Le CBB promeut les plans de mobilité pour les établissements scolaires, les entreprises et les administrations. Il prend position sur les grands projets d’aménagement et de mobilités au nom des usagers. Le défi de ce type de collectifs est de se structurer pour s’imposer comme un interlocuteur de poids crédible, car pour le moment les associations locales sont loin d’être en situation d’être consultées et de négocier avec les collectivités.
5 : Eco-bretons étant un média engagé dans la transition écologique, quelle est selon vous la place du vélo dans cette transition ?
40 % de tous les déplacements effectués en voiture font moins de 5 kilomètres et qu’à ce titre “le vélo doit donc jouer un rôle essentiel”, puisque 5 kilomètres se parcourent en une vingtaine de minutes avec un vélo classique et une dizaine avec un VAE. On peut le dire autrement : 70 % de tous les déplacements de 2 à 5 km sont réalisés en voiture. Le vélo, sur les mêmes distances en comparaison, ne représente que 3 à 5 %. On peut ajouter que 58 % des actifs qui font un kilomètre ou moins pour aller au travail ont recours à la voiture et que jusqu’à 5 kilomètres, le vélo ne représente que 4 à 5 % des déplacements. On se situe donc en plein dans la pertinence de son domaine de portée (la distance à parcourir). Le potentiel de progression est immense. Cependant, à force de structurer les déplacements, la voiture est devenue une dépendance, un système qui marginalise les autres modes de déplacement, empêche beaucoup de Français.es d’envisager d’utiliser ces modes et exclut des personnes de la mobilité : les plus modestes, les enfants, les personnes âgées qui ne veulent plus ou ne peuvent pas conduire de voiture.
L’assistance électrique constitue une révolution : elle permet d’effacer le relief et élargit le périmètre envisageable de pratique. Un million de vélos à assistance électrique (VAE) se vendront en 2025 en France, soit près de la moitié du marché des vélos neufs. Ceux qui les utilisent parcourent des distances plus longues et pédalent plus fréquemment. Les VAE se prêtent très bien aux besoins des habitants de territoires avec beaucoup de dénivelé, peu ou moyennement denses, mais aussi toutes celles et ceux qui rechignent à se mettre au vélo classique parce qu’ils redoutent l’effort, le temps nécessaire à parcourir certaines distances, du démarrage au feu en étant mêlé aux voitures. Ils contribuent à accélérer la démocratisation du vélo au quotidien, même si l’infrastructure et l’offre de stationnement ne sont pas souvent satisfaisants.
Il faut éviter la « rupture de charge », autrement dit pouvoir facilement passer du vélo à d’autres modes grâce à des équipements de stationnement sécurisés, à l’information voyageur en temps réel, à des services de location, à la sécurisation de l’accès à pied et à vélo aux pôles intermodaux. Aux Pays-Bas, plus de 40 % des usagers du train se rendent à vélo à la gare, à comparer aux 5 % d’usagers du TER qui ont la même pratique dans notre pays. Pourtant, sept Français.es sur dix sont à moins de 5 km d’une gare. Presque un tiers des émissions du secteur du transport pourrait être évité dans notre pays grâce à un système reposant sur une intermodalité efficace.
Les journalistes, par exemple, sont beaucoup mieux familiarisés avec les politiques en faveur du vélo, les aménagements et leur conception, la réglementation et la diversification des pratiques et du matériel. Le plan de 2018 a contribué à faire évoluer les mentalités, à révéler les bénéfices du vélo et son potentiel comme mode résilient, à comprendre que la voiture, loin d’être promise à l’interdiction pure et simple comme voudraient le faire croire certaines caricatures, retrouvera sa juste place en tant que véhicule collectif de quatre, cinq places ou plus : beaucoup moins utilisée, partagée et sobre – et électrique bien sûr, en sachant que l’électrification n’est pas le remède magique à toutes les nuisances de l’automobile. L’un des évolutions notables de ces dernières années, c’est la reconnaissance du vélo comme solution crédible dans beaucoup de territoires périurbains et ruraux (et non plus seulement en milieu urbain) par un cercle de plus en plus important de personnes.
Alors en selle, amusez-vous bien et partagez partout votre plaisir d’être à vélo !
Le plancton, ce poumon de la planète trop méconnu
Le mot plancton vient de “planctos”, en grec ancien, qui veut dire dériver, flotter, errer…
Le plancton est l’ensemble des végétaux et animaux aquatiques qui dérivent au gré des courants.
Généralement microscopiques ou de petite taille, ils sont capables de mouvements limités, mais incapables de se déplacer à contre-courant.
«Le plancton a une très grande importance en tant que régulateur des climats puisque le CO2 que nous émettons dans l’atmosphère est pompé par les océans. Pour faire la photosynthèse, le plancton a besoin de CO2: c’est ce qu’on appelle la pompe à carbone. C’est cet enfouissement constant du CO2 dans les océans qui maintient un climat raisonnable dans une certaine zone. Or le CO2 croît dans l’atmosphère et on ne sait pas combien de temps le plancton va être capable de s’adapter. À chaque fois que l’on respire, une bouffée d’oxygène sur deux est due au travail du plancton dans l’océan, qui produit par photosynthèse la moitié de l’oxygène que nous respirons.» explique le biologiste marin Christian Sardet qui a notamment participé à la série « Chroniques du plancton » réalisée dans le cadre de l’Expédition Tara Océans. Le plancton est également à la base de beaucoup de chaînes alimentaires océaniques et représente à lui seul 98 % de la biomasse océanique.
Alors venez découvrir ce fabuleux plancton à Moëlan sur mer dans le cadre de la fête de la science 2023 !
Au programme : – Rappels et généralités sur le plancton – activité et observations du Bélon – Fragilité et interdépendances. Perspectives.
PRATIQUE :
Conférence gratuite à 18h
Centre culturel l’Ellipse
Rue Pont ar Laer, 29350 Moëlan-sur-Mer
Plus d’infos : https://rbbbm.bzh/
La Vie en Bulles, Le festival BD qui pense le monde
C’est au bord de la sublime ria d’Etel à Saint-Hélène dans le Morbihan, que nous partons à la rencontre de LaPACH, la Petite Asso Culturelle Hélénoise, qui propose le week-end du 5-6 février, son premier festival bd, « La vie en bulles » tournée vers la bd non fictionnelle, une bd rattachée au réel et qui aborde de multiples sujets de société, qu’ils soient sociologiques, historiques ou encore écologiques .
Nous retrouvons Nancie, Joël et Pascale, trois des bénévoles de l’association créée il y a un an, emmenée par le désir commun de citoyen.nes de la commune d’ouvrir les esprits aux problématiques actuelles, de faire émerger des débats d’idées pour avancer tous et toutes dans un monde de plus en plus complexe.
La bande dessinée s’est imposée comme un parfait médium après que des bd comme « Les algues vertes », qui a circulé entre eux, « La bombe » sur Hiroshima ou encore « L’odyssée d’Hakim » sur les réfugiés, leur ont fait prendre conscience qu’elle était un formidable moyen d’accès au savoir, au partage de connaissances et qu’elle permettait de nombreux débats accessibles à toustes. Le dessin, l’image, véritable création artistique, intègre le réel de ce monde dans son propos et amène à exercer un oeil critique sur la société et aussi à partager de nombreuses émotions . La bande dessinée, autrefois considérée comme un art mineur, se révèle de plus en plus comme un indispensable dans la compréhension du monde.
Ce premier festival est très ancré dans son territoire et d’ailleurs la Ch’patule, sa mascotte, va nous servir de guide pour découvrir quelques temps forts du week-end, où l’on ne manquera pas également d’aller saluer ses congénères, les spatules, oiseaux migrateurs actuellement présents dans la ria. Celui-ci s’articule autour de rencontres avec les auteur/trices et éditeurs, de conférences, d’expositions, d’ateliers de dessin et de concerts.
Pour Eco-bretons, la Ch’patule nous fait quelques propositions de rencontres parmi une riche programmation. Samedi, la table-ronde réunira Désirée et Alain Frappier, duo d’auteurs de romans graphiques dont l’oeuvre montre à voir tout ce que la bd peut apporter aux sciences sociales en mêlant l’intime à d’importantes recherches historiques sur des thèmes comme l’IVG dans « Le choix » ou la politique chilienne sous Allende dans « Le temps des humbles » et Audrey Lebel, journaliste indépendante, notamment dans La revue dessinée.Ils pourront très certainement nous éclairer sur cette nouvelle forme journalistique et documentaire dessinée pour évoquer des faits
d’actualité comme des faits historiques. On peut également noter dimanche, la rencontre entre Gwénola Morizur, autrice de « Bleu pétrole », qui narrait le combat de son grand-père, maire de Portsall, pour obtenir dédommagement suite au naufrage de l’Amocco Cadiz, et The Seacleaners, association proposant des solutions pour protéger l’océan de la pollution plastique . Rencontre autour d’une table-ronde qui traitera des problématiques des marées noires et de l’océan de plastique. Il paraîtrait même qu’une baleine de 9 mètres viendra d’un coup de nageoires rendre visite aux festivalier.es mais chut, gardons la surprise!
Un festival engagé sur la forme et sur le fond
Comme le dit si bien LaPACH, le festival est engagé sur le fond mais aussi sur la forme et cela se traduit par de nombreuses actions des personnes organisatrices. Elles ont fait le choix de rémunérer les artistes présent.es en se basant sur la Charte des auteurs et illustrateurs, revendication portée par eux depuis de nombreuses années pour soutenir la création artistique en France. Elles ont également veillé à inviter autant d’autrices que d’auteurs car la question de la visibilité féminine dans le milieu de la bande dessinée, comme dans tant d’autres, est un sujet actuel de société et elles se doivent d’y participer comme le souligne Nancie. On peut d’ailleurs citer la bd « Il est où le patron ? » de Maud Benezit et des Paysannes en polaire chez Marabulles, qui traite de ce sujet dans l’agriculture.
Le festival s’engage également auprès de leur communauté de communes , la CCBBO qui est un territoire zéro déchets, en signant la charte pour être labellisé « festival éco-responsable » ( avec des critères incluant par exemple une alimentation bio, locale en circuit court pour les auteur/trices). Il se passe, certes à Saint-Hélène sur le week-end, mais il a souhaité également inclure toutes les communes environnantes par le réseau de leurs bibliothèques qui, grâce à l’aide de la Médiathèque départementale du Morbihan, ont pu augmenter leur stock de bd non fictionnelles au cours du mois de janvier afin de faire découvrir ce genre littéraire à leurs adhérent.es. Le festival a noué des partenariats avec des librairies indépendantes, Coccibulle à Lorient, La Dame blanche à Port-Louis ainsi qu’avec Book Hémisphères à Kervignac qui oeuvre dans le domaine de l’insertion et de la revalorisation de livres. Insertion également présente grâce aux Ateliers ACTE de Merlevenez qui va s’occuper de la scénographie en matériaux de récupération en bois de palette, la Ch’patule devrait y être confortablement installée !
Pour LaPACH, les valeurs de respect des droits humains, de préservation de l’environnement, de vivre-ensemble et de l’éveil culturel sont importantes et elles vont naturellement se retrouver dans « La vie en bulles » . L’entrée abordable à 2 euros y participe également afin que chacun.e puisse y accéder.
Le champ des possibles semble infini en bande dessinée et nul doute que « La vie en bulles » deviendra un festival marquant et incontournable sur les sujets sociétaux et qu’il rayonnera bien audelà de la Bretagne. Le bel enthousiasme et l’audace de tous ceux et celles qui l’ont rêvé et réalisé, ne peuvent que donner envie de venir et d’y revenir ! Alors tous et toutes présent.es le 5-6 février, les yeux et les oreilles grand ouverts et pourquoi pas le crayon à dessin brandi comme Napoléon sur sa Ch’patule à Saint-Hélène, où l’imagination et la réflexion vont pouvoir s’échapper pour se relier au monde qui nous entoure.
A la découverte de quelques bd non-fictionnelles en lien avec les notions de transitions écologiques présentées par une partie de l’équipe de LaPACH :
- d’Alain Bujak et Damien Roudeau chez Futuropolis
Bande dessinée retraçant l’histoire méconnue d’un combat citoyen contre la construction d’un barrage à Serre de la Fare dans le but de dompter La Loire et qui montre comment un combat local, a pu devenir international grâce aux propositions alternatives du collectif. Propositions qui ont pu être reprises et mises en oeuvre dans d’autres pays en participant ainsi à la préservation de nombreux écosystèmes bien au-delà de celui de La Loire.
Le choix de Nancie : « Comment devient-on raciste? » de Carole Reynaud-Paligot, Ismaël Méziane et Evelyne Heyer chez Casterman
Bande dessinée explorant les biais développés culturellement et qui amène à comprendre en profondeur les mécanismes menant au racisme et cela par un échange nourri de réflexions entre une historienne et une anthropologue généticienne. On est ici sur une transition personnelle vers le vivre-ensemble , question d’actualité si présente…
Sur le thème de la différence, on peut noter la venue au festival de Charlotte Mével pour sa très belle bd « La rousseur pointée du doigt ».
Le choix de Joël : « Deux mains dans la terre » de Laetitia Rouxel et Jacques Caplat chez Actes Sud bd
Bande dessinée retraçant la transition personnelle d’un agriculteur prenant conscience de l’importance de son métier dans les problématiques environnementales et sociales actuelles et qui va, peu à peu , opérer un changement complet de ses pratiques pour tendre vers une véritable agriculture agroécologique. Cette bd montre son cheminement, ses doutes et interrogations et met magnifiquement en valeur les notions d’entraide paysanne, de partage de connaissances et de générosité du monde paysan envers tout le vivant. Encore un champ des posssibles ouvert qui donne de l’espoir dans l’avenir ! A noter que Laetitia Rouxel sera présente au festival.
Programme du festival :
site internet: https://lavieenbulles.com/programme-2022/
facebook: https://www.facebook.com/lapetiteassoculturellehelenoise/
instagram: https://www.instagram.com/lavieenbulles_festival/
L’équipe de LaPACH est très active et vous pouvez suivre leurs recommandations de lecture sur leur blog régulièrement alimenté ainsi qu’une bibliographie de BD par thèmes (géopolitique, environnement,chroniques sociales, histoire..)
blog : https://lapach.over-blog.com/2021/02/des-bd-pour-tous-les-apaches.html
bibliographie : https://lapach.over-blog.com/2021/02/en-creation.html
Dans l’infusoir d’Albertine, du côté de Concarneau
(Plume Citoyenne) A quelques encablures de sa célèbre ville close, Concarneau possède un nouvel abri pour les pêcheurs de mots et autres amoureux d’aventures littéraires. La librairie Albertine a ouvert ses portes en 2019 et se sent bien ancrée au cœur de la ville bleue. Un lieu qui participe à la transition écologique grâce à l’engagement de ses propriétaires.
Par un vendredi de marché, partons à la rencontre de Jean-Baptiste et Héloïse qui nous accueillent dans ce lieu qu’ils ont créé et pensé autour de valeurs de partage et de transmissions. Albertine est une librairie généraliste mais la balade entre ses rayons révèle le choix et les goûts de ses libraires pour les sciences humaines, l’écologie, le féminisme et bien sûr la littérature. Des sensibilités marquées qui diffusent dans tous les domaines comme va nous l’évoquer Héloïse qui nous reçoit. Ouvrir une librairie était pour ces deux passionnés aux racines bretonnes comme un rêve, un fantasme qu’ils se racontaient… Quand le décalage entre ses convictions personnelles et sa profession est devenue trop insupportable, Jean-Baptiste, ancien contrôleur de gestion notamment dans le domaine militaire, a décidé de sauter le pas et de se lancer avec sa compagne, ancienne professeure de philosophie, dans l’ouverture d’Albertine.
Albertine, référence proustienne pour le côté littéraire et poétique mais aussi référence à Albertine Sarrazin pour le côté politique, écrivaine et femme indomptable ayant connu la prison et la prostitution au cours de sa vie intense.
Les personnalités, les engagements des libraires se dessinent dans leurs différents rayons où l’on peut apercevoir les bandes dessinées d’ Alessandro Pignocchi qui relient l’Amazonie aux ZAD ou encore dans le rayon jeunesse où ils ont à cœur d’éveiller la sensibilité des enfants.
Au delà du plaisir pur de la littérature, très présent chez eux, Héloïse évoque les prises de conscience que certaines lectures ont eu sur eux comme celle de « Saison brune » de Philippe Squarzoni sur le dérèglement climatique ou « La bombe »d’Alcante, Bollée et Rodier qui narre l’histoire de la bombe atomique.
En cette drôle de période épidémique, le confinement n’a fait que renforcer la conviction d’Héloïse sur l’importance des rapports humains dans son métier, et même si le click and collect a été salutaire pour les soutenir, elle laisse volontiers cela aux plates-formes numériques désincarnées. Une autre forme de résistance au monde voulu par celles-ci…
L’originalité d Albertine réside aussi dans « L’Infusoir », moment de rencontre autour de livres de sciences humaines où les lecteurs viennent partager leurs lectures, nourrir leurs réflexions au monde et tisser des liens. Des livres comme ceux de l’anthropologue Nastassja Martin ou du philosophe Baptiste Morizot y ont notamment été évoqués. Les livres sont librement choisis par les participants et tous les 3, 4 mois, un thème peut aussi être établi comme celui des « vivants »lors d’une précédente rencontre. Le choix du mot « Infusoir » est expliqué par Héloïse par l’importance de la lenteur, du besoin de ralentir. « La pensée prend du temps et ce temps est nécessaire véritablement…surtout quand il s’agit de prise de conscience qui vont affecter aussi notre manière de vivre…Pour que ce soit véritablement pensé et intériorisé, il faut ce temps, ce n’est pas juste une compréhension intellectuelle…L’Infusoir, c’était l’idée que les idées, elles vont rester avec nous après, faire leur chemin petit à petit… »
Les rencontres avec les auteur.trices sont quelque peu suspendues en ce moment mais les projets se déploient toutefois chez Albertine. Notamment celui porté par Héloïse autour du papier et de l’objet livre en lui-même. Une classe de CM2 le réalise avec elle avec la fabrication d’un livre de A à Z par le biais d’ateliers d’écriture, de fabrication du papier, de reliure japonaise et d’illustrations en linogravure. Chaque atelier est l’occasion d’un moment d’éducation populaire comme celui autour de la fabrication du papier, atelier sensoriel et manuel, qui amène des réflexions autour du recyclage, du gaspillage et des enjeux environnementaux. Elle aspire également à monter un petit laboratoire qui permettrait la fabrication de papier, papier qui pourrait être utilisé par des artistes locaux et pourquoi pas aller même jusqu’à trouver de la cellulose locale grâce aux plantes cultivées dans un jardin collectif ? Toujours ces notions de liens et de réflexions qu’amènent le livre…
La librairie Albertine est un lieu incarné par ses libraires, où il fait bon se poser, flâner et prendre le temps d’y découvrir les ouvrages patiemment sélectionnés et duquel il est difficile de ressortir les mains vides ! Les conseils d’Héloïse et Jean Baptiste élargiront sans nul doute, bien des horizons.
Pour Eco-bretons, Héloïse nous a sélectionné quelques ouvrages symbolisant pour elle la notion de transition. Elle nous les présente et nous explique les raisons de ses choix
« L’ ours et le rossignol » de Katherine Arden éditions Folio SF
Ce livre de science-fiction raconte l’histoire de Vassia, petite fille grandissant dans une Russie médiévale, récit imprégné par les traditions et les légendes russes. Vassia, qui possède la capacité de communiquer avec les esprits de la forêt, des animaux et ceux protecteurs des maisons, est confrontée à l’arrivée d’une belle-mère et d’un prêtre cherchant à évangéliser son village et s’opposant aux traditions ancestrales.
Pour Héloïse, l’écologie invite à déployer des imaginaires et la littérature y participe pleinement.
Ces imaginaires permettent de ne pas se représenter la nature comme intouchable et extérieure à nous mais au contraire d’y être pleinement intégré et d’imaginer d’autres manières de vivre en relation avec le reste du vivant.
« Au bois »de Charline Collecte éditions Les fourmis rouges
L’autrice nous emmène découvrir la forêt dans 12 petites histoires mélangeant bande dessinée et illustrations sublimes, au travers d’un regard d’enfant comme de celui d’une grande personne.
Histoires racontant par exemple les ressentis autour des saisons, des animaux de la forêt ou encore la coupe du bois ou la déforestation. Les niveaux de lecture y sont multiples, pour les petits comme pour les grands.
Pour Héloïse, un des enjeux est d’apprendre à regarder autrement, à percevoir et à s’interroger différemment sur nos milieux de vie, ici la forêt, pour éveiller, toujours, notre regard au monde.
Et le dernier choix d’Héloïse, dont on soupçonne qu’il y en aurait eu beaucoup d’autres, se porte sur :
« Fracture » d’Eliza Griswold éditions Globe
Cet essai écrit par une journaliste d’investigation, poétesse et traductrice de pachtoune, retrace 7 ans d’enquêtes implacables sur les pratiques des entreprises d’extraction du gaz de schiste. On y suit l’histoire de Stacey et de sa famille dans les Appalaches, région fortement touchée par la crise économique et dans laquelle l’espoir renaît avec l’arrivée d’entreprises minières. Mais les belles promesses de celles-ci se heurtent très vite aux conséquences écologiques, sanitaires et sociales, conséquences que ces entreprises font tout pour dissimuler. Enquête et roman où tout est factuel, on pense au « Printemps silencieux » de Rachel Carson qu’Eliza Griswold cite dans ses pages et à son combat contre les pesticides. Fracture de la Terre, fracture des hommes et fracture de ce qui fait société…
Encore un récit permettant de mieux appréhender ce qui se déroule sur notre planète afin de la conserver en meilleur état.
Contact :
Librairie Albertine
5 rue des Ecoles
29900 Concarneau
Portrait de femme n°9. Julie Dupuy, vannière tresseuse de liens
« Lorsque l’on tire un seul fil de la nature, l’on découvre qu’il est attaché au reste du monde ». Ces mots de l’écrivain américain John Muir, une des figures mythiques de la protection de la nature et penseur des relations entre l’espèce humaine et le reste du vivant, résonnent fort avec Boutok, l’atelier vannerie que Julie Dupuy a choisi de nicher sur le port de Concarneau. Dans son atelier-boutique, entourée d’artisans travaillant le bois, Julie nous reçoit avec passion pour nous conter le métier de vannière que cette ancienne chargée de mission dans le domaine des métiers d’arts, a choisi d’exercer avec cohérence, engagement et partage.
C’est par hasard qu’elle a découvert la vannerie lors d’ateliers de loisirs, attirée par la création, par une activité manuelle et pour se donner un temps à soi. Elle s’y est peu à peu plongée, se perfectionnant au fur et à mesure auprès d’autres vannier.es qui lui ont transmis leur passion, leurs savoir-faire, leurs techniques parfois ancestrales ainsi que la conscience du lien profond existant entre cette activité et le végétal. Myriam Roux qui se définit comme une plasticienne du végétal, l’a particulièrement accompagnée sur ce chemin, l’emmenant sur la technique mais aussi sur la découverte des différentes fibres tel l’osier, la ronce, le chèvrefeuille et bien d’autres… Qu’on soit dans la vannerie dite utilitaire ou celle, dite artistique, les techniques sont en fait les mêmes et Julie aime osciller entre les deux. L’artisanat est pour elle, à la lisière entre l’utilité et l’art, Boutok voulant d’ailleurs dire « panier à tout faire » en breton, elle a à cœur de lui rendre toute sa valeur.
Des « tinies-oseraies » dans une vraie démarche de proximité
L’atelier Boutok s’inscrit dans l’ESS (Economie Sociale et Solidaire) avec le choix d’être dans une SCIC (Société Coopérative d’Intérêt Collectif) pour s’extraire autant que possible du modèle néolibéral dominant. Il est aussi très fortement impliqué dans le tissu local de la région concarnoise, avec toujours cette volonté de tisser des liens profonds entre les personnes et leur environnement naturel. Julie a par exemple participé aux 48H de l’agriculture urbaine avec le fablab Konk Ar Lab. On peut tresser du végétal même sur des friches urbaines, en prenant le temps d’y dénicher des tiges comme du lierre, des graminées… Cela permet de poser un regard différent sur des espaces parfois délaissés et de se les réapproprier. Le choix d’être sur de l’agriculture urbaine se conjugue aussi au travers de sa collaboration avec la brasserie Tri Martolod, qui accueille sur son terrain, une des deux oseraies plantée au cœur de cette zone d’activité commerciale et artisanale. Le but est d’y implanter du végétal, de restaurer des écosystèmes et la brasserie a en projet également de faire des jardins partagés, des lieux de partage et d’échanges entre les habitant.es de Concarneau. L’autre parcelle de Boutok se situe quant à elle à Kervic sur la commune voisine de Nevez. Ce tiers-lieu en milieu rural accueille notamment l’Atelier Z qui propose des ateliers autour de la low-tech ainsi que de multiples évènements autour de l’écologie, du vivre-ensemble etc. Julie qualifie, en souriant, ses oseraies de «tiny-oseraies », ce qui met en valeur cette notion d’échelle car pour elle, on n’est pas obligé de grossir démesurément quand on créé une activité, ce qui va à l’encontre de bien des discours économiques… Ce sont des enjeux qui s’opposent actuellement, sur l’échelle de taille, sur un territoire donné et respecté… Il y a une vraie démarche de proximité dans son activité.
Cette démarche s’inclut également dans les ateliers qu’elle propose et où elle s’attelle à transmettre sa pratique avec enthousiasme, que ce soit en MJC ou à son atelier, auprès d’adultes ou d’enfants avec toujours en tête une approche d’éducation populaire. Les ateliers de vannerie, tout comme d’autres activités manuelles, sont des lieux où les personnes peuvent lâcher prise, découvrir le lien au vivant (elle nous confie que certaines prennent conscience à ce moment là que l’osier vient d’un arbre), se sentir valorisées en se réappropriant certains gestes, gestes que certaines se souviennent avoir vu plus jeunes auprès de grands-parents ou de voisin.es âgé.es. Cela peut parfois emmener à une forte mobilisation émotionnelle à laquelle Julie est attentive, en posant d’emblée le fait qu’il n’y a pas d’enjeu, pas d’objectifs impératifs de production dans ses ateliers. Elle souhaiterait poursuivre dans cette voie en se formant pour travailler avec des publics en situation de handicap ou d’autres éloignés de la vie culturelle. Affaire à suivre chez Boutok !
Julie Dupuy est également désireuse de travailler avec d’autres artisan.es pour sortir parfois du nécessaire travail solitaire de l’atelier. Avec Véronique Couppa, céramiste de Trégunc, elles sont dans la recherche permanente pour lier la terre et le végétal tout comme ils le sont dans la nature. Les deux matières résonnent et dialoguent ensemble dans leurs créations, et l’une comme l’autre s’entremêlent pour s’accueillir, avec une recherche commune sur le jeu des couleurs, sur les matières tout en solidité et souplesse.
Mais que savons-nous faire de nos mains ?
Quand elle parle de son métier, Julie évoque aussi le fait qu’il permet un engagement du corps, engagement pouvant être parfois exigeant. Un ancien vannier lui a d’ailleurs confié, comme une confidence protectrice, qu’il ne fallait pas tresser plus de trois heures d’affilée afin de ne pas s’user trop précocement ! Pour Eco-Bretons, Julie nous parle de ce que lui évoque la notion de transition écologique. Pour elle, la transition emmène à redéfinir la relation entre les êtres humains et leur environnement, et la vannerie répond à un certain nombre d’enjeux soulevés. La vannerie fait partie du mouvement du slow-design, on est sur le temps du végétal, c’est à dire celui des arbres pour l’osier qu’elle a choisi de tresser, l’osier faisant partie de la famille des saules. Tout simplement, il faut que ça pousse, sur un temps que nous ne maîtrisons pas et il faut l’accepter ! Pour la réalisation des objets, il faut d’abord avoir le végétal, le faire tremper plusieurs semaines car tant que la matière n’est pas assouplie, on ne peut la travailler (sauf à travailler en osier frais). Mais ce temps de fabrique permet également de respecter la matière, de ne pas la maltraiter et de prendre aussi le temps de la réflexion nécessaire à la conception de l’objet. Le slow-design permet aussi d’exprimer une certaine volonté de sortir du temps de la rentabilité à tout prix. Cette lenteur certaine permet également d’appréhender celle de la sobriété, de faire un pas de côté avec l’hyperconsommation de matières et d’énergie. La vannerie produit peu de déchets, au demeurant compostables, elle ne nécessite que peu d’outils, il n’y a besoin que d’un sécateur, d’un couteau, d’un peu d’eau, elle n’utilise pas de machines à énergies fossiles et il n’y a pas d’obsolescence programmée, tout est réparable. C’est toute une économie circulaire qui peut être mise en œuvre, circulaire tout comme la rondeur d’un boutok !
L’autonomie est également présente dans la vannerie, avec la possibilité de fabriquer soi-même ses propres outils de travail, Julie nous explique qu’autrefois, il n’était pas rare de voir des oseraies plantées au bout des champs afin que les paysan.nes puissent confectionner, par leurs propres moyens, les paniers nécessaires à leur activité. Elle s’interrompt pour évoquer une chanson de Feu! Chatterton, « Un monde nouveau » dont les paroles l’ont touchée : « Un monde nouveau, on en rêvait tous, mais que savons-nous faire de nos mains… presque rien, presque rien… ». Avec Boutok, ce presque rien se transforme en beaucoup de choses… des paniers bien sûr mais aussi des nichoirs, des lustres, des panières et tant d’autres…
Une relation réciproque avec le vivant
On ne peut finir cette rencontre sans parler un peu plus des arbres, du végétal. Julie Dupuy a planté 600 arbres l’hiver dernier qui sont certes, des puits de carbone, mais aussi un tissage avec le végétal, une attention donnée au vivant. Le soin apporté au végétal fait sens dans la réciprocité que l’arbre lui apporte en lui offrant la matière première à ses ouvrages de vannerie. L’oseraie est sans traitement chimique et en attendant de pouvoir récolter sa propre matière, Boutok se fournit chez deux vanniers en Bretagne qui travaillent dans la même démarche. La nouvelle de Giono, « L’homme qui plantait des arbres », fait non seulement partie des souvenirs anciens de Julie, mais aussi, maintenant, des messages écologistes, humanistes et politiques qu’elle met dans son activité. Rien d’étonnant donc, que Julie prolonge son engagement au travers de mandats électifs, au niveau de sa commune, de l’agglomération et de la région.
Pour prolonger littérairement la rencontre avec Boutok, les écrits de la conteuse extraordinaire qu’est Robin Wall Kimmenerer dans son essai « Tresser les herbes sacrées » peut vous emmener à ressentir comment les humain.es sont appelé.es à une relation réciproque avec le reste du monde vivant. Pour elle, ce n’est que lorsque nous entendrons les langues des autres êtres que nous serons capables de comprendre la générosité de la terre et d’apprendre en retour. L’autrice, scientifique de renom et membre de la nation Potowatomi , évoque poétiquement par ces mots, le lien de son peuple avec l’avoine odorante, graminée que les vanniers récoltent avec respect : « Par le biais de l’offrande de tabac et des remerciements, mon peuple dit à l’avoine odorante : « j’ai besoin de toi ». En se régénérant après récolte, la graminée dit à mon peuple : « j’ai besoin de toi aussi ». Mishkros kenomagwen. Ou la leçon de l’herbe ? Grâce à la réciprocité, le don est renouvelé. Toute prospérité est mutuelle. »
Boutok atelier vannerie, 11 rue du port, 29900 Concarneau – 06 61 52 66 64
Lien internet vers son site : Boutok – Atelier vannerie Concarneau
Pour tisser plus loin :
*Myriam Roux lien vers son site : Page accueil – Myriam Roux – Art et nature
* « Tresser les herbes sacrées », Robin Wall Kimmererer chez Le lotus et l’éléphant
* « L’homme qui plantait des arbres », Jean Giono chez Gallimard
* « Un monde nouveau », Feu! Chatterton sur l’album Palais d’argile
* la contemplation de l’œuvre « Transition » de Sophie Prestigiacomo et Régis Poisson, dans l’exposition « Métamorphoses » visible jusqu’au 3 octobre 2021 au domaine départemental de La Roche Jagu, Côtes d’Armor.