A Gâvres (56), Maison Glaz, havre de transition écologique et citoyen

A Gâvres (56),  Maison Glaz, havre de transition écologique et citoyen
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A la suite de la deuxième Edition de son Forum des coopérations, le Réseau Cohérence publie en partenariat avec Eco-bretons une série d’articles sur l’engagement. Chaque article présente une initiative inspirante en Bretagne avec un focus sur sa manière d’accompagner l’engagement dans les transitions : comment sortir de l’entre-soi ; comment toucher de nouvelles personnes ou comment se relier à d’autres initiatives et coopérer ? Des enjeux auxquels nous tentons de répondre au travers de ce dossier. Nous continuons notre présentation avec une initiative au cœur du pays de Lorient : le tiers lieu éco-breton Maison Glaz, situé sur la pointe des saisies à Gâvres. Pour en faire sa présentation, nous avons rencontré Akira Lavault, co-fondatrice de Maison Glaz et encadrante technique d’insertion espaces verts et bâtiments du site.

Cohérence : « Peux-tu nous présenter Maison Glaz ? »

Akira : « Maison Glaz est un tiers lieu situé à l’entrée de la rade de Lorient. Il s’agit d’une reconversion d’un ancien centre de vacances de l’armée qui a été abandonné dans les années 2010. Cette ancienne zone militaire date d’il y a plus de 300 ans et a été démilitarisée il y a 3 ans. Le site fait 1 hectare et demi et comporte près de 750m2 de bâtiments. En reconvertissant ce site, on s’est donnés pour mission de remettre de la vie sous toutes ses formes sur la pointe de Gâvres et de travailler également à l’adaptation de ce petit caillou aux effets du dérèglement climatique. Donc c’est à la fois, un projet de revitalisation territoriale sur une presqu’île assez vieillissante et d’action climat par suite de l’érosion du trait de côte. »

Cohérence : « Comment pensez-vous arriver à répandre cette envie de s’engager dans une transition écologique autour de vous ? En somme, arrivez-vous à faire tâche d’huile ? »

Akira : « Je dirais d’abord que tout dépend du niveau d’engagement que l’on vise. Ce que nous essayons de faire à Maison Glaz c’est de susciter l’envie chez les gens. En travaillant sur l’inspiration et en essayant de montrer que c’est désirable d’agir, d’abord parce que c’est bon pour soi. Par exemple à Maison Glaz, on vend des produits au bar qui sont sains pour la santé mais également respectueux de la planète. Nos espaces sont également pensés pour être ludiques, dans le style guinguette. Il faut du récréationnel ou du sport comme notre espace yoga, et aussi de la culture ! On a besoin de faire appel à la détente, à l’imaginaire, au bien-être. Il est essentiel de montrer que la transition n’est pas contradictoire avec le plaisir et le confort mais sont au contraire, intimement liés. Il me semble par ailleurs essentiel d’adopter une posture bienveillante et de d’accueil inconditionnel des personnes, quel que soit leur niveau d’engagement, plutôt que des discours alarmistes ou culpabilisants. Et c’est ce que l’on essaie d’incarner à Maison Glaz. En effet, glaz en breton, c’est la couleur de la nature. C’est un nuancier de couleurs indéterminées entre le bleu, le vert et le gris, c’est une couleur indéfinie, changeante au gré des saisons et de la météo. Cela représente le nuancier de toutes les approches possibles pour aller vers la transition écologique et sociale.»

Cohérence : « Quelles sont pour toi les clés de la coopération pour une transition écologique ? »

Akira : « De manière générale, je pense qu’il faut porter une attention très profonde à l’intégration des gens et au ressenti des personnes dans un groupe. Pour moi, la clé de la coopération réside d’abord dans le fait d’avoir un cadre d’écoute assez fin. C’est ce qui permet d’établir la confiance. Deuxième élément : une raison d’être claire, une direction qui donne envie de s’engager. Si la cause est juste et que la confiance est présente, les choses peuvent aboutir. L’enjeu est alors que le projet se déroule dans les meilleures conditions possibles pour chacun. Bien sûr, tout le monde ne répond pas aux mêmes règles uniformes. Par exemple, certaines personnes dans un collectif vont demander plus d’autonomie que d’autres qui auront besoin d’un cadre plus sécurisant et déterminé. En fin de compte, il faut surtout que soient réunis ces éléments : un cadre d’écoute, sécurisant et une direction claire. Ce sont à mon sens, les clés de la coopération. »

Cohérence : « Aurais-tu un événement en tête qui a suscité un certain engouement et engagement à Maison Glaz ? »

Akira : « Bien sûr. Je pense à l’événement du Grand Bain qui a eu lieu début juillet. C’est la jonction entre deux dynamiques, le Festival des Tiers-Lieux de Bretagne et la Tournée des Tiers lieux organisée par l’association des 150 délégués élus de la convention citoyenne pour le climat. Cet événement a suscité un engagement fort, tant de la part des organisateurs, des partenaires que du public. Y ont été abordées les thématiques de l’océan, du climat, des Humains au XXIème siècle avec une focale sur le rôle des tiers-lieux dans la transition écologique, sociale et solidaire. Cet événement a été très partenarial, ce qui en a fait un véritable défi mais également tout son succès. Cela nous a permis de réunir assez de moyens financiers pour organiser une programmation culturelle de qualité. En termes d’engagement, on peut dire que celui-ci a pris multiples formes. On a en effet eu des personnes motrices de la dynamique mais aussi des personnes plus ponctuelles dans leur engagement. Dans tous les cas, il me semble important de se figurer que l’engagement n’est pas un trait permanent, mais qu’il va varier, selon les personnes, mais aussi, pour une même personne, selon les moments de sa vie. »

Cohérence : « Comment Maison Glaz accueille-t-elle les nouveaux porteurs de projets ? »

 Akira : « Avec un café (rire). Non, en fait c’est surtout faire en sorte de pouvoir arrimer le projet ou le porteur en question dans le projet Maison Glaz. Notre tiers-lieu est comme une sorte de coquille, et en règle générale, les choses sont assez ouvertes et libres tant qu’elles intègrent la question du lien social, du vivant et du climat. Par exemple, des jeunes artistes du coin sont venus nous voir pour avec un projet qui nécessitait une structure associative du territoire pour se concrétiser. On a écouté leur projet, puis on a tout de suite accepté de porter l’idée avec eux, car ce qui nous intéressait c’était d’apporter un nouveau regard sur le patrimoine du territoire.

Cohérence : Et comment est-ce qu’on fait pour créer du lien autour de l’engagement et pour le maintenir dans le temps ? »

Akira : « En faisant des projets. Les grandes conventions de partenariat que l’on peut signer entre acteurs sur le territoire ont le mérite d’exister mais ce qui compte avant tout, c’est de faire ensemble plutôt que d’avoir l’intention de coopérer. Et puis, ce n’est pas grave si le lien se détend un peu à un moment. Si celui-ci peut se renouer plus tard lors de nouveaux projets, c’est l’essentiel. »

Cohérence : « Enfin, penses-tu que l’on puisse parler d’un archipel de la transition sur le territoire de Lorient ? »

Akira : « Oui et pas que sur le pays de Lorient ! J’aime beaucoup cette expression d’archipel car on est sur une presqu’île ici et j’ai moi-même des origines japonaises. Un archipel possède comme caractéristique de réussir à créer une connexion forte entre toutes les îles qui le composent, tout en respectant l’autonomie de chacun. Sur certains projets, parfois on agit seul, parfois on mobilise les autres de son archipel. Je crois qu’il y a un archipel de la transition et qu’il est à l’échelle de la Bretagne, de la France, de l’Europe et même du monde ! C’est comme ça que se construit le changement, en travaillant chacun sur nos territoires, mais reliés ensemble par une membrane invisible. »

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