Tempêtes, houle, pluies… : face à ces phénomènes, quels aménagements du territoire possibles ?

Tempêtes, houle, pluies… : face à ces phénomènes, quels aménagements du territoire possibles ?
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Dirk, Petra, Qumeira…depuis le 24 décembre dernier, les tempêtes, dépressions, épisodes de fortes houles et vagues se sont succédés dans la région. « Nous avons trois phénomènes qui se sont conjugués », explique Franck Baraer, du service Études et climatologie de Météo France Rennes. « D’abord, la pluviométrie : sur 3 mois, c’est tout à fait remarquable, nous allons approcher les cumuls de 2000-2001, mais nous sommes encore loin de ceux de 1994-1995 », poursuit-il. « Ensuite, la submersion marine. Celles qui ont eu lieu lors des grandes marées de début janvier et début février 2014 peuvent d’ores et déjà être considérées comme exceptionnelles », commente Franck Baraer. « Troisièmement, le vent. Mais en terme de fréquence et d’intensité, on reste pour l’instant très loin de la période de référence de janvier et février 1990. Actuellement, ce sont plutôt des forts coups de vent », développe-t-il.

 

Cumuls de pluie et artificialisation des sols

 

Ces conditions, si elles sont remarquables mais pas exceptionnelles, ont eu des conséquences matérielles sur le territoire breton : inondations, chutes d’arbres, littoral abîmé… « Les côtes sont très découpées dans la région, ce qui fait que les dégâts sont liés aux conditions locales, les impacts peuvent être différents. », note Franck Baraer. « Depuis le mois de Décembre 2013, nous observons des précipitations supérieures à la pluviométrie normale (moyenne inter annuelle). Ainsi, durant les sept derniers jours, plusieurs sites finistériens ont connu des cumuls de précipitations de plus de 100 millimètres, soit l’équivalent de plus d’un mois de pluies en temps normal. En amont de Quimperlé on a relevé un cumul de 143 millimètres. Si l’influence des bouleversements du climat en cours n’est pas prouvée, les pluies persistantes sur des sols gorgés d’eau accentuent les inondations actuelles de nombreuses villes littorales ou estuariennes. », commente quant à lui Ronan Le Délézir, maître de conférences en Urbanisme et Aménagement du Territoire à l’Université de Bretagne Sud à Lorient (56). L’artificialisation des sols, qui a doublé depuis 20 ans dans la Région, joue également un rôle dans les phénomène d’inondations. « L’urbanisation sur les zones agricoles, le plus souvent périurbaines, grignotées par des zones d’habitats ou des zones d’activités est une des causes avancées dans ces inondations. En effet,  les revêtements urbains favorisent le ruissellement des eaux, posent des problèmes d’érosion des sols et gênent le rechargement des nappes phréatiques », constate Ronan Le Délézir.

 

Les risques, une question essentielle d’aménagement du territoire

 

 

Comment faire face à la situation ? « Les risques constituent une question essentielle d’aménagement du territoire, dans la mesure où l’existence d’un aléa sur un territoire donné conditionne l’organisation de cet espace par les sociétés humaines. Afin de garantir la cohésion du territoire national qui pourrait être remise en cause par une inondation de grande ampleur, le législateur a défini un certain nombre d’outils de gestion du risque. », fait remarquer Ronan Le Délézir. « Avec la loi Barnier de 1995, la politique de l’État vise désormais à contrôler l’urbanisation des lits majeurs et à inciter les autorités locales à intégrer le risque dans leurs documents d’urbanisme. La loi Bachelot du 21 juillet 2003 présente d’importantes avancées sur la transparence et le partage de l’information ainsi que sur les moyens de la prévention (entretien de la mémoire du risque dans les communes, renforcement des solidarités amont-aval au sein des bassins versants, réorganisation de l’annonce des crues, etc.). », détaille-t-il. « La nécessité de prévenir le risque d’inondation représente une contrainte très forte pour les communes. La mise en valeur des territoires communaux passe souvent par la réappropriation des espaces bordant les rivières qui constituent des lieux stratégiques en matière de transport, de logement, en raison d’une plus grande disponibilité foncière et d’un cadre de vie valorisant. Dans ce contexte, les communes cherchent plutôt à minimiser tout ce qui peut constituer une contrainte pour leur développement territorial et la mise en œuvre des outils de prévention du risque entraîne de nombreux conflits. », prévient-il également.

 

Trois scénarii pour le futur du littoral

 

Concernant les risques de submersion ou d’érosion côtières, Ronan Le Délézir note que « La zone littorale constitue un espace à forts enjeux pour les années à venir, notamment compte-tenu des conséquences induites par ce changement climatique. En effet, les littoraux, particulièrement le trait de côte, sont des zones fortement évolutives pour les secteurs sensibles à l’érosion côtière (parfois de plusieurs mètres par an) et à la submersion. Ils devraient subir des assauts accrus de la mer lors des tempêtes accentuant pour certaines côtes l’érosion et provoquant pour les zones basses, des submersions dommageables pour les populations et les activités littorales. »
Le géographe voit trois scénariis, concernant l’aménagement de ces espaces, pour les années à venir

 : -« Face aux risques, le choix de réaménager le territoire » : « Le principe repose sur le déplacement des biens de valeur qui sont le plus exposés au risque. ; Anticiper les risques en privilégiant des activités vers des zones moins vulnérables au changement climatique ».

– « l’acceptation du risque » : « en identifiant les zones les plus vulnérables (interdiction de toutes futures constructions) et en développant des plans d’urgence en cas de risques avérés. »

-« la protection à tout prix » , « induisant la construction et le maintient d’ouvrages de fixation du trait de côte (digues, enrochement, recharger les plages, protéger les dunes, etc.). La question clé : qui va supporter le coût des ces infrastructures ? les collectivités, l’état ou les propriétaires privés ? ».

L’enjeu est donc, selon Ronan Le Délézir, « d’organiser la compatibilité entre une intelligence ancienne et légitime des territoires littoraux et la prise en compte, tant des activités que des risques nouveaux qui en déterminent l’avenir. Il s’agit aussi de retenir des actions durables, en toute connaissance de cause, donc en évaluant leur résilience à moyen terme, à un horizon raisonnable au vu de nos savoirs régulièrement actualisés ». Des questions qui seront sûrement au cœur de l’actualité dans les prochains jours, puisque selon Franck Baraer de Méteo France Rennes, « Des pertubations sont encore à venir, avec de la pluie, et du vent. Il n’y pas de signes d’arrêt pour le moment ».

 

 

Qu’est ce que l’artificialisation des sols?

Le phénomène d’artificialisation des sols n’est pas exactement synonyme d’urbanisation. Ainsi, on entend par surface artificialisée toute surface retirée de son état naturel (friche, prairie naturelle, zone humide etc.), forestier ou agricole, qu’elle soit bâtie ou non et qu’elle soit revêtue (exemple : parking) ou non (exemple : jardin de maison pavillonnaire). Les surfaces artificialisées incluent donc également les espaces artificialisés non bâtis (espaces verts urbains, équipements sportifs et de lois
irs etc.) et peuvent se situer hors des aires urbaines, à la périphér
ie de villes de moindre importance voire de villages, à proximité des dessertes du réseau d’infrastructures, ou encore en pleine campagne (phénomène d’urbanisme diffus). En conséquence, l’étalement urbain implique nécessairement l’artificialisation des sols concernés alors que la réciproque est fausse, l’artificialisation s’expliquant seulement en partie par l’étalement urbain.

Source : www.developpement-durable.gouv.fr/Quelques-definitions.html

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Marie-Emmanuelle Grignon