Interview de Ronan Dantec, président de Climate Chance, sénateur de Loire-Atlantique

Interview de Ronan Dantec, président de Climate Chance, sénateur de Loire-Atlantique
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A Agadir, s’est réuni du 11 au 13 septembre, le 2° sommet Climate Chance. C’était l’occasion pour faire le point avec Ronan Dantec, Sénateur de Loire-Atlantique, porte-parole climat de CGLU, Cités et Gouvernements Locaux Unis, et président de Climate Chance.

Comment est venue l’idée de Climate Chance ?

L’idée est née lors d’ecocity 2013, avec la mise en chantier d’un premier texte commun des principaux réseaux mondiaux d’acteurs non-étatiques pour défendre un ODD spécifique sur la ville durable. La dynamique était lancée. À partir du moment où le constat avait été fait qu’il manquait un lieu de rencontre de tous les acteurs non étatiques, les collectivités territoriales bien sûr mais aussi les entreprises et les organisations non gouvernementales, il a bien fallu créer ce lieu où pouvaient se bâtir ces ponts et se construire des positions communes permettant à ces trois composantes de parler d’une seule voix, pas seulement pour obtenir une place formelle dans la négociation mais aussi apporter des contributions et des propositions sur le fond au débat.

Nantes était en 2013 capitale verte de l’Europe et cherchait des événements mondiaux à accueillir d’où Ecocity. Concrètement, tout est donc parti de cette rencontre et à l’époque, le thème de cette première expression commune n’était donc pas le changement climatique mais les objectifs du développement durable (ODD). Notre initiative, qui cassait les codes de l’ONU, habituée à négocier en silo, fut remarquée à New York et comme elle connut un certain succès, elle fut rapidement suivie d’une autre initiative lors du sommet climat de Ban Ki-Moon à New-York. Fort de ces deux textes qui montraient la capacité des acteurs non-étatiques à s’exprimer d’une même voix, il y eut ensuite le sommet Climat et Territoires à Lyon avant la COP21 puis dans la foulée le 1° sommet Climate Chance, à Nantes de nouveau.

Est-il toujours facile de faire cohabiter dans le même réseau des partenaires aux intérêts aussi divers que les entreprises, les collectivités territoriales et les ONG ?

Pour ce qui est de la coopération entre ces trois entités, je ferai remarquer que ce n’est pas tout à fait un hasard  si l’initiative est partie de France. En effet, nous avons une certaine habitude de travailler ensemble, Collectivités, Entreprises et ONG et les exemples ne manquent pas : Le Comité 21 sur le Développement durable ou plus largement, le CESE.          

Mais Climate Chance ne se résume pas à la coopération entre ces trois types d’acteurs. Nous comptons aussi une forte participation des organisations de jeunesse, de peuples autochtones, syndicats de travailleurs, et de chercheurs.

Qu’est-ce qui fait le succès de Climate Chance ?

Climate Chance est une auberge espagnole et doit le rester. Comme chacun y trouve son intérêt, chacun y collabore et y apporte ce qui lui importe. D’ailleurs en la matière, nous n’avons rien inventé puisque ce schéma est en partie inspiré de ce que nous avions vu à Ecocity Montréal en 2011, avec une multitude d’ateliers et d’événements. Tous ceux qui ont quelque chose à dire et à montrer doivent y trouver leur place, sans exclusive.

Qu’attendiez-vous de ce sommet ?

Vous aurez bien compris que nous n’avons pas de scénario totalement préétabli puisque par essence, nous sommes avant tout attentifs aux attentes exprimées par l’ensemble des parties.

Il me semble qu’on ressent ici à Agadir que les acteurs non-étatiques ont compris qu’ils ne pouvaient se limiter à une action de lobbying en amont des COP. Envoyer des messages aussi forts soient-ils aux gouvernements ne suffit plus. Tout d’abord une partie des dynamiques d’action n’attendent pas les COP pour se développer comme sur les énergies renouvelables. Une partie des décisions se prennent aussi en-dehors des COP, par exemple sur l’accès aux financements. Les bailleurs de fond sont largement extérieurs au schéma des COP et donc l’action de Climate Chance doit viser maintenant à convaincre ce type d’acteurs. C’est d’ailleurs dans cette perspective, que Climate Chance organise à Paris le 10 décembre un sommet consacré au financement, deux jours avant le sommet qu’organisera le Président de la République Française sur le même sujet le 12 décembre, pour justement porter les propositions que nous avons forgé à Agadir pour faciliter l’accès aux financements. 

Peut-on dire que ce sommet est une réussite ?

Aux acteurs présents de le dire. Le principe de l’auberge espagnole est que chacun apporte ce qu’il a et chacun en retire ce qu’il veut. L’action de Climate Chance, c’est une offre. S’il y a du monde à nos rencontres, c’est que notre offre correspond à des attentes. Si personne ne venait s’agréger, cela voudrait dire que notre offre n’est pas pertinente et il faudrait passer à autre chose.

L’association Climate Chance a néanmoins une responsabilité spécifique de diffusion et de suivi des déclarations communes et des résultats d’Agadir.

Et maintenant ?

Pour ce qui concerne la déclaration finale, il ne s’agit pas d’une nouvelle déclaration générale déplorant l’état de la planète mais plutôt d’une feuille de route qui doit nous amener au dialogue de facilitation de 2018 qui est un enjeu important pour la réévaluation de l’action. Nous allons aussi être attentifs au suivi des différentes coalitions thématiques qui portent les dynamiques d’action concrète.

Nous allons par ailleurs développer notre rôle d’observatoire de l’action des acteurs non gouvernementaux et nous devrions publier un premier rapport à l’automne 2018. N’oublions pas que le ressort principal de Climate Chance, c’est la lutte contre le climato-fatalisme et que le meilleur moyen de lutter est de montrer des actions qui marchent et pourquoi elles marchent, d’où la nécessité d’avoir une évaluation aussi rigoureuse que possible de ces initiatives, pour crédibiliser un scénario de stabilisation du climat.

Climate Chance a été créée en Europe mais son but est d’animer la dynamique mondiale et la nourrir partout. La déclaration des élus locaux et régionaux africains est une étape importante de notre développement en Afrique. La présence des élus locaux nord-américains de « we are still in » montre aussi que nous renforçons nos liens avec le continent nord-américain. L’Asie sera une prochaine étape, nous y travaillons.

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Dominique Guizien